Nouvelles de Fukushima

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Évidemment, tout le monde aura compris qu’il s’agit d’une fiction. Aucune organisation indépendante, depuis l’inquisition, n’a brûlé de professeur ni de sorcière. Les derniers bûchers ont éclairé les nuits du siècle des lumières.

 Il y a toutefois quelques éléments de vérité dans cette fiction.
– Il est vrai que le critère d’évacuation autour de Fukushima a été d’évacuer les zones où la radioactivité était supérieure à 20 mSv/an (la première année).
– Il est vrai que c’est la limite supérieure des recommandations de l’ICPR.
– Il est vrai que la radioactivité naturelle est très variable d’une région à une autre, de Paris à la Bretagne, de la Bretagne au Kerala : 2,5 mSv par an en moyenne en France, jusqu’à 50 ou 100 mSv au Kerala.

La question est donc :
– La radioactivité naturelle au Kerala est de 50 mSv/an ou plus.
– Si donc un accident nucléaire survenait au Kerala, faudrait-il fixer la limite d’évacuation à 20 mSv ? Mais alors, pourquoi ne pas 

faire évacuer le Kerala tout de suite ?
Le critère d’évacuation autour de la centrale de Fukushima fut de 20 mSv.

En attendant la réponse, la variété des paysages, la beauté de certains sites, font du Kerala une destination touristique recherchée. Même si ce sont des paysages à 100 mSv/an.

 Ce texte est une illustration du fameux problème dit des faibles doses d’irradiation, et des questions qui se posent :
– En dessous de 100 mSv/an, ces irradiations sont-elles nocives ?  Cela n’a jamais été constaté.
– Sont-elles plus nocives que le stress d’une évacuation forcée de son domicile ? Après toute catastrophe, guerre ou événement grave, il a toujours été constaté une altération de la santé physique et psychique des personnes déplacées. (Pierre Yves Morvan)

Il faut apporter quelques précisions que n’importe qui peut retrouver dans Wikipedia et n’importe quel polycop universitaire de physique. Sans alimenter la polémique sur la radioactivité naturelle (rayons cosmiques, spallation, croute terrestre, radon ou thorium) il faut relativiser la situation (voir un billet de ce blog intitulé « Le paradoxe de la banane ») dans les zones dites contaminées à la suite du grand tsunami du 11 mars 2011 au Japon. Notre corps est radioactif puisqu’il nous est impossible de ne pas ingérer et assimiler du potassium radioactif (K40) provenant du sol et du carbone-14 (C14) provenant de l’atmosphère et qu’on retrouve dans tous les aliments. La radioactivité de notre propre corps est la principale source de rayonnements ionisants auxquels on est soumis quotidiennement et ces rayonnements sont loin, très loin, d’être négligeables pour ne pas dire anodins. Pour que les choses soient définitivement très claires pour tous ceux qui ont peur de la radioactivité et qui s’énervent chaque fois que je parle dans mon blog de Fukushima-Daiichi il est nécessaire d’apporter quelques précisions.

Le potassium-40 se désintègre (4900 désintégrations par seconde ou becquerels pour une personne de 70 kg, soit environ 18 mg de cet isotope radioactif dans notre corps) un peu plus de 10 % du temps en argon en émettant un rayon gamma relativement énergétique de 1504 keV. Pour le reste c’est une émission de rayons beta– énergétiques (des électrons) qui peuvent parcourir jusqu’à 1 mm dans notre corps en provoquant des ionisations sur leur chemin.

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Pour le C14, c’est bien moins dangereux puisqu’en se désintégrant en azote il y a émission d’un rayon beta– (électron aussi) de 156 keV d’énergie qui parcourt péniblement 2 dixièmes de millimètres toujours dans notre corps. Mais c’est tout de même inquiétant puisque ce carbone se transforme en azote et les estimations en arrivent à la situation suivante : chaque seconde, 50 atomes de C14 contenus dans notre ADN se transforment en azote. Heureusement que nos cellules disposent d’outils pour réparer cet ADN sinon ce serait la catastrophe, mais pas tant que ça car c’est peut-être par ce processus que nous nous sommes différencié du singe, mais c’est une autre histoire …

Venons-en au césium-137 (Cs137), cet horrible césium qui a été déversé par la centrale de Fukushima-Daiichi dans la campagne environnante et qui fait la Miss Magne si nerveuse.

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Si on compare le mode de désintégration du Cs137 à celui du K40 on remarque deux choses : soit la désintégration se fait via l’émission d’un rayonnement beta- (électron) plutôt énergétique (1174 keV), soit dans la plupart des cas par l’émission d’un beta- bien moins énergétique que celui émis par le K40 suivi d’un rayon gamma également bien moins énergétique que celui émis par ce même potassium 40. Je n’invente rien, ces données sont disponibles dans n’importe quel ouvrage de physique nucléaire et également sur Wikipedia d’où les deux illustrations sont tirées. En d’autres termes, puisqu’on parle de sieverts, de milli- et de micro-sieverts par an, rien que « nos » potassium et carbone radioactifs représentent une dose de près de 14 milli-sieverts par an en tenant compte de l’énergie des rayonnements ionisants de ces deux éléments. Et finalement pour encore mieux relativiser la situation mettez un bonhomme sur chaque mètre carré des zones évacuées aux alentours de la centrale de Fukushima-Daiichi et vous dépassez allègrement les doses permises par le gouvernement japonais qui sont pour rappel de 20 milli-sieverts par an !!!

Alors finalement, de quoi devons-nous avoir peur ? Faut-il que tous les habitants du Kerala évacuent leurs logements comme on a contraint beaucoup de Japonais à fuir le leur en raison de la limite admissible de césium fixée beaucoup trop bas par les autorités japonaises comme le fait remarquer avec ironie Pierre Yves Morvan ? Les rayons gamma émis par le césium 137 sont deux fois moins énergétiques que ceux émis par le potassium 40 donc beaucoup moins dangereux ! Il faut plutôt avoir peur des politiciens et des écologistes paranoïaques du genre Janick Magne qui, soit n’y comprennent rien et s’affolent inutilement, soit masquent ou déforment délibérément la réalité scientifique incontestable à des fins idéologiques …

Source : http://blogs.mediapart.fr/blog/pierre-yves-morvan/051014/catastrophe-nucleaire-au-kerala , illustrations Wikipedia et capture d’écran du blog de Pierre Yves Morvan hébergé par Mediapart puis la réponse délirante de Janick Magne :

http://blogs.mediapart.fr/blog/janick-magne/051014/reponse-pierre-yves-morvan

Autre lien : https://jacqueshenry.wordpress.com/2013/08/11/le-paradoxe-de-la-banane/

7 réflexions au sujet de « Nouvelles de Fukushima »

  1. Diantre… Voilà encore un problème un peu « gênant » prestement balayé sous le tapis.

    Et mon séant c’est du gallinacé ?

    Ce n’est pas Janick Magne mais plutôt vous qui semblez délirer et nager dans la confusion la plus totale en comparant le Kerala et Fukushima et en mélangeant allègrement irradiation externe et interne.

  2. Ah bon ? Pouvez-vous préciser la différence entre irradiation interne et irradiation externe ? J’ai été contaminé deux fois par de l’iode 125. Ma thyroïde était franchement radioactive mais ça n’a pas duré longtemps (demi-vie une cinquantaine de jours) … par contre le potassium 40 est dans notre corps toute notre vie.

    • Pardi.

      Kerala c’est le thorium et le radon des sables et roches qui ne s’incorporent pas chimiquement dans les organes comme le K 40, le C 14, le Cs 137, le Sr 90, l’ I 131 ou I 125 qui eux ont justement les propriétés chimiques pour le faire à la place des K, C, K, Ca, et I stables, respectivement, et jouant justement un rôle majeur dans le métabolisme même du vivant qui les incorpore donc TRES ACTIVEMENT. Alors qu’il n’a besoin ni de Th ni de Rn.

      Pour le K 40 naturel c’est typiquement autour de 100 Bq/ Kg de matière organique riche en K comme une banane, une patate ou votre coeur et même moins pour le reste. A peine plus d’un atome sur 10000 du potassium est du K 40 radioactif. Pour ces « contaminations » (et les doses correspondantes reçues) très faibles notre organisme fait un excellent job pour réparer les quelques dégats occasionnés et il y a probablement même hormèse.
      Et en passant, contrairement à ce que vous affirmez, ce ne sont pas les éléments radioactifs naturels incorporés qui contribuent le plus à l’irradiation naturelle mais plutôt l’irradiation par l’inhalation du radon. Des chiffres ici: http://www.physics.isu.edu/radinf/natural.htm

      Pour le Cs 137 issu de l’industrie nucléaire par contre les contaminations sont énormément plus élevées souvent de plusieurs ordres de grandeurs dans les régions autour de Tchernobyl ou Fukushima et donc pour les gens qui y vivent et mangent les produits qui y poussent ou y sont élevés. Des contaminations de 1000 ou 10000 Bq/kg sont courantes même des décennies après l’accident. Et à ces doses-là tout indique que les capacités de réparation de notre organisme sont rapidement submergées.

      A titre d’exemple, étant chasseur et 10 ans après Tchernobyl, il m’arrivait encore de tirer des sangliers faisant plus de 10000 Bq/kg dans les Vosges, à des milliers de km de la centrale accidentée.

      Alors décidément, non, non et non, Monsieur. Le Cs 137 des accidents nucléaires, ce n’est pas du tout « comme le Kerala ou le K 40 naturels ». C’est un autre monde où l’homme n’a plus sa place.

      • Bonjour Pyrrhus,
        JH parle de « background radiation, » et vous de nourriture.
        Pour la nourriture, mes dernières lectures m’ont grandement rassuré dans ce domaine. Par exemple :
        « Fukushima prefecture tested all the 10 million brown rice bags produced in Fukushima last year, and only 71 exceeded the government-set limit of 100 Bq/kg » (source Dr. Ryugo Hayano)
        Il faut faire attention avec ces grandeurs: le Japon recommande moins de 100Bq/kg, mais la norme aux USA est 1200, et un médecin recommande 10 au maximum (source http://agreenroad.blogspot.sg/2013/08/dr-conrad-miller-md-how-radiation.html)
        Une étude sur des Japonais vivant à proximité de la centrale rapporte que le taux de 137Cs dans le corps a largement diminué, voir le graphique page4 https://www.jstage.jst.go.jp/article/pjab/89/4/89_PJA8904B-01/_pdf
        Vos sangliers ont l’air effectivement fortement contaminés. Comment les avez-vous mesurés ?
        Le probleme avec la radioactivité, c’est que le moindre écart est repris et dramatisé. Parle-t-on autant par exemple des risques de contamination aux métaux lourds en mangeant les tomates poussant sur votre balcon ? (« Heavy metal content often over EU standards for lead concentration in food crops ; Grow your own’ food in inner cities not always ‘healthier’ than supermarket products » source:http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0269749112000929

  3. Pour la contamination des sangliers les tests étaient systématiques pendant longtemps chez nous et, au vu des résultats, la Fédération des Chasseurs du Bas-Rhin n’a pu se féliciter que récemment du fait qu’ils semblent maintenant enfin devenus inutiles …

    Mais ces mesures sont toujours (très) utiles plus à l’est en Saxe, à encore plus de 1000 km de Tchernobyl, où 1/3 des animaux prélevés sont encore au-dessus de 600 Bq/kg, la norme qui interdit leur vente et leur consommation, et certains sangliers présentent encore plus de 6000 Bq/kg.

    http://blogs.mediapart.fr/edition/nucleaire-lenjeu-en-vaut-il-la-chandelle-pour-lhumanite/article/030914/alarme-aux-sangliers-nucleaires

    Pour la présence de Pb ou autres métaux lourds dans les produits poussés en ville je ne sais pas quel est le niveau précisément mesuré à Berlin (je ne peux lire que l’abstract ) mais a priori la situation s’est drastiquement améliorée depuis l’abandon des carburants au plomb et le problème n’est au moins plus nié depuis longtemps.

    Alors que celui du nucléaire l’est toujours par des groupes de gens très puissants et continuera à l’être car c’est la seule manière de développer cette industrie. Et la tentation de la développer de façon massive sera de plus en plus irrésistible avec l’épuisement inéluctable des hydrocarbures fossiles.

    • Pyrrhus,
      Les sangliers ne sont pas vitaux pour approvisionner la population en nourriture. Si les céréales ou l’eau étaient contaminées il faudrait d’urgence arrêter le nucléaire : ce n’est pas le cas. 71 sacs sur 10e7 et 2 jours d’eau polluée à l’iode à Tokyo, pour un séisme parmi les 10 plus intenses jamais enregistrés, c’est pas trop cher payé.
      En Bretagne l’agriculture pollue les nappes phréatiques en nitrates. Il faut boire de l’eau minérale. Et pas à cause d’une catastrophe naturelle hors norme, non, c’est tout le temps, c’est business as usual. Et le sel, le tabac, le gras, l’alcool, le sucre, la sédentarité etc.?
      Alors, où est le scandale sanitaire ?

  4. Je n’ai pas (encore) de données pour Fukushima mais une demi-vie de Cs137 après Tchernobyl les aliments de BASE ( les sangliers ne sont évidemment qu’un symptôme du phénomène) produits en Biélorussie même à des centaines de km du site sont toujours dangereusement contaminés. Voilà des territoires automatiquement générateurs de maladies et de vie misérable pour des siècles pour les autochtones qui y (et en) vivaient en bonne santé depuis des millénaires.

    Navré, mais à mon avis seuls les plus aveugles ou les plus cyniques de ceux qui ne vivent pas dans de tels territoires ou peut-être des citadins qui vivent depuis toujours dans des villes approvisionnées (encore pour un certain temps seulement) par des aliments produits ailleurs peuvent trouver que « c’est pas trop cher payé ».

    Je n’arrive pas non plus à comprendre comment vous pouvez trouver cela comparable au problème des nitrates en Bretagne. La Bretagne reste encore, pour le moment et malgré la connerie des élevages hors sol, une belle région où il est possible de vivre en excellente santé si l’on veut sans même dépendre d’eau minérale en recueillant l’eau de pluie par exemple. Et le problème des nitrates pourrait être résolu rapidement à l’échelle humaine contrairement à la contamination des sols par les produits de fission.

    Enfin, je comprends encore moins la comparaison avec « le sel, le tabac, le gras, l’alcool, le sucre, la sédentarité » qui relèvent simplement du comportement et de décisions individuels et le remède est à la portée de main de chaque individu alors la pollution radioactive est pratiquement irrémédiable à l’échelle humaine, imposée de l’extérieur comme le résultat de décisions extérieures, à des gens qui n’ont rien demandé et n’y étaient même pas associés ou à qui on a grossièrement menti.

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