Evolution du climat au cours des deux derniers millénaires

En m’inspirant toujours de l’article très riche en information d’Andy May dont j’ai laissé le lien dans un précédent billet il m’est apparu intéressant d’effectuer une analyse détaillée de la figure 2 de son somptueux article. Il s’agit de l’analyse de l’évolution des températures au nord du trentième parallèle réalisée minutieusement par les Docteurs Christiansen et Ljungqvist en 2012 en utilisant exclusivement ce que l’on appelle des proxys, très exactement 91, c’est-à-dire des analyses des cernes des arbres, des sédiments lacustes et marins, des teneurs en oxygène-18 des carottages glaciaires, des chroniques tant européennes que chinoises, de l’analyse des spéléotèmes, bref, à l’exclusion des relevés de températures avec des thermomètres ou plus récemment par analyse satellitaire. Si la diversité de tous ces proxys ajoute un degré de difficulté dans l’analyse ces auteurs ont été contraints d’homogénéiser toutes ces données du point de vue chronologique. Je conseille aux lecteurs de ce billet de jeter ne serait-ce qu’un coup d’oeil pour qu’ils se rendent compte du travail de fourmi réalisé par ces auteurs (doi : 10.51194/cp-8-765-2012 que l’on peut trouver aussi sur le site www.clim-past.net/8/765/2012 ). Il est tout aussi admirable de constater le travail qu’a réalisé Andy May pour en arriver à la reconstruction de l’évolution des températures dans l’hémisphère nord (hors régions intertropicales) tout aussi minutieuse. Pour plus de clarté cette reconstruction a été exprimée en anomalie par rapport à la moyenne des températures (reconstruites également) entre 1880 et 1960.

Une autre complication apparaît lorsque l’on rapproche tous les proxys utilisés par Christiansen et Ljungqvist. Disserter de l’évolution de climat moyen est une approche loin d’être satisfaisante sinon exacte car le climat dépend des interactions locales entre le relief, les vents et la proximité ou non d’une étendue océanique. Contrairement aux études des sondages effectués dans le détroit de Makassar, les proxys terrestres varient considérable d’une région à l’autre. Par exemple alors que l’Europe faisait l’expérience de froids rigoureux au début du Dix-huitième siècle le nord de l’Alaska connaissait des température presque clémentes, et quand Napoléon s’est aventuré dans les grandes plaines d’Europe orientale et de Russie il a mal choisi la date de sa campagne alors que le centre de la Chine profitait de températures plus clémentes que d’habitude. Bref, après un véritable travail de bénédictin Andy May a réussi à obtenir cette reconstruction :

On retrouve la tendance vers un refroidissement si on fait abstraction des deux périodes optimales, médiévale et contemporaine. La période chaude médiévale (MWP) a duré deux siècles et a connu un essor sans précédent du bien-être des peuples d’Europe, une croissance de la population favorisée par des récoltes abondantes avec une urbanisation également jamais constatée auparavant. La pluviométrie due à des températures élevées a permis la transformation des déserts d’Asie centrale en plaines herbeuses, ce qui a ouvert la voie à Gengis Khan jusqu’aux portes de l’Europe. Et une population foisonnante a été la principale explication de la construction en Europe occidentale des cathédrales. L’homme n’a rien fait pour que le climat suive à nouveau cette pente descendante jusqu’au milieu du dix-neuvième siècle, ce que l’on a appelé le petit âge glaciaire (LIA). L’optimum moderne qui a débuté au milieu des années 1930 paraît comme une sorte d’accident transitoire dans cette évolution générale du climat. Tout a été fait pour trouver une explication à cette poussée des températures et la plus communément admise (approuvée par 99 % des scientifiques concernés) est la conséquence sur le climat des émissions de CO2 provenant de l’utilisation des combustibles fossiles carbonés. C’est presque caricatural d’en être arrivé là. Comment tous ces experts expliquent-ils l’optimum climatique médiéval ? Il serait intéressant de leur poser la question et qu’ils répondent de manière circonstanciée. Selon la reconstruction d’Andy May les températures atteintes durant le MWP ont été supérieures à celles reconstruites à l’aide des proxys lors de l’optimum moderne, abstraction totale faite des relevés de températures à l’aide de thermomètres qui ont conduit à des délires inimaginables du genre « courbe en crosse de hockey » d’évolution des températures, résultat d’une manipulation éhontée des relevés de températures que les anglo-saxons appellent le « sherry-picking ». Les travaux de Christiansen et Ljungqvist repris par Andy May sont tout sauf du sherry-picking.

Avec l’optimum climatique moderne l’humanité (hors zones intertropicales) vit encore et depuis la fin de la première guerre mondiale un âge d’or éphémère qui pourra encore durer quelques années ou dizaines d’années, ensuite ce sera l’inconnu … Retrouvez l’article d’Andy May en vous reportant au précédent article à ce sujet sur ce blog.

9 réflexions au sujet de « Evolution du climat au cours des deux derniers millénaires »

  1. Ping : Evolution du climat au cours des deux derniers millénaires – Qui m'aime me suive…

  2. C’est un travail remarquable. Cependant je reste sur ma faim quand les courbes s’arrêtent en 1960… Les données utilisées pour ce travail existent entre 1960 et 2021 bien évidemment, pourquoi ne pas les afficher ? Les omettre ne peuvent que semer le doute sur toutes ces études.

    • 1. Tous les proxys utilisés s’arrêtent en 2000
      2. Depuis 2000 la température moyenne dans l’hémisphère nord n’a pas évolué hormis 2 phénomènes El Nino qui ont fait croire que le climat se réchauffait. Pour apprécier l’évolution du climat regarder le ciel et le thermomètre fixé à l’extérieur de la fenêtre pour en déduire que le climat change, la tendance se mesure à l’échelle d’une vie humaine. Je suis donc trop vieux pour voir le climat se refroidir, je laisse ce plaisir à mes petits-enfants et à leurs descendants …

  3. On peut croiser la courbe d’évolution du CO2 atmosphérique sur le dernier millénaire (Jean-Marc Barnola, LGGE-CNRS) avec la courbe de températures d’Andy May (écarts bruts à la moyenne si j’ai bien compris) et on constate sans surprise que la corrélation entre teneurs moyennes en CO2 atmosphérique et températures de l’air dans les couches basses est très marginale.
    Par contre, cette corrélation est forte de 1850 environ à nos jours, mais elle ne peut être signifiante au vu des périodes précédentes (corrélation n’est pas nécessairement causalité). Le facteur de causalité est donc à rechercher ailleurs. D’autres résultats déjà vu indiquent que nous somme rentrés à nouveau dans une phase de refroidissement du climat.
    Courbe de Barnola : https://www.fondation-lamap.org/fr/page/20255/co2-et-climat
    Note : « cherry-picking » = sélection des seules données les plus favorables à l’appui d’une hypothèse.

  4. Très intéressant ce billet, merci à leurs auteurs et aux contributeurs du blog.
    La courbe utilisée par Barnola est me semble t’il utilisée également par Claude Lorius, je ne sais pas dire à qui elle est due, peut être une collaboration de plusieurs équipes travaillant sur la question. Il me semble que même Jouzel a travaillé la dessus.
    Cette courbe me pose problème en tant climato-réaliste. En effet il est difficile de la contester en invoquant que corrélation n’est pas causalité.
    La datation du carbone contenu dans les carottes glaciaires correspond apparemment au CO2 que nous avons largué dans l’atmosphère en brûlant nos hydrocarbures.
    Existe il une publication qui contre dit ceci ?

    • Réponse partielle et personnelle : Bonne remarque, merci. Il ne s’agit pas de contester pas la courbe de Barnola, elle est utilisée par des « climato-réchauffistes » et cela n’est pas dérangeant en soi, le sujet n’étant pas idéologique. Partons du principe qu’elle est réalisée par des scientifiques sérieux (si tant est qu’on considère que le CNRS est un organisme de recherche sérieux, ce que je crois). Ce qui est plus délicat en revanche, c’est son interprétation. Il ne suffit pas de dire que le CO2 augmente dans l’atmosphère (dans des proportions infinitésimales cela dit) pour en faire un facteur de causalité sur une période donnée (attention au phénomène courant de « cherry picking » dénoncé dans le billet de Mr Jacques Henry à juste titre, ce qui a plombé la crédibilité de la courbe en crosse de hockey de Michael Mann, la période choisie et les données sélectionnées étant trop favorable au soutien de l’hypothèse de départ).
      Je n’ai pas le temps de le faire du fait de mes occupations professionnelles, mais il serait judicieux d’avoir l’évolution des principaux gaz atmosphériques connus pour causer un effet de serre (et notamment la vapeur d’eau dont l’effet de serre est très supérieur à celui du gaz carbonique) au cours du dernier millénaire. Là, la courbe de Barnola pourrait être comparée aux autres courbes d’évolution de la teneur en gaz atmosphériques, et on y verrait encore plus clair sur le plan phénoménologique. En tout état de cause, la non-corrélation entre CO2 et températures sur le dernier millénaire discrédite de facto le CO2 comme facteur causal principal. Il peut toutefois intervenir dans des processus encore inconnus comme facteur intermédiaire ou comme cela est souvent supposé par les « climato-réalistes », comme facteur final à savoir que le réchauffement des océans engendre physiquement la mise en phase vapeur du CO2 dissous dans l’eau, avec un délai important du fait de l’inertie thermique élevée des masses d’eau océaniques.

      • Pour résumer, la courbe de Barnola ne peut être utilisée pour expliquer la PHENOMENOLOGIE des processus physiques et chimiques en action dans le cadre d’une élévation ponctuelle des températures (plus précisément des écarts à la moyenne de températures). On est encore à des années-lumière d’une théorie scientifique explicative du climat et de son évolution. La théorie AGW est évidemment caduque depuis qu’on a des relevés de températures issus d’observations satellitaires. Elle perdure dans les esprits pour des raisons purement politiques.

      • Merci d’avoir pris le temps de répondre.
        Je vais me documenter sur cette courbe et sur la manière dont elle a obtenue.
        Il faut avoir des arguments en béton lorsqu’on discute avec une personne qui suit la doxa du RCA.
        J’ai bien suivi (a posteriori) la controverse sur la courbe de Mann.
        Le pire dans cette histoire est que de nombreux relecteurs et contributeurs du GIEC étaient tombés d’accord sur le fait que les données utilisées par Mann et al, étaient inappropriées mais … la fameuse courbe a été laissée telle quelle dans un rapport.
        Ceci est anti scientifique et assurément déloyal !

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