Le lait dans tous ses états

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Dans le petit super-marché de mon quartier j’ai dénombré 19 laits différents. Un seul est du « vrai » lait de vache stérilisé par traitement à ultra-haute température (UHT) et entier, celui dont je bois 365 litres par an. Il y a des laits fabriqués avec du soja, des noisettes, des amandes, des arachides, des noix à côté de laits de vache reconstitués à partir de lait en poudre, mais on trouve aussi des laits de brebis ou d’ânesse carrément prohibitifs et enfin des laits enrichis en vitamine D ou d’autres minéraux. Et pour ceux qui ont le goût du risque des laits exotiques fabriqués avec des mélanges de jus d’avoine et de lait de coco, de quinoa, de noix exotiques dont j’ai oublié le nom, de graines de chanvre, d’anacardier, bref la réalité dépasse la fiction car on se trouve dans un super-marché et non pas dans une de ces boutiques d’aliments arborant le label « bio ». Il y a seulement dix ans tous ces pseudo-laits étaient réservés aux végétariens ou aux personnes réellement allergiques à un composant du lait de vache ou intolérants au lactose. Aujourd’hui dans tous les bars le café est accompagné d’un tout petit pot de lait qui n’est pas du lait mais un jus élaboré à partir de soja ou de noix de coco et de riz.

Conséquence de cet engouement pour les laits « alternatifs » : la chute vertigineuse de la demande en lait de vache et donc du prix du lait de vache à la ferme. Rien qu’en Grande-Bretagne 1000 fermes laitières ont fermé entre 2013 et 2016 et la tendance est identique dans de nombreux pays d’Europe continentale. Abreuvés de propagande quasiment quotidienne les adolescents se détournent du lait de vache car cette propagande insiste sur le fait que le lait peut contenir des antibiotiques mais aussi que l’élevage bovin est mauvais pour l’environnement et pour le climat.

Le problème que les détracteurs du lait de vache semblent oublier est qu’il faut beaucoup plus de surface arable pour assurer des récoltes d’amandes ou d’avoine suffisantes pour fabriquer l’équivalent du lait de vache. Dans les alpages de Suisse ou des Asturies les vaches mangent de l’herbe à la belle saison et du foin en hiver. Pendant des siècles le lait était considéré comme dangereux car on ignorait la technique pour le stériliser, le lait étant un excellent milieu de culture pour un éventail éventail de bactéries. Avec la stérilisation par ultra-haute température qui n’altère pas les propriétés du lait, technique également utilisée pour les jus de fruit et également le vin, il n’y a plus de risques de contamination bactérienne.

Aujourd’hui les laits alternatifs sont une source considérable de revenus pour les sociétés qui les produisent et les commercialisent. Par exemple la société suédoise Oatly qui commercialise un lait à base d’avoine surtout utilisé dans les cafés a vu son chiffre d’affaire croître de 1250 % depuis 2016 ! Cependant la filière laitière, spécifiquement la production du lait de vache, reste un monstre au sein de l’industrie agro-alimentaire mondiale avec 274 millions de vaches et un chiffre d’affaire global de 400 milliards de dollars mais elle est attaqué par les protecteurs de l’environnement et du climat en permanence et c’est l’une des raisons pernicieuses qui explique pourquoi des géants comme Danone se positionnent agressivement dans le créneau des laits d’origine végétale. Il reste que l’amande représente les deux tiers de tous les « faux » laits végétaux et un autre petit détail qui a échappé aux écologistes et aux « végans » est qu’il faut 4,5 litres d’eau pour produire une amande, plus précisément la graine or 80 % de la production mondiale d’amandes provient de Californie et elle utilise plus de 10 % de l’eau disponible dans cet état soumis à des épisodes de sécheresse récurrents. Enfin, il ne faut pas se leurrer : un lait végétal à base d’amandes ne contient en réalité 2 % de lait d’amande, le reste étant des huiles végétales, baucoup de sucre et des agents chimiques autorisés pour maintenir une émulsion stable, en réalité beaucoup d’eau !!! Les laits à base d’avoine tendent à conquérir des parts de marché car ils présente la particularité de mousser. C’est ce qui a d’ailleurs fait la bonne fortune de la société Oatly.

Pour conclure cette revue non exaustive, l’étiquettage de tous ces « laits » est judicieusement documenté : sans produits lactés, sans sucre (faux la plupart du temps), sans soja (risque de soja génétiquement modifié), sans OGMs, sans bis-phénol A, sans lactose, sans gluten, etc … à tel point que cet étiquettage énumérant les absences est deux fois plus long que celui relatif aux qualités nutritionnelles. Quand finiront toutes ces obsessions, nul ne le sait …

Inspiré d’un article paru sur The Guardian

18 réflexions au sujet de « Le lait dans tous ses états »

  1. Les prairies, et donc l’élevage des bovins, mais pas que,que ce soit pour la viande ou le lait (ou les deux, mais pas sur la même bête en même temps…), c’est pour l’Environnement, on n’ose pas dire le Climat de peur d’être traité de « négationniste » (pour rester poli 🙂 )

  2. Si il y a moins de vaches il y aura moins de fumier et donc moins d’agriculture biologique.
    A partir du moment où les consommateurs sont capables de gober les pires âneries ( glyphosate, réchauffement climatique, ogm, l’islamisation de l’Europe est une chance etc….) les gens de marketing ont devant eux un terrain bien préparé pour vendre des produits  » alternatifs »;

  3. C’est un drôle de retour à la nature… Mais tout cela représente un bon fromage !!!
    Heureusement qu’on n’a pas encore dit que c’était susceptible d’être cancérigène… Par ailleurs je viens de lire un article du Figaro concernant les facteurs qui favorisent le cancer. Surprise il y a l’alcool, le tabac en principaux coupables, mais dans la longue liste pas de glyphosate ! J’ai de la peine pour la responsable de l’étude qui n’échappera pas à la vindicte des verts…

    • En effet, le plus grand nombre de décès est dû en France à la consommation de tabac et d’alcool (deux substances naturelles) : 120.000 morts par an.

      • Sans oublier les « particules fines » -sous entendu émises, uniquement, par les moteurs diesel- qui causent (???) plus de 40.000 décès par an, mais on ne sait plus très bien si c’est en France only (#66M habitants) ou dans toute l’Europe # 500M d’habitants…
        Quant aux conducteurs de véhicules diesel, fumeurs et alcooliques ???

  4. Ayant étudié le lait de façon scientifique dans mes jeunes années (le « Science du lait » de Charles Allais ayant été une de mes bibles sur le sujet), je suis sidéré de constater que les livres de Thierry Souccar sur les méfaits du lait de vache font un tabac. Commentaire d’une amie écolo -prof d’anglais de son état- sur le lait : « Passé l’âge de 3 ans, notre organisme ne produit plus les enzymes nécessaires à sa métabolisation, le lait n’est donc pas indispensable » (propagande écolo-foireuse type Souccar). Plutôt que de contre-argumenter, je préfère lui ramener un plateau de fromages et du pain aux noix et aux noisettes quand je lui rends visite dans sa campagne du Vexin. LOL.

      • C’est peut-être ça le secret de la longévité : bien se nourrir et se faire plaisir 🙂

    • En principe, les jeunes mammifères perdent la capacité de digérer le lactose une fois qu’ils sont sevrés. Mais apparemment, certains humains, par le passé, se sont trouvés aptes à déroger à la règle et y ont trouvé un avantage évolutif qu’ils ont transmis à leur descendance. Curieux que votre amie n’aie pas remarqué que bien des gens consomment du lait sans inconvénient.

      • Vous avez parfaitement raison dans la mesure où je bois du lait tous les jours.
        Je fais semblant d’ignorer ce genre de stupidités scientifiques avec cette belle femme intelligente dans la mesure où elle est d’une beauté impressionnante et qu’elle est autant intéressante à la verticale et qu’à l’horizontale. Je pense être identique de son point de vue. Intellectuellement elle est très intéressante mais probablement trop pragmatique pour moi, car pas assez imaginative, mais cela sert à gérer sa cellule familiale de façon millimétrique. Intellectuellement toujours, à l’inverse, elle ne comprend pas pourquoi je cherche à comprendre le pourquoi du comment de façon totalement abstraite. Tout en gérant cette contradiction permanente, nous nous avouons avoir la faiblesse de faire passer souvent avant nous la science après le plaisir. Mais ni elle ni moi ne lâchons rien par rapport à nos convictions profondes. Cela s’appelle je crois en biologie la symbiose, qu’elle soit momentanée ou sur le long terme. On est probablement tous issus de cette attraction et en même temps de cette répulsion entre le sexe féminin et masculin. Les deux s’attirent et se repoussent pour d’excellentes raisons, qui sont les moteurs conjoints de notre existence et de notre pérennité.
        La dissymétrie crée le champ de forces qui fait avancer les choses en physique.
        Peut-être que sur le plan sociologique en est-il de même, et que les gens qui ne sont pas d’accord entre eux, créent les conditions pour avancer plus loin, à condition de ne pas se taper bêtement dessus. D’où l’intérêt du débat honnête et sincère, préalable à la discussion philosophique chère aux Grecs de l’antiquité.
        Cela peut utilement s’appliquer aux gilets jaunes et aux forces de l’ordre françaises, manipulées en ce moment par leur hiérarchie 🙂

  5. Le SII frappe beaucoup de personnes (3 membres de ma famille sont touchés depuis une quinzaine d’années). Le seul moyen qu’ils ont trouvés pour s’en sortir (c’est vraiment douloureux, on l’oublie parfois) c’est de diminuer leur consommation en gluten et lait de vache, ce qui est désormais recommandé par les gastro-entérologues du CHU de Bordeaux (enfin ils s’y mettent!). Il y a une regrettable part de snobisme dans cette course aux lait de n’importe quoi mais pas toujours…

      • SII=Syndrome de l’intestin irritable, qui ne serait pas lié au gluten, mais aux FODMAPS=glucides indigestibles (pour le malade) qui irriteraient l’intestin lors de leur dégradation par la flore bactérienne. Je reste au conditionnel: je n’ai pas le lien vers l’étude, et celle-ci va devoir attendre d’être corroborée par d’autres de preuve suffisante pour faire foi.

      • Il y a des maladies inflammatoires ( maladie de Crohn….) mais il ne me semble pas que la consommation de lait ait été retenue comme piste possible

  6. On reproche souvent à la stérilisation UHT de ne pas préserver le goût du lait (voire, de lui en donner un mauvais). De ce point de vue, il y a mieux avec le lait micro-filtré. Avec l’inconvénient d’une durée de conservation bien plus brève (2 semaines, environ). Mais pour quelqu’un qui en boit 1l/jour, ce ne devrait pas etre un problème.

  7. Juste 2 ou 3 précisions :
    – une vache laitière c’est entre 120 et 140 litre d’eau par jour (tout l’année);
    – un litre de lait (de vache) c’est entre 4 et 4,5 litre d’eau;
    – la consommation d’eau par un arbre, en milieu méditerranéen, c’est au grand maximum 10mm/jour (soit 10 litres). Avec une surface foliaire de 5m²/m² (ce qui est beaucoup dans un verger. Les oliviers sont à 2), ça nous fait 50 litres par jour (soit en gros la consommation de 0,4 vache). Et ceci pour un arbre ENTIER et non pas une seule amande !
    – on ne consomme pas d’amandes californiennes en Europe, ou en tout cas extrêmement peu. Les bassins de production sont essentiellement l’Espagne et l’Italie.

    Et de façon générale, on s’en fout de ce que les gens consomment non ?
    Je ne vois pas le sens de toutes ces moqueries !

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