La mélissopalynologie au secours des abeilles avec l’aide des douanes !

J’ai découvert par hasard un métier cryptique qui a son importance pour la santé de chacun, au moins de ceux qui consomment du miel régulièrement, le mélissopalynologiste, qui ne s’écrit pas comme il se prononce mais presque, à un i grec près. Qu’est-ce c’est ? Un spécialiste des pollens qu’on est censé retrouver dans le miel et il n’y en pas beaucoup d’aussi expérimenté que le Docteur Vaughn Bryant de Texas A&M University, TAMU. Cet éminent mélissopalynologiste, donc, possède une collection de pas moins de 20000 échantillons différents de miels provenant du monde entier dont il estime la valeur à près de 5 millions de dollars mais il n’a pas l’intention de la vendre car c’est son outil de travail. Avec un microscope et une banque de données disponible publiquement pour au moins les palynologistes, les spécialistes du pollen, il peut reconnaître un grain de cette semence sexuelle mâle des plantes à fleurs parmi 350000 autres grains car tous les pollens sont différents.

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On imagine que ce monsieur ne doit pas s’ennuyer quand il recherche dans un échantillon de miel les grains de pollens qu’on peut y retrouver. Avec un logiciel adéquat les grains, une fois photographiés, sont entrés dans la banque de données et un peu comme pour mettre un nom sur une empreinte digitale l’ordinateur identifie presque instantanément le grain en cours d’étude. C’est presque aussi simple que ça mais Vaughn Bryant ne s’en contente pas car il a constaté que la plupart des miels, plus de 75 %, sont tellement soigneusement filtrés afin qu’on ne puisse plus trouver la moindre trace de pollen que ça lui a paru un peu louche et même plutôt carrément louche quand il a trouvé dans des boutiques « bio » du miel à 75 dollars la livre d’origine garantie alors qu’il n’y a plus trace de pollen. De quoi se révolter !

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En effet, le moindre grain de pollen permet de remonter la filière jusqu’à l’origine, c’est-à-dire à la région du pays dont il est originaire et sans pollen tous les coups sont permis pour les contrefaçons vendues hors de prix. Aux USA, le business du miel est aux mains de quelques grossistes qui ne sont pas trop regardant quant à la qualité du produit qu’il commercialisent, en d’autres termes ils ignorent le plus souvent l’origine de leur miel et pour peu que leurs fournisseurs consentent des prix cassés comme la Chine le fait car ce pays est le premier producteur du monde de miel, prix cassé est synonyme de « qualité cassée », suivez mon regard.

Pas vraiment satisfait des obscures manipulations sur la qualité du miel cet universitaire a alerté la FDA (Food and Drug Administration) et la CBP (Custom and Border Protection), l’équivalent de nos douaniers, pour tenter de mettre fin à cette pratique qui ouvre la porte à toutes sortes de fraudes. Les producteurs de miel arguent du fait que la filtration éliminant le pollen du miel empêche celui-ci de cristalliser car du miel cristallisé se vend moins cher que le miel liquide. Pipeau ! D’abord la cristallisation spontanée du miel dépend du rapport entre glucose et fructose et aussi de la teneur en eau et en dextrines et rien ne dit que le pollen présent dans le miel accélère ce processus. C’est surtout pour mieux écouler sur le marché du miel chinois surtaxé qui a transité par un autre pays pour obtenir le permis d’importation sur le sol américain à un prix suffisamment élevé pour ne pas mettre en péril l’apiculture du pays car quelques grains de pollens dans le miel permettraient sans aucune marge d’erreur d’identifier sa provenance. Les douaniers sont aussi payés pour ce type de travail, comme en France d’ailleurs, n’en déplaise à ceux qui n’aiment pas les douaniers. Ce biologiste a tellement mis la pression sur la FDA qu’elle a fini par songer à établir des règles pour le traitement du miel permettant une identification de ce dernier grâce aux grains de pollen et faire voter prochainement une loi par le Sénat américain. Mais cette démarche est aussi très importante pour protéger la rentabilité des apiculteurs étant entendu que les abeilles comptent parmi les insectes pollinisateurs les plus prisés des agriculteurs. En conclusion les douanes ont aussi leur rôle à jouer pour préserver l’avenir des abeilles, ce n’était pas évident.

Source : TAMU, illustration Wikipedia 

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