Terrifiant : la toxoplasmose favoriserait les maladies neurodégénératives …

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Le parasite Toxoplasma gondii est transmis par les félins dont le chat domestique à tous les animaux à sang chaud incluant l’homme. On estime qu’entre 30 à plus de 80 % des êtres humains sont porteurs de ce parasite. L’infestation se fait par les aliments mal lavés ou mal cuits en particulier pour les viandes provenant d’animaux eux-mêmes parasités dont le porc, le mouton et le boeuf. C’est la raison pour laquelle par exemple en France ou au Brésil plus de 80 % de la population est estimée être porteuse de ce parasite sans jamais avoir développé une toxoplasmose sérieuse.

S’il n’y avait pas eu il y a quelques jours la publication dans la revue PLOS Pathogens de résultats de travaux terrifiants concernant ce parasite n’importe qui continuerait à vivre avec « ses » toxoplasmes sans angoisses métaphysiques. Je pense pour ma part que le corps médical va devoir reconsidérer son approche des maladies neurodégénératives car le toxoplasme qui traverse allègrement la barrière sanguine cérébrale va coloniser des cellules nerveuses et cette espèce de cohabitation pas sympathique du tout conduit à la mort des neurones avec les conséquences qui s’en suivent …

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Les neurones communiquent entre eux majoritairement grâce au glutamate, le principal neurotransmetteur cérébral. Quand le glutamate a « allumé » un neurone, par exemple au niveau d’une liaison synaptique, il ne faut pas que ce glutamate s’accumule à l’extérieur des neurones car ceux-ci finiraient pas être endommagés, ne plus pouvoir communiquer entre eux et finir par mourir. Les astrocytes qui jouxtent tous les neurones et participent aux échanges métaboliques entre le sang et ces derniers ont aussi pour mission essentielle le recyclage de ce glutamate extra-neuronal qui est pompé très activement pour être immédiatement transformé en glutamine. Cette glutamine retourne dans les neurones et ces derniers produiront alors du glutamate à la demande à l’aide de l’intervention d’un enzyme dédié à cette fonction. Ce pompage du glutamate est effectué par un transporteur spécifique appelé GLT-1. Il faut préciser que les neurones du cerveau synthétisent leur propre glutamate afin justement de permettre ce recyclage crucial de celui libéré au cours d’un signal synaptique et qu’il n’y a que peu d’apport extérieur par le sang.

Que vient faire le toxoplasme dans ce processus qui est, dans une situation normale, extrêmement bien régulé ? C’est ce qui vient d’être découvert indirectement par le Docteur Emma Wilson à l’école de médecine de l’Université de Californie à Riverside qui travaille depuis plus de 15 ans sur la toxoplasmose. Les astrocytes parasités par le toxoplasme n’arrivent plus à correctement « pomper » le glutamate car l’expression du gène codant pour le GLT-1 est altéré. Et ceci a été montré chez des souris infestée par le toxoplasme qui présentaient manifestement des troubles comportementaux et des taux de glutamate extra-cellulaire anormalement élevés. En les traitant avec un antibiotique du nom de ceftriaxone connu pour améliorer chez des souris modèles de la sclérose latérale amyotrophique leur conditions pathologiques, le Docteur Wilson a remarqué une nette amélioration de l’état physiologique de ces souris infestées par le toxoplasme : le transporteur GLT-1 était de nouveau correctement produit par les astrocytes et le taux de glutamate extra-neuronal redevenait normal.

L’explication formulée par le Docteur Wilson est que les toxoplasmes se trouvant « à vie » dans les cellules cérébrales puisqu’ils ne peuvent être atteints par le système immunitaire ont un effet sur la régulation de l’expression du transporteur GLT-1. Reste à découvrir cet effet et comment le contrecarrer.

Toujours est-il que c’est la première fois qu’une preuve biochimique incontestable est apportée pour lier la présence de toxoplasmes dans le cerveau et les maladies neurodégénératives, Parkinson ou Alzheimer, ainsi que des troubles psychotiques tels que manies, schizophrénie ou encore des troubles du comportement inexpliqués qui ont tous un point commun : une accumulation de glutamate extra-cellulaire dans le cerveau.

Sachant que les quatre cinquième de la population française et la moitié de la population nord-américaine sont porteurs de toxoplasmes c’est tout simplement terrifiant !

Source en accès libre : http://dégorgeoir/10.1371/journalisation.1005643

Illustrations Wikipedia et UC Riverside Today ( https://ucrtoday.ucr.edu37754 )

Il fait bon vivre dans le désert …

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C’est à une étude objective et sur la durée des représentants du quatrième âge d’un type particulier, on va le voir, que se sont livré par hasard des médecins de l’Université de Californie à Irvine. Les sujets de l’étude sont des habitants d’une de ces villes artificielles perdues au milieu du désert californien au delà de la Sierra, la chaine de montagnes côtière, où poussent les ocotillos (Fouquieria splendens pour les passionnés de botanique), les cactus cierge et les yuccas qu’on appelle aussi les Josua trees. Des milliers de retraités fortunés se sont volontairement parqué dans ces villes artificielles surveillées par des gardiens lourdement armés où on trouve tous les services permettant une fin de vie agréable, soleil, piscines, greens de putting, parcours de fitness, magasins, internet et télévision cablée, antenne médicale sophistiquée et j’en passe. Par exemple, à « Leisure World », pardon, Laguna Woods, il y a 14000 résidents qui ont tous, ou presque, atteint l’âge canonique de 90 ans. Et comme par un fait du hasard ces fanatiques de la forme physique s’étaient tous contraint à une sorte de pensum consistant à noter scrupuleusement chaque jour depuis les années 1980 tout ce qui constituait leur vie quotidienne, depuis le nombre de minutes passées à marcher, nager, putter ou jouer au croquet, quelle était la composition détaillée de leurs repas, le nombre de pilules de vitamines qu’ils se jetaient au fond de la gorge, le nombre de verres de Martini ou de Bourbon qu’ils avalaient avec plaisir, avec ou sans glace, chaque jour, et ils devaient enfin décrire leurs petits bobos avec leur dossier médical toujours sous leur coude, histoire d’occuper leurs loisirs.

Ces médecins, sous la direction du Docteur Claudia Kawas ont pu avoir accès à ce trésor de données et avec une aide financière du National Institute of Health ont épluché et analysé toutes ces données qui ont fait l’objet d’une publication scientifique et d’une émission de télévision. Le projet a été nommé « 90+ » et la première mission a été de retrouver tous les participants à cette sorte de jeu qui avaient plus de 90 ans. Ils en ont trouvé 1600, la plupart d’entre eux vivant encore à Laguna Woods. Ils sont aujourd’hui tous examinés deux fois par an et leurs conditions physiques et cognitives sont suivies en détail. Il ressort de cette étude très particulière qu’un exercice physique régulier même limité à 15 minutes par jour est très bénéfique pour la longévité. Rester intellectuellement actif est également favorable comme par exemple jouer aux cartes, lire ou participer à des conversations sur la critique d’un film diffusé la veille à la télévision. Tous ces détails ont été soigneusement notés depuis 1981 et le bénéfice sur la santé et la longévité a donc pu être vérifié. Par contre devenir obèse ou ne se livrer à aucune activité physique même modérée est franchement mauvais : la plupart des personnes qui avaient bien précisé dans leurs notes supposées aussi objectives que possible qu’ils ne pratiquaient aucun sport ni aucune activité sociale avaient disparu prématurément, c’est-à-dire avant d’avoir atteint l’âge presque canonique de 90 ans.

Pour l’indice de masse corporelle, Kawas a découvert qu’il était préférable pour atteindre et dépasser les 90 ans d’avoir un peu d’embonpoint, mais pas trop tout de même. Prendre des vitamines chaque jour s’est révélé tout simplement inutile pour atteindre cet âge respectable et rester en bonne forme. Encore une idée reçue battue en brèche, une alimentation équilibrée est préférable. L’alcool (à boire avec modération) est bénéfique pour la longévité, deux ou trois verres de vin ou d’autres boissons alcoolisées diminue de 15 % les risques de mort avant cet âge fétiche de 90 ans et boire du vin rouge supposé apporter du resvératrol à l’organisme et donc protéger les télomères ou boire du vin blanc ou un bourbon, c’est du pareil au même !

Le dernier volet de cette étude est encore plus surprenant, les cerveaux d’un grand nombre de ces pensionnaires d’un type particulier ont ordonné une autopsie après leur mort afin que les résultats soient dûment joints à leurs archives personnelles auxquelles ont eu accès le Docteur Kawas et son équipe. Les rapports de cytologie des cerveaux ont montré que plus de 40 % des personnes décédées et pour lesquelles les médecins avaient diagnostiqué une maladie d’Alzheimer ne présentaient aucun signe de cette maladie facilement reconnaissable sur des coupes de tissu cérébral mais qu’au contraire ils souffraient de micro-AVC multiples. Et pour conclure cette étude le Docteur Kawas tente de rechercher maintenant la cause de ces AVC dans l’espoir de trouver un moyen de prévention. Comme quoi les idées reçues sont souvent complètement fausses …

Source : CBS, illustration Wikipedia (ocotillo en fleur)

Billet publié initialement sur Mauvaisenouvelle.fr

Un espoir dans le traitement des cancers, enfin !!!

Plus de la moitié des cancers décrits et étudiés au niveau, je dirai moléculaire, puisque c’est ainsi qu’on finira par découvrir le mécanisme des cancers et peut-être un traitement universel, sont reliés à une mutation du gène exprimant une protéine appellée P53. 459px-P53

(en jaune la molécule linéaire d’ADN en double hélice, crédit Wikipedia)

Dans le cas du cancer du col de l’utérus, très commun chez la femme, il est reconnu que c’est un virus du genre papilloma qui est impliqué, et ce virus a l’incroyable faculté d’inactiver la protéine P53 déclenchant alors un cancer. Pour le cancer du poumon des fumeurs, dont je fais partie, le gène de la protéine P53 serait muté par les goudrons et autres particules fines contenues dans la fumée de cigarette (comme les gaz d’échappement des moteurs diésel mal réglés). Mais qu’est-ce que cette protéine assez grosse puisqu’elle pèse 53000 daltons, l’unité de mesure du poids d’une molécule chimique. C’est un facteur de régulation de l’expression des gènes contenus dans l’ADN et la P53 intervient quand l’ADN a été endommagé par exemple par les rayons ultra-violets pour stopper une expression anarchique des gènes, ou encore quand la cellule vieillit et se met aussi à faire n’importe quoi. Un genre de protection interne sophistiquée qui protège les cellules et donc l’ensemble de l’organisme. Un dernier rôle de cette protéine est d’indiquer donc à la cellule qu’elle doit mourir plutôt que de se multiplier anarchiquement.

Or dans la moitié des cancers étudiés finement au niveau moléculaire, cette protéine est mutée et n’agit plus correctement, d’où l’apparition de cancers.

Comme c’est un gros truc assez compliqué, pour tenter d’étudier son fonctionnement et éventuellement dans un but ultime d’agir par voie téhrapeutique sur la protéine modifiée, une équipe pluridisciplinaire de l’université de Californie à Irvine composée de cristallographes, de chimistes, de biologistes et de modélisateurs sur ordinateurs, ce genre d’extraterrestres qui jouent avec la forme des objets sur leur ordinateur pour par exemple faire des films d’animation en 3D, ont finalement mis au point un programme pour faire une screening haute fréquence de milliers de molécules chimiques simples et existantes non pas avec un robot comme cela est utilisé couramment dans les laboratoires de recherche des grandes firmes pharmaceutiques, mais avec un ordinateur. L’idée était de trouver un composé chimique qui soit capable d’interagir avec la P53 mutante pour rétablir sa fonction de régulation. Pour le moment une vingtaine de molécules variées ont été repérées et vont faire l’objet d’études complémentaires. Une molécule naturelle isolée des lichens aurait pu faire l’affaire mais malheureusement elle est difficilement synthétisable, il s’agit de l’acide stictique, un drôle de truc avec plein de cycles. ncomms2361-f4

L’acide stictique rétablissant la structure active de P53, crédit http://www.nature.com

Et pourtant cette molécule, une fois ajoutée à des cellules tumorales en culture, stoppe la multiplication anarchique de ces dernières, la preuve que la protéine P53, altérée dans ces cellules, a recouvré sa capacité de régulation de l’expression des gènes, car l’étude a montré clairement que l’acide stictique se fixait bien sur la protéine P53. Il s’agit d’une immense avancée dans l’espoir d’un traitement quasi universel des cancers, au moins ceux occasionnés par une mutation de cette protéine.

Finalement la recherche pluridisciplinaire fait encore la preuve de son efficacité dans un domaine aussi crucial que la recherche sur le cancer …

Sources : Université d’Irvine et http://www.nature.com

Crédits photos : Wikipedia et http://www.nature.com