Nouvelles du Japon : le pouvoir des traditions et autres réflexions

Le Japon n’est définitivement pas un pays comme les autres. Les gestes quotidiens sont imprégnés d’une solide tradition dont l’épicentre est le respect de tout être vivant et de toute chose. Le respect des personnes sous-entend le respect de la nature, des lieux où l’on vit, de la moindre fleur ou petit arbuste. On pourra dire que les horticulteurs passant leur vie entière à tailler un arbre pour en faire une véritable œuvre d’art ou reprendre l’art de leur maître et garder cet arbre nain en vie pendant plusieurs siècles illustre parfaitement cette véritable symbiose entre les Japonais et la nature. Certes dans une ville comme Tokyo la nature a souvent perdu ses droits. Néanmoins j’observais ce lundi matin en marchant tranquillement le long d’une grande rue passante du quartier résidentiel où habite mon fils quelques personnes, un lundi matin, s’affairant au pied de quelques arbres bordant cette grande avenue afin de nettoyer, amender et rajouter quelque fleur au pied de chacun de ces arbres alors qu’en France ou en Espagne ce même genre d’espace est un réceptacle pour les excréments des chiens ou des filtres de cigarettes. Rien de tout cela le long de cette grande artère d’orientation est-ouest empruntée par de gros camions autorisés à utiliser du carburant diesel, des autobus et toutes sortes de petites camionnettes de livraison.

Le sens de l’esthétique et la célébration de la nature se retrouvent dans ces petits détails qui paraissent inutiles mais enjolivent la vie. Dans les quartiers résidentiels au dédale inattendu de petites ruelles devant chaque maison il y a des fleurs jalousement entretenues et souvent les résidents taillent ici ou là un arbre pour en faire un « bonzaï », 盆栽, non pas comme les professionnels mais pour rappeler ces mêmes créatures végétales ornant les sanctuaires shinto, le haut lieu de la tradition japonaise. J’en discutais avec un ami de mon fils hier dimanche lors du diner d’anniversaire de mon petit-fils et je lui rappelais, me hasardant peut-être en territoire inconnu, que les traditions du peuple japonais sauveraient ce peuple de la culture nord-américaine dite « woke » qui devient la norme en occident. Et la discussion dériva vers la Corée. Japon et Corée, deux frères ennemis pourtant aux traditions si semblables, issues d’un confucianisme adapté à chacun de ces pays. Nous en sommes arrivés à l’usage de la fourchette en Asie (je suis très maladroit avec les baguettes pour déguster les plats servis sur la table) assurant que le seul pays d’Asie où l’usage de la fourchette est répandu est la Thaïlande. Les baguettes font partie de la tradition immuable car dès l’âge de deux ans les enfants se familiarisent avec ces instruments.

On pourrait citer encore à l’infini des traits du comportement des Japonais entrant dans le cadre de la tradition immuable. Cela fera l’objet d’autres billets à venir …