Retour sur la mortalité des saumons dans les rivières de l’Etat de Washington

L’Etat de Washington c’est loin de l’Europe et pourtant les pneus des voitures qui circulent dans les villes, sur les autoroutes et dans les petits villages contiennent les mêmes produits additifs pour en améliorer les performances. Le 6PPD (N-(1,3-dimethylbutyl)-N’-phenyl-p-phenylenediamine) est un antioxydant qui protège les pneus contre une dégradation prématurée par des agents oxydants tels que l’oxygène et l’ozone. L’ozone se forme par réaction entre les oxydes d’azote et les rayons ultra-violets solaires. Les oxydes d’azote sont produits dans les agglomérations par les moteurs à combustion interne des automobiles et le peu de rayons UV suffit pour que les taux d’ozone augmentent parfois dangereusement comme en particulier les grandes villes. Or l’ozone est un des plus puisants oxydants existants et les pneus se dégradent rapidement en raison de cette oxydation. D’où l’additif anti-oxydant qu’est le 6PPD. Comme indiqué dans le schéma ci-dessous le 6PPD, après avoir piégé deux molécules d’ozone, se retrouve sous forme de 6PPD-quinone dans les poussières d’usure des pneus que tout un chacun respire dans une ville ou près d’une autoroute très fréquentée.

Selon ce dont je me souviens du métabolisme énergétique de la cellule vivante, la 6PPD-quinone est probablement un puissant inhibiteur de la chaine respiratoires mitochondriale et peut également interférer avec l’échange gazeux oxygène/CO2 au niveau des poumons. Dans le cas des poissons il s’agit des branchies beaucoup plus sensibles aux même inhibiteurs. Dans l’article relatif à cette étude sur les saumons coho que m’a aimablement communiqué le Docteur Kolodziej il n’est pas fait mention du mécanisme d’action de la 6PPD-quinone mais il est certain, à mon humble avis, que ce produit soit également toxique pour les êtres humains.

Ah ! Chères automobiles ! Pendant des dizaines d’années on a respiré des poussières d’amiante provenant de l’usure des garnitures de freins et des mécanismes d’embrayage. Personne ne s’en est vraiment préoccupé. Pendant des années on a respiré du plomb-tétraéthyle, un additif anti-cliquetis qui a fini par être interdit et remplacé par des dérivés oxygénés et maintenant par de l’éthanol « bio », c’est mieux. Je ne suis pas un opposant forcené aux véhicules automobiles mais, puisque je dissertais au sujet du principe de précaution il y a peu, jamais les ingénieurs et chimistes qui ont travaillé pour améliorer la durée de vie des pneus auraient été capables de découvrir que cette 6PPD-quinone tuait massivement les saumons des rivières de l’Etat de Washington près de Seattle, jamais les fabricants de garniture de freins ou de disques d’embrayage auraient imaginé il y a 50 ans que l’amiante provoquait des cancers mortels de la plèvre. Faut-il supprimer les voitures pour autant ? Non ! Donc le principe de précaution est toujours inopérant et il en sera ainsi encore longtemps.

Je citerai un dernier exemple rejoignant le SARS-CoV-2 : puisque toutes les mesures de restriction susceptibles de freiner la propagation de ce virus mises en place en vertu du principe de précaution sont inopérantes, on se trouve encore une fois devant la totale stupidité de ce principe …

Liens: https://jacqueshenry.wordpress.com/2020/12/13/du-saumon-a-loseille-aux-pneus-des-voitures/

Les « poux » du saumon : de quoi se gratter la tête

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Lorsque j’étais enfant, comme tous les gamins de l’école, j’avais attrapé des poux et plus d’un demi-siècle plus tard la situation n’a guère évolué. Pour se débarrasser de ces sales bêtes on était traité par une poudre blanche répondant au doux nom de « marie-rose » si ma mémoire est exacte. Il s’agissait de DDT à forte dose. Je n’ai jamais entendu parler à cette époque d’indispositions provoquées par ce DDT qui fut ensuite banni sous la pression totalement inconsidérée des écologistes. Mais ce n’est pas l’objet de ce présent billet. Les saumons d’élevage souffrent aussi de poux, les poux de mer, Lepeophtheirus salmonis, de la famille des copépodes, petits crustacés parasites qui déciment les saumons à tel point que cette « peste » devient préoccupante. La multiplication des poux de mer est favorisée par la forte densité de poissons dans ces fermes marines et il n’existe aucun moyen efficace pour les éradiquer. Impossible d’utiliser du fipronil comme pour les poulets d’élevage d’autant plus que les poissons sont sensibles à ce produit.

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Toutes sortes de techniques ont été abordées pour éliminer ces parasites mais il y a de la « casse ». Par exemple l’utilisation d’eau oxygénée dans une sorte de tunnel permettant de communiquer entre deux bassins et en poussant les poissons manuellement pour qu’ils soient exposés à l’eau oxygénée quelques minutes est efficace mais elle tue aussi beaucoup de saumons. L’autre technique est d’introduire des petits poissons nettoyeurs qui se nourrissent de ces copépodes. Il faut élever ces poissons dans des viviers spéciaux puis les déverser dans les bassins mais malheureusement les saumons qui sont particulièrement voraces s’en régalent rapidement avant que ceux-ci se fixent à l’aide de leurs écailles ventrales qui font office de ventouses sur le corps du saumon pour le nettoyer des copépodes. Il s’agit pourtant de la solution privilégiée car elle ne nécessite pas de produits chimiques mais la demande en poissons nettoyeurs (Eumicrotremus phrynoides) est énorme et la société écossaise Marine Harvest a pourtant décidé d’installer une ferme spéciale pour élever ces petits poissons et en produire 50 millions à l’horizon 2020. Mais il ne faut pas non plus que ces poissons introduisent des maladies susceptibles de ravager les saumons, un véritable cercle vicieux, à s’arracher les cheveux !

D’autres approches sont envisagées comme le développement de vaccins anti-tiques comme cela est déja appliqué dans les élevages de bovins mais comment vacciner un saumon ? Une firme norvégienne envisage d’essayer les ultra-sons. Les premiers essais semblent concluants mais les poux ne meurent pas après avoir été détachés des saumons par les ultra-sons et il faut alors imaginer un moyen de les éliminer des bassins. Les enjeux économiques sont tels qu’il est urgent de trouver une solution pour que la production de saumons d’élevage satisfasse la demande. Dans le cas contraire le saumon deviendra une denrée rare et coûteuse.

Source et illustrations (ferme marine en Écosse) : The Conversation

Les orques : de fins dégustateurs ?

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C’est en utilisant des chiens « renifleurs » que des biologistes sont arrivés à retrouver les excréments des orques flottant à la surface des eaux baignant l’archipel des îles San Juan situées dans le Détroit de Juan de Fuca tout près de Vancouver.

Pourquoi s’intéresser aux fientes des orques, tout simplement pour savoir de quoi ces mammifères marins, familiers des touristes qui fréquentent les parcs d’attraction marins, avec leur drôle de peau noire et blanche, se nourrissent en pleine mer. Certes l’étude parue dans le journal scientifique PlosOne et réalisée dans cet endroit particulier n’est pas représentative des habitudes alimentaires des orques du monde entier ( DOI : 10.1371/journal.pone.0144956 ) mais elle a le mérite de détailler si l’on peut dire ce que préfère l’orque au cours des saisons.

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Dans le nord-est de l’Océan Pacifique coexistent deux populations d’orques, ceux qui se nourrissent de mammifères marins, otaries et autres marsouins, et ceux qui se nourrissent de poissons. On ne sait pas trop s’ils arrivent à se rencontrer et à se lier d’amitié. Les mangeurs de poissons résident plus au sud que ceux qui préfèrent les phoques, surtout les bébés phoques, ce qui ferait bondir d’horreur BB (Brigitte Bardot). Jusqu’à ce que cette récente étude le précise on ne savait pas trop de quoi se nourrissaient ces orques « résidents » car ils restent dans les parages de cet archipel très recherché par les pêcheurs de saumon, très probablement de ce poisson, mais encore fallait-il le prouver.

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En collectant les excréments des orques il a fallu réaliser une analyse détaillée des fragments d’acide ribonucléique encore présents afin d’identifier la composition du menu de ces cétacés plutôt voraces. À l’issue de ces travaux il est apparu que les orques évoluant dans cette région se nourrissent exclusivement de saumons avec une très nette prédilection pour le saumon Chinook (Oncorhynchus tshawytscha) qui n’est pourtant pas l’espèce la plus abondante. L’analyse des acides nucléiques a aussi permis de préciser une petite variation du menu des orques au cours de l’été. Les orques ne dédaignent pas les saumons coho (O. kisutsh) en fin d’été lorsque ceux-ci s’apprêtent à remonter les rivières pour frayer. Au milieu de l’été l’espèce la plus abondante est le saumon sockeye dit aussi saumon rouge (O. nerka) qui ne se trouve que dans l’Océan Pacifique Nord-Est. Malgré la surabondance du sockeye les orques préfèrent néanmoins et toujours le chinook. Seraient-ils de fines fourchettes ?

Note : Le saumon coho est considéré comme le nec plus ultra des saumons. Pourtant les orques semblent partager l’avis des consommateurs de saumon que nous sommes puisque le saumon élevé en captivité (2,5 millions de tonnes chaque année) dans les fermes marines est essentiellement du saumon chinook !

Source : PlosOne, illustrations PlosOne et Wikipedia.

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Et dans l’ordre le chinook, le sockeye et le coho. Il faut être un pêcheur professionnel pour les différencier …