Quand un article scientifique décrit une approche pouvant aboutir à un accroissement de la longévité, les médias dans leur ensemble crient bravo. Un titre accrocheur du genre : « L’espérance de vie des souris augmentée de 35 % : pourquoi pas les humains ? » ou encore celui que titrait ce matin les Echos en ligne (capture d’écran ci-dessus) attire le lecteur, certes, mais il ne s’agit que de travaux très fondamentaux effectués de plus chez la souris qui est loin d’être un modèle satisfaisant pour l’homme. Les travaux effectués à la Mayo Clinic sous la direction du Docteur Jan Van Deursen et publiés dans la revue Nature concernent des souris transgéniques sensibles à une drogue expérimentale (AP20187) qui ont été modifiées génétiquement afin d’observer une régulation par cette drogue de la mort des cellules sénescentes et de leur élimination.
Les vieilles cellules accumulent des erreurs génétiques et leur fonctionnalité devient aléatoire pouvant aboutir à des cellules tumorales. Or l’organisme est équipé pour éliminer ces cellules défectueuses. Le processus d’élimination est dépendant d’un certain nombre de facteurs qu’il a fallu différencier à l’aide de manipulations génétiques appropriées. L’un de ces facteurs, en réalité un promoteur (Ink4a), est activé dans les cellules sénescentes et la drogue expérimentale utilisée dans cette étude interfère avec la fonction de ce promoteur et accélère l’élimination par l’organisme de ces cellules défectueuses proches de la mort (apoptose).
La mort des cellules pose en effet problème car si ces dernières ne sont pas promptement éliminées alors des phénomènes inflammatoires apparaissent et ces derniers accélèrent le vieillissement généralisé de l’organisme.
Le mécanisme de régulation de l’élimination des cellules sénescentes est donc complexe et cette étude n’a abordé qu’un point particulier de ce processus. Certes, les effets de la drogue AP20187 sont spectaculaires sur tous les tissus – excepté le foie et le colon – mais de là à en déduire dès aujourd’hui un espoir de philtre de jeunesse éternelle est une vue de l’esprit. Pour autant cette étude a pour avantage de révéler un des aspects du combat de l’organisme pour éliminer de manière continue les vieilles cellules devenues inutiles et potentiellement dangereuses. Clamer que tous les espoirs sont permis est sinon un abus de langage du moins un mensonge journalistique grossier …
Source et illustration : Nature DOI : 10.1038/nature16932
Note : Les souris non traitées avec la drogue expérimentale (AP) deux fois par semaine dès l’age de 10 mois présentent à l’age de 22 mois des signes de vieillissement évidents. Il faut rappeler ici que les souris vivent rarement au delà de 30 mois.