Nouvelles des Îles Canaries

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L’observatoire international TMT (téléscope de 30 mètres de diamètre) n’en finit pas d’avoir des déboires avec les habitants d’Hawaii qui ne veulent pas entendre parler de la construction du téléscope au sommet du Mauna Kea un volcan éteint proche du Mauna Loa où se trouve, entre autres équipements, l’observatoire bien connu pour ses mesures en temps réel et en continu du CO2 atmosphérique. Cette montagne est en effet sacrée pour les habitants natifs de cet archipel. Les directeurs du projet TMT se sont donc, en cas de refus définitif entériné par la Cour de Justice d’Honolulu, rabattu sur l’observatoire du Roque de los Muchachos sur l’île de La Palma dans la province de Tenerife.

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Malgré une différence d’altitude de près de 2000 mètres qui compliquera dans le futur les observations dans les bandes spectrales de l’infrarouge le site de La Palma comporte déjà toutes les infrastructures nécessaires pour le futur fonctionnement du TMT. Il existe déjà sur ce site spectaculaire situé à une altitude de 2396 mètres une douzaine de télescopes dont en particulier une surprenante installation comportant deux télescopes de 17 mètres de diamètre spécialisés dans la détection des rayons gamma d’origine cosmique (photo). Un site à visiter quand on séjourne sur l’île de la Palma, à mon goût la plus belle île de tout l’Archipel des Canaries.

Pesticides, lait, cigarette et Parkinson

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En 1962 l’activiste écologiste Rachel Carson accusa l’heptachlore de menacer la planète dans son livre Le Printemps Silencieux. Elle prétendait dans cet ouvrage que cet insecticide persistait durant des années dans les sols et l’eau et se retrouvait dans les aliments. Ces affirmations sont dénuées de preuves puisque la demi-vie de ce produit dans l’eau est de 25 jours, dans l’air de 27 jours et dans les sols de 80 jours environ. L’argument de Rachel Carson était que ce produit persistait donc dans les sols trop longtemps à son goût et qu’il devait se retrouver d’une manière ou d’une autre dans notre organisme. Par ailleurs d’autres études montrèrent que ce produit était toxique pour les neurones des rats en particulier ceux de la substantia nigra du cerveau. Bref, à la suite de la parution de ce livre qui fit grand bruit, l’usage de cet insecticide fut progressivement réglementé et n’est aujourd’hui utilisé que pour exterminer les fourmis rouges car elles présentent un degré de dangerosité avéré en injectant à l’aide d’un dard un alcaloïde irritant appelé solenopsine. Comme l’un des résidus du métabolisme de l’heptachlore par les bactéries du sol est l’heptachlore époxyde, la présence de ce produit fut détectée dans le lait au début des années 80 dans l’archipel d’Hawaii, parfois à des niveaux inacceptables car l’heptachlore était abondamment utilisé dans les champs d’ananas.

Une récente étude parue dans la Revue Neurology vient un tant soit peu bousculer les idées reçues en ce qui concerne ce pesticide. Cette étude a concerné plus de 8000 Japonais-Américains durant plus de 30 ans. Au début de l’étude au milieu des années 80, leur âge moyen était de 54 ans, ils furent autopsiés après leur mort et des échantillons de 449 cerveaux conservés. Les habitudes alimentaires et d’autres informations concernant chaque sujet furent également sauvegardées dans le cadre d’une étude sur le vieillissement en partenariat entre les Universités d’Honolulu et de Chiga, à Otsu au Japon (HAAS pour Honolulu-Asia Aging Study). L’un des aspects de l’étude concernait l’abondance des neurones de la substantia nigra, une région du cerveau préférentiellement atteinte lorsque la maladie de Parkinson se développe. Or comme il faut parfois plusieurs dizaines d’années pour que les symptômes de cette maladie apparaissent, cette étude présentait donc un grand intérêt pour la compréhension de l’éventuel effet de l’heptachlore qui se retrouvait dans le lait sur les sujets étudiés qui furent exposés à cet insecticide avant que son usage ne soit restreint.

On sait par exemple que la cigarette diminue de 50 % les risques d’apparition de la maladie de Parkinson et que l’exposition à certains pesticides comme la roténone ou le paraquat double ce risque. Or comme la plupart des sujets étudiés consommaient du lait alors contaminé avec de l’heptachlore, l’étude montra que la présence du résidu heptachlore époxyde dans le cerveau était corrélé avec la dégénérescence des neurones de la substantia nigra, jusqu’à une chute de près de 40 % de la densité neuronales, autant chez les sujets buveurs de lait ayant souffert de la maladie de Parkinson que chez ceux qui en furent indemnes et également buveurs de lait, plus de deux verres par jour. Là où l’étude révéla une surprise c’est que chez les buveurs de lait également fumeurs il ne fut pas possible de trouver des taux comparables d’heptachlore époxyde dans leurs cerveaux avec par ailleurs une incidence de la maladie de Parkinson significativement plus faible chez ces même sujets.

Même si cette étude épidémiologique qui concerna donc plus de 8000 personnes depuis 1980 et pour la plupart décédés aujourd’hui n’apporte pas de preuves formelles de ces interactions pesticide-cigarette, il apparaît cependant que de telles études sont irremplaçables pour préciser les mécanismes d’apparition de la maladie de Parkinson. L’effet « bénéfique » de la fumée de cigarette reste encore à expliquer.

Note : il est intéressant de rappeler que le paraquat et la roténone sont deux substances interférant avec la chaine respiratoire mitochondriale. L’un des mécanismes suspectés être à l’origine de la maladie de Parkinson est l’apparition de ce qu’on appelle des radicaux libres issus de phénomènes d’oxydation déréglés, pour faire bref. Or l’intégrité fonctionnelle des mitochondries joue un rôle essentiel dans la protection cellulaire contre les peroxydes et autres radicaux libres car l’un des rôles majeurs des mitochondries est de fournir à la cellule les armes de destruction des peroxydes et des radicaux libres issus de ces derniers. Quand on analyse un ensemble d’informations scientifiques et médicales on arrive à déceler une tendance, certes infime, mais néanmoins une direction vers laquelle je me suis orienté en m’administrant chaque jour une cuillère à soupe (environ dix grammes) de glycine que je commande à la pharmacie locale (qu’elle vend à un prix exorbitant) pour maintenir la machinerie énergétique des cellules constituant mon corps vieillissant dans un relatif état de fonctionnement satisfaisant pour préserver mon état de santé, et naturellement je continue à fumer, allez savoir …

Source : Neurology, DOI : 10.1212/WNL.0000000000002254

https://jacqueshenry.wordpress.com/2015/06/08/rester-jeune-tres-simple-gavez-vous-de-glycine-acide-amino-acetique/

OGMs (1), l’odeur du triomphe de la papaye transgénique

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Il y a une vingtaine d’années les producteurs de papaye d’Hawaï vivaient de graves incertitudes pour leur avenir car les papayers étaient décimés les uns après les autres par un virus pas seulement pathogène pour le papayer mais également dévastateur pour les cucurbitacées, melons, pastèques, cornichons et autres courges. Le virus est transmis par les pucerons et le seul moyen de protéger un verger de papayer est d’utiliser des quantités massives d’insecticides afin d’exterminer jusqu’au dernier puceron pour prévenir l’extension de ce virus. Lorsque l’on mange un quartier de papaye (ou éventuellement de melon) on est pratiquement certain, si la peau du fruit n’est pas uniformément jaune et présente des taches circulaires vertes (ringspot, d’où le nom anglais de ringspot virus) que le fruit et la plante sont infestés par le virus.

Inspiré par des travaux réalisés par la société Monsanto sur la résistance aux virus le Docteur Dennis Gonsalves de la Cornell University eut l’idée de faire exprimer par le papayer la protéine de l’enveloppe du virus dans le but de perturber sa multiplication après une infestation par un puceron. Ça se passait au milieu des années 1990 et Monsanto, qui n’était pas intéressé par cette technique car les retombées économiques attendues étaient négligeables, céda la licence de l’utilisation de ses constructions d’acides nucléiques utilisées au cours de la transgénèse à l’Université de Cornell à un groupement de fermiers hawaiiens. L’idée de Gonsalves se révéla immédiatement efficace sans modifier les propriétés organoleptiques des papayes, les papayers étaient devenus résistants au virus, ils avaient été en quelque sorte « vaccinés ». Les fermiers reçurent des semences transgéniques gratuitement et depuis lors les papayers d’Hawaii sont en bonne santé, il y a toujours le virus et des pucerons mais la plante est devenue résistante.

L’histoire ne s’est pas déroulée aussi simplement qu’on pourrait le croire car des activistes écologistes opposés aux plantes transgéniques commencèrent immédiatement leur travail de sape idéologique. Malgré le fait que depuis que l’archipel produit des papayes transgéniques personne ne s’est trouvé incommodé par la présence de la protéine du virus alors que la plante est toujours infestée mais sans symptômes par ce virus, les écologistes ont répandu le doute et la papaye transgénique faillit être interdite à Hawaii. L’un des arguments des écolos, puisque le monde scientifique et les régulateurs (FDA) avaient prouvé qu’il n’y avait aucun risque pour la santé des consommateurs, fut que ce gène pouvait être transmis à d’autres virus en créant alors un nouveau virus encore plus pathogène. Greenpeace organisa la destruction de plantations expérimentales de papayers organisées par l’Université d’Hawaii arguant qu’il s’agissait de « pollution génétique » et qu’aucune étude sérieuse n’avait été réalisée pour prouver l’innocuité de cette transformation génétique sur la santé humaine.

Tous les arguments, y compris les plus rocambolesques, furent utilisés pour terroriser la population. Un article paru en 2002 incriminait une similitude entre la protéine du virus exprimée par le papayer transgénique et un facteur qui augmentait la production d’une immunoglobuline E ce qui pouvait constituer un danger pour la santé ( http://www.biomedcentral.com/1472-6807/2/8 ). Sur les 280 amine-acides de la protéine virale seulement une séquence de 6 amino-acides consécutifs coïncidait avec l’allergène stimulant la fameuse immunoglobuline E qui se trouvait être une protéine sécrétée par l’oxyure, un parasite intestinal commun, c’est dire à quel point l’argument était tarabiscoté ! Il n’en fallut pas plus pour affirmer haut et fort que la papaye transgénique pouvait déclencher des réactions allergiques. La même méthodologie fut utilisée pour déterminer si la toxine Bt exprimée par le maïs ou le coton (à l’époque, c’est-à-dire en 2002) risquait d’être allergène. On trouva également des analogies de séquence entre la toxine Bt et pas moins de 50 protéines du maïs ! Ces analogies se retrouvaient sur des portions de séquences de 6 amino-acides. Mais au delà de séquences de 8 amino-acides consécutifs aucune analogie ne put être établie. Cet article concluait que ce type de recherche était fallacieux et qu’il ne pouvait en aucun cas alimenter la polémique sur d’éventuelles propriétés allergènes nouvelles après introduction d’un gène étranger dans une plante. Les conséquences structurales de ce type d’analogies ne présentaient aucune signification biologique susceptible d’être sérieusement retenue ( http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/12218366 ).

Ces activistes ont sciemment ignoré un article paru à peu près au même moment qui déniait tout effet allergène de la protéine du parasite intestinal démontant ainsi l’argumentation hautement fallacieuse développée à dessein pour discréditer la papaye transgénique ( http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC130290/ ).

Greenpeace n’en resta pas là et organisa une campagne de dénigrement, cette fois en Thaïlande, allant jusqu’à saccager en 2004 une plantation de papayers transgéniques en considérant qu’ils s’agissait d’une véritable « bombe à retardement ». Toutes ces actions spectaculaires et médiatisées, c’est là la spécificité de Greenpeace, n’avaient aucune justification scientifique rigoureuse. Les fermiers hawaiiens, qui entrevoyaient un espoir de survie avec le papayer transgénique, se trouvèrent confrontés à un nouvel ennemi : la mouvance écologiste !

Entre 2006 et 2010, une série d’études contredit les affirmations sans fondement scientifique avancées par Greenpeace : aucun allergène ne put être identifié en établissant une recherche sur 8 amino-acides consécutifs. Il fut également démontré que cette protéine était clivée en quelques secondes dans l’estomac. De plus les papayes non transgéniques et présentant les symptômes caractéristiques d’une attaque par le ringspot virus contenaient jusqu’à 8 fois plus de protéine virale que les papayes issues de papayers transgéniques résistant au virus.

Le Japon autorisa la culture de la papaye transgénique en 2011 considérant qu’il n’y avait aucun argument valable pour interdire cette culture (voir le lien en fin de billet) et la Chine suivit quelques mois plus tard.

Il faut donc se rendre à l’évidence que les pourfendeurs des OGMs n’ont que deux choix possibles : ou bien il leur faut reconnaître que leurs arguments n’ont aucune valeur scientifique et qu’ils se sont fourvoyés par pure idéologie ou alors ils persévèrent dans leur obscurantisme et continuent à semer la terreur apocalyptique que constituent les plantes transgéniques. Ces idéologues ont choisi de persévérer dans leur loufoquerie et poussèrent le Conseil de la plus grande île, Hawaii, à interdire le papayer transgénique. Pour mes lecteurs la ville d’Honolulu et Pearl Harbor se trouvent sur l’île d’O’ahu. Un membre de ce Conseil, une dénommée Margaret Wille, pourtant activiste anti-OGM bien connue, dut se rendre à l’évidence, il n’existait aucun argument objectif contre la culture du papayer transgénique à Hawaii, les récents travaux réalisés au Japon et en Chine le démontraient clairement. De plus elle reconnut que Monsanto n’avait rien à voir avec les papayers transgéniques et les arguments avancés par les agriculteurs qui ne traitaient plus leur culture avec des pesticides conforta sa décision d’exempter le papayer de l’interdiction des plantes transgéniques dans l’archipel. Margaret Wille opéra donc une sorte de reniement du dogme écologique consistant à classer les plantes transgéniques parmi des perturbateurs de la nature sans toutefois perdre la face car elle obtint l’interdiction de l’introduction dans l’archipel d’autres cultures génétiquement modifiées.

Son ami et collègue Jeffrey Smith, également membre du Conseil de l’île et écologiste notoire, persista dans ses idées et bien que n’ayant strictement aucune culture scientifique – sans faire d’humour – persista en listant dans une sorte de logorrhée délirante tous les inconvénients des OGMs. Il déclara que l’ARN introduit dans la papaye (sic, il ignorait donc à l’évidence tout des procédés de la transgénèse) pouvait perturber les gènes des consommateurs et que les protéines nouvelles étaient susceptibles de modifier l’immunité des êtres humains, qu’elles rendaient plus sensible aux virus du SIDA et de l’hépatite et qu’elles induisaient l’apparition de cancers pour cette raison. Il fut soutenu dans son discours par un agronome de l’Université, un dénommé Hector Valenzuela qui prétendit qu’aucune étude sérieuse n’avait été faite sur la santé humaine ou animale alors qu’à peine deux mois plus tôt une publication relatait l’absence d’effet sur les rats nourris avec des papayes, comme si la vraie science n’existait pas pour ces activistes empêtrés dans leur dogmatisme ( http://pubs.acs.org/doi/abs/10.1021/jf305036x ). Smith et Valenzuela prétendirent que la FDA était noyautée par les sbires de Monsanto. Plus incroyable encore ces deux tristes individus prétendirent aussi que parmi les messages révélés par Wikileaks figuraient des instructions précises à destination des régulateurs japonais émanant du gouvernement américain pour faire approuver la papaye transgénique au Japon. Jamais ce dernier point n’a pu être confirmé par les analyses scrupuleuses des dépêches et messages révélés par Wikileaks.

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Aujourd’hui, dans les magasins de fruits et légumes on trouve des papayes transgéniques avec un label qui précise seulement que ces fruits ont été artificiellement modifiés pour permettre de réduire l’usage de pesticides par les agriculteurs mais on omet de dire que ces fruits ne présentent aucune différence nutritionnelle par rapport aux fruits non modifiés. Finalement, pour conclure cette sombre histoire, les écologistes ont réussi à semer le doute dans l’esprit des consommateurs sans jamais apporter de preuves irréfutables à l’appui de leurs arguments pour la simple raison qu’il n’y en a pas … Le doute persiste et c’est là que réside l’effet hautement néfaste de ces organisations qui nient ouvertement la vraie science, celle qui n’est pas prisonnière de l’idéologie et de la politique.

Source : adapté d’un article paru dans Slate.com, illustrations Wikipedia et Slate.

http://gain.fas.usda.gov/Recent%20GAIN%20Publications/Japan%20approved%20GM%20papaya_Tokyo_Japan_12-19-2011.pdf