Dans la plupart des pays producteurs de vaccins des cellules foetales humaines sont utilisées pour produire ces vaccins. Ces lignées cellulaires ont été établies à partir de fœtus provenant d’avortements thérapeutiques ayant eu lieu il y a des dizaines d’années et conservés dans de l’azote liquide pour des usages ultérieurs. Certaines cellules foetales ont été congelées au début des années 1960 et utilisées pour produire les vaccins dirigés contre la rougeole, la rubéole, le zona ainsi que le vaccin contre l’hépatite A. Ces cellules ont également été utilisées pour la mise au point de thérapies dirigées contre par exemple l’hémophilie. L’une des lignées cellulaires humaines très utilisée pour la production de vaccins est la lignée HEK-293 établie en 1972 à partir de cellules rénales d’un fœtus humain. La lignée PER.c6 établie en 1985 par le laboratoire Janssen provenait de cellules de rétine d’un fœtus de 4 mois et demi. Ces deux lignées sont considérées comme d’excellents candidats pour la mise au point d’un vaccin dirigé contre le Covid-19. La lignée HEK-193 est utilisée actuellement par CanSino Biologics à l’Institut de biotechnologie de Pékin, l’Université d’Oxford et l’Université de Pittsburg pour la mise au point de ce vaccin. CanSino et l’Université d’Oxford ont déjà entamé les essais cliniques en phase II.
Ces cellules humaines sont utilisées pour produire de vastes quantités d’adénovirus modifié génétiquement pour contenir un des gènes du Covid-19 tout en étant lui-même non pathogène, c’est-à-dire ne pouvant pas se répliquer dans les cellules d’un candidat à la vaccination. Utilisé pour confectionner un vaccin cet adénovirus est sensé pénétrer dans les cellules humaines et ces dernières vont alors produire la protéine du Covid qui est supposée immunogène afin d’orienter le système immunitaire pour protéger ensuite le sujet utilisé au cours des essais cliniques en phase II puis III. C’est sensiblement la même approche qui a été utilisée par le passé pour la mise au point de divers vaccins. L’autre stratégie choisie par la société ImmunityBio/NantKwest consiste à utiliser ces même lignées de cellules humaines pour produire non pas un adénovirus atténué mais des protéines formant les protubérances du virus lui permettant de s’arrimer aux cellules humaines au cours de l’infection. Ces protéines entreront alors dans la composition d’un vaccin à protéines et non par l’intermédiaire d’un virus atténué modifié.
Pourquoi choisir des cellules humaines ? La raison est simple et tient en deux parties. D’abord les cellules humaines sont la cible du virus. En second lieu la machinerie enzymatique de ces cellules peut ajouter correctement – humainement dirons-nous – divers sucres sur ces protéines alors que des cellules de singe ou de tout autre animal en sont incapables. Cette étape est indispensable pour obtenir une réponse immunitaire spécifique. Et c’est là que réside toute la difficulté de la mise au point du vaccin. Et il y a un caractère d’urgence au cas où une deuxième vague épidémique arriverait au cours de l’hiver 2020-2021.
Pourtant, malgré ce caractère d’urgence, les autorités des Eglises catholiques canadiennes et américaines se sont élevées contre cette pratique d’utilisation de cellules humaines provenant de fœtus issus d’avortements. Des groupes et des organisations non-gouvernementales opposés à l’avortement se sont également émus que les laboratoires pharmaceutiques et les Universités utilisent de telles cellules. Pour répondre à ces opposants à l’avortement dont il n’est plus question depuis longtemps puisque la lignée HEK-293 a été établie en 1972 il faut mentionner qu’il est interdit d’utiliser des cellules humaines provenant de tumeurs comme par exemple les cellules HeLa immortelles depuis 1951 provenant d’un cancer du col de l’utérus et donc modifiées par un virus oncogène ( https://en.wikipedia.org/wiki/HeLa ) pour produire un vaccin et ceci pour des raisons éthiques et non religieuses ou idéologiques. Ceci étant l’utilisation de cellules foetales humaines à des fins d’études biomédicales provenant de fœtus issus d’avortements thérapeutiques délibérés a été récemment interdit par le Président Trump. Cette décision a été prise à des fins électoralistes pour plaire aux électeurs de la droite religieuse conservatrice américaine opposée à l’avortement en ces termes : « il s’agit de promouvoir la dignité de la vie humaine depuis la conception jusqu’à la mort naturelle ». Une mort naturelle par Covid-19 ?
Source : Science Magazine