Essais cliniques et CRISPR-cas9 : succès et échecs

Lorsque Jennifer Doudna et Emmanuelle Charpentier, toutes deux prix Nobel, ont découvert le CRISPR-cas9 elles savaient que cette technologie aurait des retombées immenses dans le domaine de l’édition de gènes avec des embryons, d’abord d’origine animale, certes, mais la tentation allait s’orienter vers l’édition de gènes à des fins thérapeutiques chez l’homme. Dans le domaine de la modification génétique des plantes de grande culture, l’utilisation de cet outil est également pleine d’avenir. Je ne citerai que deux exemples, la mise au point de plantes résistantes aux virus et de plantes mieux armées contre la sécheresse, et il faudra peut-être une vingtaine d’années pour aboutir à des applications concrètes. L’édition de gènes consiste à introduire un gène d’intérêt dans une séquence précise, un site d’insertion déterminé, de l’ADN nucléaire. Les curieux peuvent lire cet article bien documenté :https://en.wikipedia.org/wiki/Genome_editing . Les premiers essais d’édition de gènes ont été effectués sur des animaux. Le biologiste chinois He Jiankui qui a le premier abouti à une telle prouesse sur des embryons humains a été emprisonné et aux dernières nouvelles il vient d’être libéré avec interdiction de procéder à de nouvelles tentatives d’édition de gènes sur des embryons humains. On peut cependant interpréter cette information comme un paravent pour dissimuler des travaux « non officiels » avec l’assentiment des autorités politiques, allez savoir. 

ll existe un preuve récente évidente de la manipulation de l’ARN du SARS-CoV-2 qui a été modifié par insertion d’une séquence codant pour le site de clivage de la furine et cette édition de gène très ponctuelle a probablement été effectuée après avoir converti l’ARN viral en ADN double brin afin d’utiliser les outils existants dont le CRISPR-cas9, plus simple à utiliser que des enzymes de restriction, pour introduire cette petite séquence. Cet ADN modifié a ensuite été converti en ARN avec de l’ARN polymérase produite par génie génétique avec des bases non naturelles comme la pseudo-uridine pour produire l’ARN « vaccinal » mais aussi et surtout en 2019 pour produire le virus lui-même reconstitué par multiplication sur des cultures de cellules compétentes pour le disperser à Wuhan lors des JO militaires. Une telle approche demande quelques mois de travail pour un groupe d’expérimentateurs chevronnés, au pire une année et les dates concordent entre la date de dépôt de brevet de cette séquence artificielle par Moderna et le tout début de l’apparition des premiers cas de premiers malades de syndrome respiratoire aigu chez des athlètes dès l’automne 2019.

Lors du troisième congrès international sur l’édition de gènes qui a eu lieu à Londres en ce début de mois de mars 2023, quelques 200 essais d’édition de gènes réalisés dans le monde chez des sujets humains ont été passés en revue. Il s’agissait dans la majorité des cas de tenter de traiter une maladie grave et de sauver des vies. Tous n’ont pas été couronnés de succès loin de là. Cependant il faut rappeler que Victoria Gray, 37 ans, souffrant de drépanocytose aussi appelée anémie falciforme provoquée par une mutation du gène codant pour l’hémoglobine a été traitée avec succès avec l’outil de Doudna et Charpentier consistant à introduire dans la moelle osseuse ses propres cellules souches modifiées in vitro par introduction du gène normal codant pour l’hémoglobine. Aujourd’hui Victoria est en parfaite santé alors qu’elle a vécu les trente premières années de sa vie comme un véritable cauchemar.

L’outil CRISPR a été amélioré au cours des années récentes au niveau de la spécificité des sites d’insertion de gènes (liens en fin de billet) et c’est le cas d’Alyssa, une adolescente britannique souffrant d’une forme rare de leucémie affectant les lymphocytes T. Tous les traitements tentés ont échoué et les médecins et biologistes du Great Ormond Street Hospital de Londres ont choisi la technique CRISPR en modifiant les cellules précurseurs des lymphocytes T sains d’un donneur de moelle (je passe sur les détails complexes) afin qu’il n’y ait pas de phénomènes de rejet. Ces cellules ainsi modifiées in vitro ont été injectées dans la moelle osseuse d’Alyssa et très rapidement l’état de la patiente s’est amélioré.

D’autres cas ont été évoqués mais le problème majeur qui a concentré l’attention des participants à ce congrès est de deux ordres. Aucune des thérapies géniques utilisant la technique CRISPR n’a été approuvée par les instances politiques et les comités d’éthique. Ces approches sont toujours considérées comme expérimentales et par conséquent elles ne sont accessibles qu’à des personnes disposant de moyens financiers conséquents d’autant plus qu’en définitive il y a peu de succès car il existe encore trop de zones d’ombre en ce qui concerne les sites de réinsertion ouverts par l’outil CRISPR et dont on ne maitrise pas la localisation dans l’ADN nucléaire, ce qui est préoccupant car plutôt qu’une guérison il peut apparaître d’autres troubles d’origine génétique provoqués par l’outil de Doudna et Charpentier. Néanmoins quelques 50 études sont en cours d’évaluation dans le monde pour tenter de traiter certains cancers, des maladies d’origine génétique affectant la vision et même le cas d’une Néo-Zélandaise qui a reçu un traitement dans le but de réduire son taux sanguin de cholestérol en bloquant la synthèse d’une seule protéine appelée PCSK9 (voir le lien). Cette protéine interfère avec la principale protéine constituant les lipoprotéines de faible densité (LDL), le moyen de transport du cholestérol dans le sang dont le taux diminue alors très significativement. À partir d’un seul patient traité on ne peut pas encore en déduire qu’une telle approche serait un succès mondial en regard de la véritable « épidémie de cholestérol » dont l’origine est multifactorielle, en particulier l’abus de sucre dans l’alimentation.

La nouvelle génération de « CRISPR 2.0 » consiste à remplacer une ou plusieurs bases puriques ou pyrimidiques de l’ADN sur un site choisi par une amorce spécifique afin d’introduire une mutation du gène considéré. Il ne faut pas se réjouir prématurément car cette approche en est pour l’instant au stade expérimental. Mais l’avantage de cette approche réside dans le fait que l’ADN n’est coupé que sur un seul point précis, la réparation de cet ADN coupé requérant néanmoins l’intervention d’un enzyme de la cellule dont le fonctionnement n’est pas totalement maîtrisé.

Source : MIT Technology Review. Liens :https://www.technologyreview.com/2019/10/21/102528/the-newest-gene-editor-radically-improves-on-crispr/?utm_source=the_checkup&utm_medium=email&utm_campaign=the_checkup.unpaid.engagement&utm_content=03-10-23

Essais cliniques et CRISPR-cas9, succès et échecs …

Lorsque Jennifer Dounda et Emmanuelle Charpentier ont découvert le CRISPR-cas9 elles savaient que cette technologie aurait des retombées immenses dans le domaine de l’édition de gènes avec des embryons, d’abord d’origine animale, certes, mais la tentation allait s’orienter vers l’édition de gènes à des fins thérapeutiques chez l’homme. L’édition de gènes consiste à introduire un gène d’intérêt dans une séquence précise, un site d’insertion déterminé, de l’ADN nucléaire. Les curieux peuvent lire cet article bien documenté :https://en.wikipedia.org/wiki/Genome_editing . Les premiers essais d’édition de gènes ont été effectués sur des animaux. Le biologiste chinois He Jiankui qui a le premier abouti à une telle prouesse sur des embryons humains a été emprisonné et aux dernières nouvelles il vient d’être libéré avec interdiction de procéder à de nouvelles tentatives d’édition de gènes. On peut cependant interpréter cette information comme un paravent pour dissimuler des travaux « non officiels » avec l’assentiment des autorités politiques, allez savoir.

Il existe un preuve évidente avec la manipulation de l’ARN du SARS-CoV-2 qui a été modifié par insertion d’une séquence codant pour le site de clivage de la furine et cette édition de gène, en réalité une petite séquence de nucléotides, a été effectuée après avoir converti l’ARN viral en ADN double brin afin d’utiliser les outils existants dont le CRISP-cas9 pour introduire cette petite séquence, cette manipulation effectuée, l’ADN est alors converti en ARN et introduit dans des cellules compétentes pour produire le virus, n’importe quel biologiste un tant soit peu expérimenté peut le faire, tous les réactifs sont disponibles commercialement, mais il faut se trouver dans une structure publique ou privée pour accéder à ces réactifs.

Lors du troisième congrès international sur l’édition de gènes qui a eu lieu à Londres en ce début de mois de mars 2023, quelques 200 essais d’édition de gènes réalisés dans le monde chez des sujets humains ont été passés en revue. Il s’agissait de tenter de traiter une maladie grave et de sauver des vies et non pas de réaliser des manipulations de gains de fonction avec des virus ou des bactéries pathogènes. Tous n’ont pas été couronnés de succès. Cependant il faut rappeler que Victoria Gray, 37 ans, souffrant de drépanocytose aussi appelée anémie falciforme provoquée par une mutation du gène codant pour l’hémoglobine a été traitée avec succès avec l’outil de Dounda et Charpentier consistant à introduire dans la moelle osseuse ses propres cellules souches modifiées in vitro par introduction du gène normal codant pour l’hémoglobine. Aujourd’hui Victoria est en parfaite santé alors qu’elle a vécu les trente premières années de sa vie comme un véritable cauchemar.

L’outil CRISPR a été amélioré au cours des années récentes au niveau de la spécificité des sites d’insertion de gènes (liens en fin de billet) et c’est le cas d’Alyssa, une adolescente britannique souffrant d’une forme rare de leucémie affectant les lymphocytes T. Tous les traitements tentés ont échoué et les médecins et biologistes du Great Ormond Street Hospital de Londres ont choisi la technique CRISPR en modifiant les cellules précurseurs des lymphocytes T sains d’un donneur afin qu’il n’y ait pas de phénomènes de rejet. Ces cellules ainsi modifiées in vitro ont été injectées dans la moelle osseuse d’Alyssa et très rapidement l’état de la patiente s’est amélioré. D’autres cas ont été évoqués mais le problème majeur qui a concentré l’attention des participants à ce congrès est de deux ordres. Aucune des thérapies géniques utilisant la technique CRISPR n’a été approuvée par les instances politiques et les comités d’éthique. Ces approches sont toujours considérées comme expérimentales et par conséquent elles ne sont accessibles qu’à des personnes disposant de moyens financiers conséquents d’autant plus qu’en définitive il y a peu de succès car il existe encore trop de zones d’ombre, et c’est le deuxième point abordé, en ce qui concerne les sites de réinsertion ouverts par l’outil CRISPR et dont on ne maitrise pas la localisation dans l’ADN nucléaire, ce qui est préoccupant car plutôt qu’une guérison il peut apparaître d’autres troubles d’origine génétique provoqués par l’outil de Dounda et Charpentier. Néanmoins quelques 50 études sont en cours d’évaluation dans le monde pour tenter de traiter certains cancers, des maladies d’origine génétique affectant la vision et même le cas d’une Néo-Zélandaise qui a reçu un traitement dans le but de réduire son taux sanguin de cholestérol en bloquant la synthèse d’une seule protéine appelée PCSK9 (voir le lien). Cette protéine interfère avec la principale protéine constituant les lipoprotéines de faible densité, le moyen de transport du cholestérol dans le sang dont le taux diminue alors très significativement. À partir d’un seul patient traité on ne peut pas encore en déduire qu’une telle approche serait un succès mondial en regard de la véritable « épidémie de cholestérol » dont l’origine est multifactorielle.

La nouvelle génération de « CRISPR 2.0 » consiste à remplacer une ou plusieurs bases puriques ou pyrimidiques de l’ADN sur un site choisi par l’amorce spécifique choisie afin d’introduire une mutation du gène considéré. Il ne faut pas se réjouir prématurément car cette approche en est pour l’instant au stade expérimental. Mais l’avantage de cette approche réside dans le fait que l’ADN n’est coupé que sur un site et réparé aussitôt le changement de base effectué, la réparation de cet ADN coupé requérant l’intervention d’un enzyme de la cellule dont le fonctionnement n’est pas totalement maîtrisé dans le cas d’une utilisation sur l’ensemble de l’ADN nucléaire.

Source : MIT Technology Review. Liens :https://www.technologyreview.com/2019/10/21/102528/the-newest-gene-editor-radically-improves-on-crispr/?utm_source=the_checkup&utm_medium=email&utm_campaign=the_checkup.unpaid.engagement&utm_content=03-10-23

Note. L’approche expérimentale brièvement décrite ci-dessus est globalement utilisée pour la production de l’ARN codant pour la sous-unité 1 de la protéine de la spicule du SARS-CoV-2 utilisé comme thérapie génique vaccinale en raison de l’instabilité de l’ARN. Une série de « gabarits » (traduction de « template ») d’ADN double brin sont utilisés pour produire l’ARN messager correspondant. Ces ARN sont ensuite liés les uns aux autres après éventuelle modification de certaines bases puriques ou pyrimidiques à l’aide d’enzymes ou de réactifs chimiques spécifiques. Tout l’équipement enzymatique nécessaire est lui-même produit par des bactéries génétiquement modifiées. La production industrielle d’enzymes est une technique bien rodée puisque l’industrie textile, par exemple, utilise des quantités massives d’amylase utilisée pour éliminer l’amidon dont sont imprégnées les fibres textiles avant le tissage afin de les rendre plus résistantes.. D’autres enzymes produits industriellement sont les lipases et les protéases présentes dans les lessives. L’ADN humain code pour plus de 20000 protéines et enzymes différents afin d’assurer un bon fonctionnement de l’ensemble ! Les laboratoires modernes maîtrisent totalement ces technologies.

L’outil CRISPR-cas9 : un espoir pour sauver les bananes ?

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La course à l’ingénierie génétique de la banane de nouvelle génération est lancée. Le gouvernement colombien a confirmé le mois dernier qu’un champignon destructeur de bananes avait envahi les Amériques – la source d’une grande partie de l’approvisionnement mondial en bananes. L’invasion a provoqué une nouvelle urgence aux efforts pour créer des fruits qui peuvent résister au fléau.

Les scientifiques utilisent plusieurs approches expérimentales pour sauver la banane. Une équipe australienne a inséré un gène de résistance de bananier sauvage dans la variété commerciale la plus connue – la Cavendish – et teste actuellement ces bananes modifiées au cours d’essais sur le terrain. Les chercheurs se tournent également vers le puissant et précis outil d’édition de gènes CRISPR pour renforcer la résilience de la Cavendish contre ce champignon, connu sous le nom de Fusarium wilt tropical race 4 (TR4) et provoquant la mort des bananiers, maladie initialement appelée maladie de Panama.

La reproduction de la résistance au TR4 dans le Cavendish en utilisant des méthodes conventionnelles (sélection d’hybrides) n’est pas possible car la variété est stérile et se propage par clonage. Ainsi, la seule façon de sauver la Cavendish pourrait être de modifier son génome, explique Randy Ploetz, phytopathologiste à l’Université de Floride à Homestead. La variété Cavendish représente 99% des exportations mondiales de bananes.

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James Dale, biotechnologue à l’Université de technologie du Queensland à Brisbane, en Australie, a commencé à recevoir des demandes de renseignements sur ses bananes génétiquement modifiées (GM) en juillet, alors que les premières rumeurs montraient que TR4 avait atteint la Colombie. Ensuite, la Colombie a déclaré une urgence nationale, affirme Dale, « car la menace est immense. »

Une alternative séduisante

Ce n’est pas la première fois qu’une variété de banane commerciale est menacée d’extinction. Dans la première moitié des années 1900, une autre souche du champignon Fusarium appelée TR1 a presque anéanti la meilleure banane de l’époque, la Gros Michel. Mais les agriculteurs avaient un renfort dans la Cavendish, qui était résistante au TR1, assez ferme pour résister à la manipulation pendant l’exportation et avait une texture et un goût largement acceptables. Dans les années 1960, de grands producteurs de bananes comme Chiquita, maintenant basés à Fort Lauderdale, en Floride, se tournaient vers la Cavendish.

Cette fois-ci il n’y a pas d’alternative facile. Rodomiro Ortiz, généticien des plantes à l’Université suédoise des sciences agricoles d’Alnarp, dit qu’aucune espèce de bananier naturelle n’a les qualités qui ont rendu la Cavendish si populaire et la capacité de résister au TR4.

Et le champignon est un adversaire coriace. Il ne peut pas être tué avec des fongicides, et il peut persister dans le sol sous forme de spores jusqu’à 30 ans. Cela a permis au TR4 de se répandre lentement dans le monde, probablement en faisant de l’auto-stop sur du matériel contaminé ou dans le sol. La souche a commencé à détruire les cultures de bananes dans les années 1990 en Asie avant d’envahir l’Australie et les pays du Moyen-Orient et de l’Afrique. Maintenant, TR4 est dans les Amériques, et les chercheurs disent que la Cavendish pourrait s’éteindre complètement au cours des prochaines décennies à moins qu’ils ne puissent modifier cette variété pour la rendre résistante au champignon.

L’équipe de Dale s’est concentrée sur la modification des plantes de Cavendish en insérant un gène de la banane sauvage Musa acuminate malaccensis qui confère une résistance au TR4. Après avoir publié des résultats prometteurs en 2017 à partir d’un petit essai sur le terrain, Dale a commencé une étude plus vaste il y a 15 mois. Dale et ses collègues ont planté des Cavendish transgéniques sur un demi-hectare de terrain infesté de TR4 dans le nord de l’Australie. Les bananes transgéniques se portent bien, dit Dale, tandis qu’environ un tiers des bananes régulières qu’il a plantées à des fins de comparaison sont infectées par le champignon.

Il prévoit de demander aux régulateurs australiens l’autorisation de commercialiser cette banane transgénique Cavendish après la fin de l’étude en 2021. Mais il est impossible de prédire si les autorités donneront leur feu vert, ni combien de temps pourrait durer la procédure d’approbation.

Même si la banane transgénique de Dale obtient l’approbation, la commercialisation pourrait être un problème. Les cultures génétiquement modifiées ont longtemps été confrontées à des pressions publiques dans le monde entier, en particulier en Europe. «Dale possède maintenant d’excellentes bananes qui semblent presque immunisées contre le TR4», explique Ploetz. « Mais la question de savoir si les consommateurs achèteront ce produits est un autre problème. »

Transformer des bananes avec CRISPR

Dans une tentative de rendre les bananes biotechnologiques plus agréables au goût pour les régulateurs, Dale édite également le génome de Cavendish avec CRISPR pour augmenter sa résilience au TR4, au lieu d’insérer des gènes étrangers. Plus précisément, il essaie d’activer un gène dormant dans la Cavendish qui confère une résistance à TR4 – le même gène qu’il a identifié chez M. acuminate var malaccensis. Mais le travail en est encore à ses débuts. « Il faudra encore quelques années avant que ceux-ci ne soient mis sur le terrain pour des essais« , explique Dale.

D’autres chercheurs utilisent CRISPR pour renforcer les défenses de la Cavendish de différentes manières. Leena Tripathi, biologiste moléculaire à l’Institut international d’agriculture tropicale de Nairobi, au Kenya, utilise l’outil d’édition de gènes pour supprimer les gènes Cavendish qui semblent rendre la plante vulnérable au TR4. Jusqu’à présent, elle n’a édité que du tissu Cavendish en laboratoire. La prochaine étape consistera à faire pousser les tissus en jeunes plants (illustration), puis à voir si les plantes survivent à l’exposition au TR4. Des chercheurs philippins ont proposé d’aider à tester la Cavendish édité par Tripathi dans leur pays; TR4 y est présent, mais pas au Kenya.

Enfin une start-up biotechnologique, Tropic Biosciences à Norwich, au Royaume-Uni, essaie d’utiliser CRISPR pour renforcer le système immunitaire de la Cavendish. Toutes les plantes produisent des petits brins d’ARN qui contrôlent l’activité de certains de leurs propres gènes. Et des études récentes suggèrent que certains de ces brins d’ARN peuvent parfois supprimer les gènes des agents pathogènes, paralysant ainsi les envahisseurs. Il s’agit d’un processus naturel d’interférence ARN. La société de biotechnologie utilise CRISPR pour modifier les brins d’ARN dans la Cavendish afin qu’ils réduisent au silence les gènes dans TR4.

Mais on ne sait pas comment les régulateurs du monde entier accueilleront les bananes modifiées par génie génétique. En 2016, le département américain de l’Agriculture a décidé de ne pas réglementer un champignon de consommation courante dont le génome a été édité à l’aide de CRISPR, suggérant qu’il pourrait traiter les bananes éditées de manière similaire. De surcroit les gouvernements de Colombie, du Chili, du Brésil, du Japon et d’Israël ont publié des déclarations officielles indiquant qu’ils pourraient également être indulgents avec les cultures éditées par CRISPR. L’Union européenne a toutefois déclaré qu’elle évaluerait les cultures modifiées génétiquement aussi strictement que les autres aliments génétiquement modifiés.

Ortiz soutient les efforts d’ingénierie des chercheurs, mais il met en garde contre le fait de se concentrer uniquement sur une solution biotechnologique au fléau rampant des bananes. Il y a plus d’un millier d’autres types de bananes en dehors de la Cavendish, dit-il. Ils ne produisent pas des rendements aussi élevés que ceux de la Cavendish, peuvent être expédiées facilement et ont à peu près les mêmes propriétés organoleptiques, et Ortiz dit que les entreprises commerciales de bananes pourraient essayer de créer un marché pour ces variétés alternatives. « Nous devons exploiter la diversité disponible« , dit-il, « et avoir une campagne de marketing qui dit que vous pouvez profiter de la banane par d’autres moyens.« 

Inspiré d’un article publié sur le site de l’hebdomadaire scientifique Nature.

Autres liens à propos des régulations : https://www.nature.com/articles/d41586-018-05814-6

https://www.nature.com/news/gene-edited-crispr-mushroom-escapes-us-regulation-1.19754

Relire aussi sur ce blog : https://jacqueshenry.wordpress.com/2017/11/20/un-immense-espoir-pour-sauver-la-banane/

https://jacqueshenry.wordpress.com/2016/01/15/vers-une-disparition-des-bananiers/

Nouvelles du Japon : les plantes génétiquement modifiées

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À la demande du gouvernement japonais une commission d’experts s’est réunie pour évaluer les risques pour la santé et l’environnement des plantes modifiées par la technique dite d’ « édition de gènes » utilisant des outils d’introduction ou d’extinction de gènes tels que le CRISPR-case9. Cette commission a, en effet, considéré qu’il n’y a que peu de différences entre l’édition de gène et la longue et fastidieuse sélection traditionnelle qui peut, au contraire. appauvrir le génome de la plante. Dans un billet de ce blog mis en ligne le 19 février 2019 ce problème avait été abordé, or l’édition de gènes contourne cet inconvénient de la sélection traditionelle.

Avec la technique d’édition de gènes il n’y a pas à proprement parler d’introduction de gènes étrangers à la plante considérée mais soit une modification de l’expression d’un gène de la plante elle-même soit une modification du gène lui-même. L’administration américaine FDA avait statué en 2018 à ce sujet en considérant que les plantes (et les animaux) modifiés par édition de gène(s) ne nécessitaient pas de dossier d’homologation complexe comme cela est le cas pour les plantes transgéniques, celles dans lesquelles ont été introduits un ou plusieurs gènes étrangers. Comme ce n’est pas le cas pour l’édition de gènes il n’est donc pas nécessaire de constituer un tel dossier et ce sont les termes du rapport remis au gouvernement japonais. L’étiquettage spécial mentionnant qu’une plante quelconque a été modifiées par édition de gène n’a pas été abordé.

Comme on pouvait s’y attendre l’officine sectaire appellée Friends of Earth qui a des ramifications dans le monde entier (en France ce sont les Amis de la Terre) a immédiatement réagi en réclamant un étiquettage visible et officialisé par un organisme gouvernemental. Le gouvernement a approuvé cette demande alors qu’au Japon peu de cultures de plantes génétiquement modifiées existent bien que ce pays importe des quantités massives de nourriture pour animaux provenant de plantes génétiquement modifiées tant pour l’alimentation animale qu’humaine. Néanmoins de nombreux laboratoires japonais publics ou privés travaillent sur l’édition de gènes dans les tomates, les pommes de terre, le riz, le poulet et les poissons.

Source et illustration : Science magazine

Note à l’attention de mes lecteurs : pas de billet ce jeudi 11 avril 2019 car je pars passer quelques jours à Ishigaki Jima pour y trouver des températures plus clémentes. À l’instant où je mets en ligne ce billet la température à Tokyo avoisine deux degrés avec un vent venant directement de Khabarovsk, l’horreur !

OGMs : oui ou non ?

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Le Docteur Stefan Jansson sort de l’ordinaire. Cet universitaire suédois spécialisé dans la « génomique » des plantes a mangé cet été, pour la première fois au monde, des choux modifiés génétiquement avec l’outil CRISPR-cas9 au sujet duquel j’ai déjà disserté longuement dans ce blog. Travaillant à l’Université d’Umeå en Suède, il a « osé » planter dans son jardin personnel ces choux dont l’ADN avait été intentionnellement modifié pour finalement les déguster avec des tagliatelles. Une véritable insulte pour les écologistes qui sont, pour des raisons irrationnelles, opposés à toute forme de manipulation du génome des plantes. Et il a trouvé que le goût de ces choux était indiscernable de celui des choux « normaux ». Rassurez-vous il n’a pas eu d’indigestion et n’a pas ressenti d’angoisses métaphysiques ni aucun trouble psycho-moteur …

Il faut ici mentionner que les essais en plein champ des plantes génétiquement modifiées sont autorisés en Suède malgré les interdictions européennes concernant non seulement ces essais en plein champ mais également la culture de ces dernières à des fins commerciales. Cet acte de bravoure largement diffusé par la presse et les médias suédois a eu pour but de sensibiliser l’opinion au sujet du CRISPR-cas9. La raison évidente est que la modification de l’ADN de ces choux n’avait pas pour but d’introduire un gène étranger dans la plante mais de simplement modifier l’expression d’un gène de cette plante. Il aura donc fallu cet acte de bravoure du Docteur Jansson pour ouvrir un débat public au sujet du non-sens de l’interdiction des plantes génétiquement modifiées par les instances politiques fortement imprégnées d’idéologie écologiste.

Prenons donc pour illustrer le débat qui va émerger à coup sûr au sujet du CRISPR-cas9 comme outil de modification génétique l’exemple des plantes de grande culture résistantes au glyphosate. La construction d’ADN qui a permis à la firme Monsanto d’obtenir un maïs (Mon802) résistant à l’herbicide glyphosate était plutôt complexe et incluait des gènes étrangers dont un gène de résistance à l’antibiotique kanamycine permettant de sélectionner les plantes transformées au laboratoire. La résistance au glyphosate était basée sur l’introduction de multiples copies du gène codant pour la cible de l’herbicide, en l’occurence l’EPSP synthase, afin de rendre la plante moins sensible au glyphosate. Ces copies étaient (et le sont toujours) incorporées complêtement au hasard dans le génome du maïs. La technique utilisée il y a maintenant une trentaine d’années paraît aujourd’hui totalement obsolète. Modifier judicieusement le promoteur du gène de l’EPSP synthase à l’aide du CRISPR-cas9 est tout à fait possible et le Mon802 nouvelle version sera-t-il considéré comme une plante génétiquement modifiée ?

Voilà la question centrale que vient de soulever le Docteur Jansson car l’outil CRISPR-cas9 permet dans ce cas précis de ne plus pouvoir être capable, du moins pour les autorités de régulation, de faire une quelconque différence entre une plante dite « sauvage » et une plante génétiquement modifiée à l’aide de cet outil. Tout débat au sujet des OGMs devient donc caduque ! Combien faudra-t-il d’années pour que les écologistes finissent par comprendre que leur opposition aux OGMs n’a plus lieu d’être ?

Source : Umeå Universitet News desk

Illustration : Docteur Jansson

Les OGMs nouveaux sont arrivés !

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Sur ce blog j’ai à plusieurs reprises disserté du CRISPR-Cas9 et cet outil de haute couture moléculaire au niveau de l’ADN est en passe de bouleverser la perception que tout un chacun a (et aura) des plantes génétiquement modifiées. En dépit des campagnes de dénigrement orchestrées par des groupes de pression variés s’appuyant sur des convictions relevant toutes de la fausse science, les plantes génétiquement modifiées, depuis qu’elles sont commercialisées, n’ont jamais occasionné d’effets indésirables sur la santé animale ou humaine et les effets sur l’environnement sont restés très limités. Les arguments des pourfendeurs des plantes transgéniques s’appuyaient sur des arguments spécieux pour justifier leurs actions spectaculaires de saccage d’essais en plein champ comme par exemple l’introduction dans les plantes génétiquement modifiées d’un gène de résistance à la kanamycine. Ce fut l’un des arguments phare d’un José Bové alors qu’il n’était qu’un obscur activiste motivé surtout pour le déroulement de sa carrière de politicien. Devenu maintenant rentier des contribuables européens, s’intéresse-t-il encore aux OGMs et se tient-il au courant des développements récents de la transgénèse végétale à l’aide du CRISPR ? S’il ne donne plus de la voix et de la machette, c’est tout simplement parce que cet outil moléculaire est d’une telle spécificité et d’une telle précision que le père José n’a plus d’argument pour dénigrer et combattre ces biologistes de nouvelle génération qu’il qualifiait il y a 20 ans d’apprentis sorciers, de docteurs Jekill ou Frankenstein.

Puisque j’ai mentionné la kanamycine il me faut ici répéter de quoi il s’agit. Le gène de résistance à la kanamycine se trouve partout dans le sol, la plupart des bactéries du sol sont en effet résistantes à cet antibiotique qui n’est plus guère utilisé en thérapeutique humaine. Il servait d’outil pour sélectionner les plantes qui avaient intégré la « construction » d’ADN comportant, outre ce gène de résistance utilisé comme marqueur, le ou les autres informations génétiques que les biologistes désiraient insérer dans le génome de la plante.

Dupont-Pioneer, l’un des plus grands semenciers du monde, spécialiste de longue date du maïs, promet que d’ici moins de 5 ans il y aura sur le marché des maïs de nouvelle génération de haute qualité pour le plus grand bénéfice des cultivateurs, des industriels et des consommateurs, après transformation à l’aide du CRISPR. Or cet outil n’entre pas dans les considérations classiques des régulateurs en raison de sa précision et de son aspect naturel. Il ne s’agit plus en effet de bombarder des cellules embryonnaires végétales avec des particules de tungstène recouvertes d’ADN (je passe sur les détails expérimentaux) ou de transfecter ces mêmes cellules avec des virus modifiés. Non ! L’outil CRISPR permet à l’expérimentateur de jeter aux oubliettes du passé ces technologies très approximatives développées il y a plus de 30 ans, des approches coûteuses aux résultats aléatoires et le plus souvent décevants.

En un mot, les développements de la transgénèse végétale des années 80-90 paraissent aujourd’hui tellement primitifs qu’ils sont presque caricaturaux en regard de la puissance opérationnelle du CRISPR. Cependant ils ont permis de prouver que les plantes génétiquement modifiées, comme l’Académie des Sciences américaine, l’USDA, l’Association Américaine pour l’Avancement des Sciences (AAAS), la FDA et en Europe l’EFSA le reconnaissent, ne sont pas nuisibles pour la santé. Une revue datant de 2013 a répertorié l’ensemble des travaux relatifs à l’effet possible des plantes génétiquement modifiées sur la santé animale ou humaine. La conclusion est claire : aucun effet délétère sur l’homme, les animaux d’élevage ou l’environnement (voir le lien).

Dès à présent de nombreux laboratoires ont modifié toutes sortes de fruits, légumes et céréales à l’aide du CRISPR et la FDA a d’ors et déjà adopté une position claire : les modifications génétiques à l’aide du CRISPR-Cas9 n’entrent pas dans le cadre des régulations précédemment édictées étant entendu qu’elles ne nuisent pas à la santé des autres plantes. Il s’agissait pour appuyer leur prise de position (voir le lien) d’un champignon qui ne noircit pas, le gène codant pour l’enzyme provoquant ce noircissement, une polyphénol-oxidase, ayant subi l’ablation de quelques bases constituant l’enchainement de l’ADN et désactivant ainsi l’enzyme. Pour la FDA il ne s’agit pas de l’introduction d’un gène étranger et ce champignon n’entre donc pas dans le cadre de la régulation classiquement imposée aux plantes transgéniques. Pourquoi parler d’un champignon qui ne sera probablement jamais commercialisé, tout simplement parce que la décision de la FDA constitue un précédent très important pour valider la technique utilisant le CRISPR qui fait l’objet de toutes les attentions des biologistes pour la mise au point de plantes résistantes aux ravageurs, à la sécheresse ou présentant des propriétés organoleptiques améliorées. Cette recherche d’un type nouveau est très bien répertoriée dans un article paru sur le site de l’ENSIA (voir le lien), un organisme émanant de l’Université du Minnesota ayant pourtant pour mission la protection de l’environnement.

Dans le domaine végétal, l’outil CRISPR-CAS9 accélère la sélection naturelle sans bouleverser de manière incontrôlée la structure et l’organisation des gènes de la plante comme c’était le cas avec les « vieilles » techniques de modification génétique. On ne peut qu’espérer un changement d’attitude de ces pseudo-scientifiques qui ont combattu sans arguments valables les plantes génétiquement modifiées …

Billet inspiré d’une série d’articles parus dans Business Insider

http://www.realclearscience.com/blog/2013/10/massive-review-reveals-consensus-on-gmo-safety.html

https://www.aphis.usda.gov/biotechnology/downloads/reg_loi/15-321-01_air_response_signed.pdf

http://ensia.com/voices/crispr-is-coming-to-agriculture-with-big-implications-for-food-farmers-consumers-and-nature/

Voir aussi : http://cariboubio.com/application-areas/agricultural-biotech , une firme biotech cofondée par le Docteur Jennfier Doudna.