Billet d’humeur (géo)politique : les coups tordus des Américains

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Le Crédit Agricole vient d’être taxé par la justice américaine comme l’a été il y a quelques mois la BNP pour avoir osé contourner les embargos économiques décidés unilatéralement par les USA à l’encontre de Cuba, de l’Iran ou encore du Soudan. Des banques de pays alliés des USA ont osé, crime de lèse-majesté suprême, commercer en dollars US avec ces pays. Le dollar est non seulement la monnaie nationale américaine mais aussi celle de nombreux échanges internationaux : avec quelle monnaie on achète du pétrole ? Avec des dollars. Les Américains ont imposé la suprématie du dollar au monde entier mais si par hasard, après que la Maison-blanche ait décrété un embargo, des banquiers de pays pourtant alliés et membres de l’OTAN osent faire du business en dollar avec ces pays classés « ennemis des USA » alors la justice américaine leur tombe dessus. En effet bien qu’ayant un statut de fait de monnaie internationale, le dollar US est assujetti aux lois américaines car c’est aussi la monnaie nationale des USA : un mélange des genres subtil mais tout aussi vicieux.

C’est très exactement ce qui se passera si l’Europe signe le TTIP : la justice américaine sera à l’affut de la moindre entorse, du moindre geste « inamical » envers l’impérialisme américain. Des jours très sombres se profilent pour les paysans, les banquiers et les entrepreneurs européens dans n’importe quel registre industriel ou commercial !

« Est-ce ainsi qu’on traite ses amis, ses alliés ? Non ! C’est comme ça qu’on traite ses vassaux qui ont osé agir comme bon leur semblait mais à l’encontre des intérêts de Washington. Résultat : ils sont punis et déshonorés » (Vladimir Putine, Valdai International Discussion Club, octobre 2015).

BNP : 8,9 milliards de dollars, Toyota : 1,2 milliard, Commerzbank : 1,7 milliard, récemment le Crédit Agricole, et probablement bientôt la Deutsche Bank et d’autres banques européennes dans le collimateur de la justice américaine pour avoir enfreint l’embargo otanien (américain) contre la Russie … Au total les Américains ont ainsi par intimidation juridique déjà « récolté » en six ans 230 milliards de dollars auprès de divers pays dont par exemple la Pologne ou la République Tchèque, invraisemblable et totalement intolérable mais les gouvernements européens n’en ont cure, ils courbent l’échine sans broncher.

Voilà comment les Américains traitent leurs « alliés et amis » ! Il y a comme un gros souci si les négociateurs de la Commission Européenne finissent par signer le TTIP. Dans peu de temps le Japon, le Vietnam et d’autres pays regretteront amèrement de s’être fait rouler dans le goudron et les plumes par les négociateurs américains du TPP. Ça s’appelle en termes à peine déguisés la guerre économique organisée par les néoconservateurs américains pour maintenir l’hégémonie des USA sur la majeure partie du monde : le TTIP est un coup tordu de plus des Américains pour mieux asservir l’Europe …

Sources : diverses dont le blog de Paul Craig Roberts et d’autres blogs.

Illustration : http://www.cybercartes.com/apercu/4841/cc/lucky-luke

Quand la chasse aux sorcières (les blogueurs) s’organise !

L’histoire remonte à août 2011 et vient de s’accélérer on peut dire à l’échelle planétaire puisqu’un blogueur suisse et un blogueur américain sont poursuivis par la justice française via l’AMF, l’autorité des marchés financiers, à la suite d’une plainte de la Société Générale considérant que ces blogueurs avaient véhiculé de fausses informations sur l’état de santé financier de cette banque. Ces informations avaient provoqué une chute de près de 20 % du titre de SocGen au cours de la séance du 10 août 2011. Et cette histoire refait surface maintenant avec les condamnations du blogueur Jean-Pierre Chevallier à payer une amende de 10000 euros et du blogueur américain Mike Shedlock à 8000 euros. Chevallier ou tout au moins son blog est domicilié en Suisse (chevalier.biz et http://www.jpchevallier.com/) et Shedlock aux USA (globaleconomicanalysis.blogspot.com) .

Quelle faute ont commis ces deux blogueurs dont le sérieux des analyses est reconnu ? Ils ont osé recalculer l’exposition des banques françaises à l’effet de levier c’est-à-dire le ratio entre les actifs et les capitaux propres en tenant compte de ce qu’ils appellent à juste titre les facteurs de risque que comportent certains actifs, comme par exemple détenir de la dette grecque (c’était en 2011) à partir des données disponibles au public provenant des trois principales banques françaises, Société Générale, BNP et Crédit Agricole. Chevallier avait trouvé respectivement pour ces trois banques des ratios de 50/1, 27/1 et 49/1 ! Le Crédit Agricole, sérieusement empêtré dans la crise économique grecque n’avait pas relevé le gant ni la BNP plutôt mieux « nantie » que les consoeurs. La Société Générale ne l’a pas entendu de cette oreille et a déposé une plainte contre Chevallier et Sheldock qui avait repris l’information de Chevallier en la confirmant. Après la mise en place progressive des accords de Bâle III l’effet de levier s’est réduit et aujourd’hui ceux-ci sont de 24/1 pour BNP, 23/1 pour SocGen et encore 49/1 pour Crédit Agricole si on prend en compte dans les 1600 milliards d’euros d’actif du groupe les 500 milliards de l’activité assurance et dans le cas contraire le levier n’est plus alors que de 33/1.

C’est certain que ça fait désordre quand on compare la santé de ces banques avec celle de leurs homologues américaines dont la moyenne de levier est de 17/1 et cela révèle également la grande fragilité des banques françaises soumises à une fiscalité outrageusement élevée en comparaison des autres établissements bancaires ou financiers européens ou américains. De plus les trois banques françaises totalisent une exposition de 490 milliards d’euros dans des pays européens dits à risque par ces analystes, soit 7 % de tous les actifs bancaires français ou en d’autres termes le quart du PIB de la France ! Combien ces banques détiennent de dette française et cette dette est-elle considérée comme à risque au même titre que celles de pays comme le Portugal, l’Espagne, l’Italie, la Grèce, Malte, la Slovénie ou d’autres pays de l’Union Européenne ? Mystère ! Les stress-tests n’ont pas l’air de prendre en compte les facteurs de risque et quand des blogueurs spécialisés se permettent de le faire ils sont poursuivis en justice.

C’est la chasse aux sorcières qui s’organise lentement pour museler tous ceux qui dérangent le système. En France, le délit d’opinion va devenir la règle comme en Corée du Nord. Internet va finir par être muselé alors qu’il constitue encore un espace de liberté jusque là inviolé (sauf par les services d’espionnage et en toute illégalité) et où il est encore possible d’émettre une opinion politiquement incorrecte, mais jusqu’à quand ?

L’avenir est de plus en plus sombre car ces révélations déplaisantes à propos des banques françaises cachent l’énorme iceberg de pertes et de prises de risque inconsidérées avec l’accord tacite des politiciens. Comme le dit H16, et je suis totalement en accord avec lui, ce pays est foutu ! 

Les prémisces d’une grave crise financière ?

Cette semaine passée fut riche en évènements qui sont passés inaperçus des Français, trop occupés par le Mali et son chef de guerre ou la loi sur le « mariage pour tous » et inaperçus des Espagnols trop occupés aussi par la corruption au plus haut de l’Etat et de la Royauté, ni des Italiens en pleine campagne électorale…

D’abord la banque Barclays est accusée de fraude, 5,3 milliards de livres tout de même (!), cette somme extravagante ayant transité au Qatar pour revenir à la City, un genre de magouille que les autorités financières de la City n’ont pas apprécié.

Puis le Crédit Agricole dont les erreurs de gestion sont flagrantes et qui accumule ainsi une ardoise cachée sous le tapis de la défaisance de seulement 14 milliards d’euros, c’est pas mal aussi.

En Grèce, c’est seulement 230 millions d’euros qui ont été dénichés illégalement. Il est vrai que les caisses de l’Etat sont pratiquement vides et que la fraude n’est plus vraiment possible à grande échelle.

Mais le plus surprenant est que même chez les Bataves, les Pays-Bas, un peuple pourtant réputé sage, sérieux et respectueux, tout d’un coup une banque (SNS Reaal) ou plutôt une institution de réassurance, comme vous voudrez, se trouve tout d’un coup et sans prévenir dans une situation tellement catastrophique qu’elle est immédiatement nationalisée en priant les actionnaires spoliés (on se croirait en Argentine ou au Vénézuela) de bien vouloir rester muets jusqu’à dorénavant et d’aller compter leurs sous ailleurs. On croit rêver au pays des tulipes.

En Italie c’est la plus vieille banque d’Europe, Monte dei Paschi di Siena qui encore une fois est sous le coup d’une investigation pour fraude, faux en écriture, manipulation frauduleuse des marchés et obstruction à la justice. Rien que ça !

Enfin, Deutsche Bank a reconnu, au moins son vice chairman, que les manipulations du Libor, scandale dans lequel cette banque est l’acteur central (avec Barclays) allait lui coûter « au moins » 2,5 milliards d’euros d’amende, pas mal non plus.

A part ça, tout va bien. Mais ces nouvelles navrantes, passées inaperçues, révèlent la vraie nature des banques, complètement shootées aux amphétamines que sont les billets tout nouvellement imprimés par la Banque Centrale Européenne, la Banque du Japon, la FED et la Banque d’Angleterre et même la Banque Nationale Suisse et qui ne trouvent rien de mieux que d’investir en bourse (les indices flambent et c’est bon pour eux, les banques, pas les indices) ou dans les obligations souveraines, encore qu’elles sont de moins en moins profitables. Non contentes d’exercer de temps à autre leur métier traditionnel d’investisseurs (le moins souvent possible à  l’évidence), les banques (too big to fail) se livrent à des activités mafieuses au delà de la limite légale, ça ne présage vraiment rien de bon surtout quand le paysage bancaire est inondé de liquidités. J’ai lu je ne sais plus dans quel journal (ou blog) que pour la première fois dans l’histoire de la finance on assistait à une collusion entre le pouvoir politique et le monde de la finance par le biais des banques centrales au point qu’il était impossible de prévoir quelle pourrait être l’évolution de la situation. Il y a vraiment du souci à se faire !

Sources : Wall Street Journal, Reuters, Bloomberg