Néonicotinoïdes et abeilles : l’ambiguïté persiste

Alors que j’avais alerté les lecteurs de mon blog sur les errements idéologiques du gouvernement français au sujet de l’interdiction des néonicotinoïdes pour la prévention des ravageurs sur les cultures de betterave sucrière en France (billets des 3 août et 1 octobre de cette année) ce gouvernement a accordé une autorisation spéciale aux producteurs de betteraves français après avoir pris conscience que la totalité de la filière risquait de disparaître. Je ne suis toujours pas certain que les députés, les sous-secrétaires d’Etat et autres conseillers de divers comités théodules gravitant autour du gouvernement aient pas pris conscience de la gravité de leurs décisions ni du caractère brouillon et irréfléchi de leurs décisions. Ont-ils fini par reconnaître qu’ils avaient commis une immense erreur qui les décrédibilise totalement non pas seulement auprès des « betteraviers » mais également auprès de l’opinion publique ?

Cette erreur est la conséquence d’une totale méconnaissance de l’agriculture dans son ensemble et en particulier de la culture des betteraves. Sous le faux prétexte que les néonicotinoïdes sont dangereux pour les abeilles pollinisatrices, j’y reviendrai, l’ignorance de tous les pitres qui gravitent autour des ministères est flagrante : les betteraves sont des plantes dont le cycle de croissance (ou de vie, comme vous voudrez) est de deux ans. La première année cette plante se consacre entièrement à une croissance végétative pour produire une racine riche en sucres. Elle ne fleurira que la seconde année si elle n’est pas arrachée pour la récolte. Voilà l’erreur du gouvernement dont la faculté de jugement a été obscurcie par des idéologues opposés à tout traitement chimique des cultures car cette pratique est préjudiciable à l’équilibre des écosystèmes. Dans le cas de la betterave à sucre de quel écosystème s’agit-il puisque la plante ne fleurit pas et ne peut donc pas attirer les insectes pollinisateurs dont les abeilles font partie ? L’utilisation des insecticides par les betteraviers est néanmoins vitale pour détruire les attaques de pucerons vecteurs du virus de la jaunisse ainsi que d’autres ravageurs comme certains coléoptères.

Les entomologistes étudiant les abeilles (Apis mellifera) ont certes reconnu que les insecticides tels que les néonicotinoïdes étaient toxiques pour ces insectes irremplaçables mais ils ont considérablement modéré leurs jugement après avoir découvert que les abeilles, comme l’homme, étaient sensibles à de nouvelles maladies émergentes, outre celles déjà identifiées comme le Varroa et l’Acarine. Ces spécialistes ont identifié ces dernières années pas moins de 12 virus différents mortels pour les abeilles. Le réservoir de certains de ces virus est le Varroa. La dernière invasion virale en date est le virus de la paralysie chronique de l’abeille (CBPV, Chronic Bee Paralysis Virus), un virus à ARN dont le réservoir semble être la fourmi. La progression de ce virus est constante en Europe depuis son apparition à la fin des années 2000, l’épicentre se situant, pour l’Europe, en Slovénie. Toutes les attaques virales dont sont victimes les abeilles tend à relativiser l’impact des insecticides, dont les néonicotinoïdes. Il faut donc raison garder mais la plus grande menace pour les abeilles reste paradoxalement la mondialisation de leur commerce. En effet, il existe des pays importateurs d’abeilles et les exportateurs répondant à la demande croissante sont malheureusement peu scrupuleux ou ne disposent pas des infrastructures pour vérifier l’état sanitaire des ruches exportées. Pour déterminer si une ruche est porteuse d’un virus il est nécessaire de faire appel aux derniers outils de la biologie moléculaire dont l’amplification du matériel génétique par RT-PCR qui permet d’obtenir un diagnostic rapide et non équivoque. Dans le cas de la Grèce, pays gros exportateur de ruches, les services vétérinaires sont inexistants ou très mal équipés pour ce genre de diagnostic. L’état sanitaire des abeilles devra à l’avenir être étroitement surveillé si on veut éviter des pandémies virales de l’abeille à l’échelle mondiale. Ça ne vous rappelle rien ?

Sources : diverses dont doi : 10.1038/s41467-020-1519-0

Histoire de bourdons et d’abeilles

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Dans le domaine de l’agriculture sous serre, les plantes nécessitant des insectes pollinisateurs posent quelques problèmes aux horticulteurs. C’est la raison pour laquelle il existe une grosse demande de la part de ces professionnels en particulier de bourdons pour polliniser les tomates cultivées sous serre. Or les bourdons semblent en voie d’extinction dans de nombreux pays dont en particulier au Canada et aux USA. Comme on pouvait s’y attendre les écologistes politiques, très friands de ce genre d’information, ont immédiatement accusé l’activité humaine, dont l’agriculture intensive détruit les biotopes naturels mais aussi les pesticides dont les néonicotinoïdes inscrits sur la liste noire de ces mêmes écologistes et enfin, on pouvait s’y attendre aussi, le réchauffement climatique.

Or il n’en est rien ! Au moins en Amérique du Nord et en Europe les bourdons sont dévastés non pas par tous les facteurs énumérés ci-dessus mais par les abeilles (Apis millifera) d’origine européenne, c’est-à-dire la grande majorité des abeilles utilisées quasiment industriellement pour polliniser les cultures en plein champ et accessoirement pour produire du miel. En effet ces abeilles dont ces mêmes écologistes ont déploré la disparition, sont porteuses de deux virus qu’elles transmettent aux bourdons lorsque ces deux espèces, d’ailleurs apparentées phylogénétiquement, butinent les même fleurs. Cette découverte réalisée à l’Université du Vermont est tout à fait inattendue et s’explique aisément.

Les abeilles sont de véritables animaux d’élevage au même titre que les poulets ou les porcs et elles ont accumulé au cours de cet « élevage » toutes sortes de microorganismes pathogènes et de parasites. Deux virus originaires des abeilles européennes se transmettent par ce processus de butinage commun vers les bourdons. Il s’agit du BQCV, ou Black Queen Cell Virus, qui attaque la pupe des reines et du DWV (Deformed Wing Virus) qui infecte aussi les abeilles et a pour effet de déformer les ailes de ces dernières, ce qui limite dramatiquement leurs performances de butinage. L’étude de cette transmission virale horizontale a été réalisée en identifiant la présence de ces virus dans les bourdons (Bombus bimaculatus ou B. vagans) oeuvrant près de ruches ou à plus d’un kilomètre de ruches d’Apis millifera d’origine européenne. Cette distance de un kilomètre est considérée comme une sécurité car le bourdon n’effectue jamais de vols aussi longs depuis son nid.

Lorsque les bourdons butinaient près d’un rucher infecté par l’un ou l’autre de ces deux virus (le plus souvent les deux) 75 % d’entre eux devenaient infectés par le BQCV et près de 10 % par le DWV en une saison. Or comme les producteurs de bourdons pour la pollinisation des plantes cultivées sous serre se fournissent en recherchant des nids de bourdons naturels, il est évident qu’ils devront prendre des précautions drastiques lors de leurs campagnes de prélèvements puis d’élevage car les bourdons infectés peuvent alors transmettre ces virus à d’autres bourdons et ainsi ruiner un élevage entier.

La conclusion de ce travail est évidente. Il ne faut pas tout de suite incriminer l’activité humaine pour des raisons idéologiques devant une telle situation encore que la domestication intensive des abeilles avec leur cortège de pathogènes puisse être le résultat indirect de cette activité humaine.

Source : https://doi.org/10.1371/journal.pone.0217822.t001 , illustration Wikipedia

La disparition des abeilles : mythe ou réalité ?

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Les 6, 20 et 29 février 2016 j’ai laissé trois billets sur ce blog relatifs à la maladie des colonies d’abeilles et il semble que, du moins aux USA, ce phénomène soit en voie d’atténuation significative. Selon les dernières statistiques du Département de l’agriculture américain (USDA) le nombre d’essaims actifs a augmenté de 3 % depuis le début de l’année 2017 soit une augmentation du nombre d’environ de 90000 ruches sur un total de 2,9 millions enregistrées auprès des autorités. Selon Tim May, vice-président de l’association nord-américaine des apiculteurs « pour sauver les abeilles il faudrait savoir exactement de quoi elles souffrent » (sic) … cela va de soi. Si les ruches meurent toujours car une colonie n’est pas éternelle leur disparition a diminué de plus de 60 % entre avril et juin de cette année par comparaison avec la même période de l’année 2016, toujours aux USA.

Les meilleures conditions adoptées par les apicultures sur recommandation de l’USDA pour dédoubler les ruches, leurs discussions avec les agriculteurs afin qu’ils n’utilisent pas de pesticides lors de la période critique d’essaimage et de dédoublement des colonies semblent avoir été un succès. Malgré ces efforts aux résultats encourageants, il reste toujours que 13 % des colonies meurent en raison de l’usage de ces pesticides, 12 % à la suite d’infestations avec des parasites autres que le varroa et enfin 4,3 % en raison d’autres maladies. Les principales causes de la mort des ruches restent toujours le mauvais temps, l’insuffisance de pollen pour les butineuses, le manque de nourriture à la fin de l’hiver et enfin et surtout les mauvaises pratiques d’élevage des apiculteurs eux-mêmes. La disparition des colonies d’abeilles deviendrait-elle un mauvais souvenir ? Selon le Docteur May Berenbaum, entomologiste à l’Université d’Illinois, les pesticides ont été peut-être un peu trop tôt incriminés pour masquer les mauvaises pratiques d’un grand nombre d’apiculteurs pour une raison assez simple à comprendre : près de la moitié des ruches américaines sont infestées par le varroa et les apiculteurs n’aiment pas trop reconnaître qu’ils ne connaissent pas leur métier ou plus simplement leur passe-temps. Belle démonstration d’un évènement monté en épingle par les défenseurs de l’environnement alors que les arguments scientifiques irréfutables d’une effet nocif des pesticides, en particulier des néonicotinoïdes, se font toujours attendre. En Europe la situation est sensiblement identique et ce n’est pas le moratoire décrété par les instances bruxelloises au sujet de l’utilisation des néonicotinoïdes qui y est pour quoi que ce soit. Il était politiquement correct d’interdire ces produits en vertu du détestable principe de précaution qui à l’évidence ne s’applique pas aux USA …

Source : Bloomberg, illustration : varroa (Wikipedia)

La mort des colonies d’abeilles revisitée

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On a dit tout et n’importe quoi sur la maladie qui frappe les abeilles et détruit les colonies. Certains sont même allé jusqu’à incriminer le réchauffement climatique global. Les pesticides ont aussi été accusés d’amplifier cette hécatombe, dont en particulier les néonicotinoïdes, en fragilisant les abeilles qui ne peuvent alors plus se défendre contre les attaques des varroas et d’autres pathogènes.

Des centaines d’équipes de zoologistes associés à des biologistes s’affairent pour tenter de trouver une explication rationelle à la maladie des rûches mais pas seulement en se penchant au chevet des abeilles car les bourdons, d’autres importants insectes pollinisateurs utilisés en particulier dans les cultures sous serre, sont aussi affectés par diverses maladies. La complexité de ce problème commence à être décortiquée à l’aide des techniques les plus modernes de la biologie moléculaire, je veux parler du séquençage de l’ADN et des ARNs. Car il est urgent de trouver une solution – si au final on y arrive – pour juguler cette hécatombe dont les retombées économiques sont immenses. Les bienfaits des insectes pollinisateurs et en particulier des abeilles sont évalués mondialement à plus de 175 milliards de dollars par an : il y donc bien une motivation économique qui rend ce problème urgentissime.

En février, lors de la floraison des amandiers en Californie, 60 % des rûches américaines sont transportées par camion dans la San Joaquim Valley. La Californie est le premier producteur mondial d’amandes, plus de 80 % des amandes du monde y sont produites et cet exode temporaire de rûches est le plus grand évènement de pollinisation au monde. Ce gigantesque mouvement de rûchers favorise la fragilisation des abeilles puisque près d’un tiers des colonies ne survivent pas à l’épreuve. L’une des raisons incriminées pour expliquer la mortalité des abeilles est justement une mauvaise gestion des rûches et des essaims par les apiculteurs eux-mêmes. Mais la principale raison de cet état de fait reste encore le varroa.

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Ce qui a intrigué les zoologistes est l’observation suivante : par comparaison aux colonies saines, celles qui montrent des signes de souffrance sont beaucoup plus affectées par des virus, parallèlement à la présence (ou non) de varroa et ceci indépendamment de tous les autres facteurs tels que l’environnement, la présence sur les lieux de butinage de pesticides ou encore de récents transports en camion pour amener les rûches sur les lieux de pollinisation. Il en est de même pour les colonies de bourdons. Les moyens d’investigation modernes de présence d’ADN et d’ARN et leur identification rapide a permis de montrer qu’une multitude de virus étaient responsables de la mort des colonies. Pour ne citer que quelques-uns d’entre eux, il s’agit pour la plupart de virus à ARN simple brin à lecture directe, par opposition aux « rétrovirus » dont la lecture se fait dans le sens 5′ vers 3′. Je passe sur les détails. Il s’agit du virus Israeli de paralysie sévère (IAPV), du virus Kashmir (KBV), du virus déformant les ailes (DWV), du virus Lake Sinai (LSV) mais aussi du virus Kakugo, du varroa destructor virus-1, du virus Sacbrood et enfin d’autres virus qui n’ont pas encore pu être classés taxonomiquement. Ça fait beaucoup et les spécialistes de la question ont tendance à émettre l’hypothèse que tous ces virus pathogènes pour les abeilles, pour beaucoup d’entre eux véhiculés par le varroa, se transmettent d’abeille à abeille par déglutition.

Chez les colonies atteintes par le varroa, la diversité virale est réduite à seulement deux ou trois types de virus, ce qui aurait tendance à montrer que le varroa ne transmet pas tous ces types de virus mais il reste encore à préciser ce point particulier. Les travaux actuels s’orientent vers une meilleure compréhension des mécanismes d’immunité des abeilles vis-à-vis d’une attaque virale. Il semble que le varroa affaiblit le système immunitaire des abeilles selon un processus encore inconnu. Ce qui est d’ors et déjà acquis est une modification du taux de petits ARNs inhibiteurs de la réplication des virus à ARN, l’un des mécanismes de défense des abeilles. La situation est plutôt compliquée par le fait que l’on ne dispose pas d’abeilles mutantes comme dans le cas de la drosophile (la mouche du vinaigre) qui est également susceptible à des attaques virales et chez laquelle il a été possible de préciser le rôle des petits ARNs inhibiteurs double-brin interférant avec la réplication virale. Enfin la production in vitro de ces virus est encore très difficile.

Les travaux de recherche dans le domaine de la mort des colonies d’abeilles s’orientent enfin vers les bactéries normalement présentes dans le tractus digestif des abeilles afin de déterminer l’interaction entre celles-ci et la défense immunitaire des abeilles. Toute une recherche malaisée en perspective, les enjeux économiques la justifient amplement.

Source : Plos pathogens, doi : 10.1371/journal.ppat.1005757

L’effet Allee et la résilience des colonies d’abeilles

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Pour les non-initiés, dont je fais partie pour de nombreux domaines de la science, il faut rappeler ce qu’est un effet Allee. J’ai découvert cet effet en lisant un article paru dans PlosOne au sujet du symptôme de disparition des colonies d’abeilles (voir le lien). Brièvement l’effet Allee, du nom du scientifique, écologiste et zoologiste de son métier, le Docteur Warder Clyde Allee (1885-1955) relie l’état de « santé » d’animaux sociaux avec leur population. Allee étudia durant toute sa carrière les bénéfices que pouvaient tirer des animaux en vivant en groupes plutôt qu’en solitaires. Il découvrit que la coopération entre individus d’un groupe était essentielle et bénéfique. L’effet Allee décrit la corrélation positive entre la densité de population d’une espèce animale quelconque et l’état de robustesse et de santé de cette population. L’effet Allee a été confirmé aussi bien avec les populations de suricates qu’avec les sardines. Par exemple si une population de suricates (ces drôles de mangoustes vivant dans la savane du sud de l’Afrique) n’est pas suffisamment nombreuse, trop d’individus seront occupés à surveiller les alentours par rapport à ceux qui rechercheront de la nourriture. Ce déséquilibre affectera les chances de survie du groupe. Ce dernier nécessite en effet pour sa prospérité et sa survie une coopération optimale de tous ses membres.

Dans le cas des colonies d’abeilles, il n’y a qu’une seule reine, des ouvrières qui s’occupent du couvain et des butineuses qui rapportent de la nourriture. La bonne santé et la survie d’une ruche, indépendamment de facteurs externes dont la disponibilité en nourriture, dépendent du nombre d’abeilles adultes. Ce paramètres n’a jamais été étudié en détail et l’article paru dans PlosOne le 24 février dernier apporte quelques éclaircissement sur son incidence dans la mortalité des ruchers.

Les insectes sociaux comme les abeilles ou encore les fourmis sont soumis à un effet Allee dit fort ou critique. En d’autres termes les performances de reproduction et de survie d’une ruche sont étroitement liées au nombre d’individus constituant la colonie et ce facteur démographique est essentiel. S’il y a trop peu de jeunes ouvrières pour s’occuper du couvain ou pas assez de butineuses la colonie est condamnée à mort. Dans les cas d’absolue nécessité des butineuses peuvent revenir vivre à l’intérieur de la ruche s’il n’y a pas assez d’ouvrières. L’aspect critique de la densité de population d’une ruche n’a pas été totalement exploré et c’est ce qui est exposé dans cet article.

La population d’une ruche doit se situer toujours entre deux limites : une limite inférieure assurant la stabilité de cette population et une limite supérieure qui favorise l’apparition d’une essaim fille qui va émigrer avec sa propre reine sans que la population restant dans la ruche n’ait atteint la limite basse critique. Les apiculteurs connaissent d’ailleurs très bien ce phénomène : une ruche qui essaime doit préserver une population suffisante pour assurer sa survie. Et ces mêmes apiculteurs n’ignorent pas que plus un essaim est robuste en terme de nombre d’individus plus il a de chance de prospérer ultérieurement.

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Le modèle appliquant l’effet Allee à la population d’une ruche est assez clair et dépend étroitement de l’équilibre à un instant t entre le nombre de jeunes ouvrières et la mortalité des butineuses. Pour que l’effet de la mortalité sur l’évolution de la population soit nul il faut que la ruche comprenne au moins 20000 abeilles. Dans la figure ci-dessous l’apparition de nouvelles ouvrières, en trait plein, doit toujours être supérieure à la mortalité (pointillés). On retrouve le point inférieur d’instabilité mortelle pour la ruche – moins de 1500 individus – et le point supérieur de stabilité autorisant un essaimage.

L’ordonnée du graphe représente le nombre de nouvelles ouvrières nécessaires par individu existant, ouvrières et butineuses, pour maintenir la population stable, si j’ai bien compris le sens de l’article. Il résulte de ce modèle appliquant l’effet Allee fort que cet effet a des conséquences critiques sur la résilience d’une colonie aux facteurs externes introduisant une perturbation de la mortalité naturelle. La mort des colonies d’abeilles est un fait reconnu et multifactoriel mais elle dépend aussi de ce qu’on pourrait appeler la prospérité de cette colonie en nombre d’individus.

Les curieux peuvent se plonger dans cet article, certes très théorique mais fort bien documenté et en accès libre.

Sources : https://en.wikipedia.org/wiki/Allee_effect et doi:10.1371/journal.pone.0150055.g001

La mortalité des abeilles : un lointain souvenir ?

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J’ai écrit dans ce blog plusieurs billets sur les malheurs des abeilles depuis le 16 janvier 2013 et l’inquiétante mortalité des colonies. Vous pouvez retrouver tous ces billets en effectuant une recherche avec l’onglet situé en haut et à droite de la page. Le dernier en date relate les « zombees » parasitées par une minuscule mouche qui pond un oeuf dans l’abdomen de l’abeille avec un ovipositeur spécialisé. L’une des conclusions qu’on pouvait entrevoir de la volumineuse presse scientifique au sujet du mal des colonies d’abeilles est qu’il s’agit d’un phénomène multifactoriel, les pesticides n’étant que l’un de ces facteurs. Depuis deux ans les néonicotinoïdes, accusés de décimer les ruchers, ont été interdits en Europe et aux dernières nouvelles il n’y a pas eu d’amélioration notable de l’état sanitaire des ruches. Devant ces observations déroutantes certaines personnes ont eu l’audace d’incriminer le changement du climat comme une des causes de la mortalité des abeilles.

Mais que se passe-t-il aux USA ? Sans qu’aucune restriction n’ait été imposée au sujet de l’utilisation de pesticides, en particulier les néonicotinoïdes, depuis 2006 le nombre de ruches n’a cessé d’augmenter, passant d’un plus bas de 2,4 millions à maintenant 2,7 millions de ruches dûment répertoriées. On est encore loin des 3,7 millions de la fin des années 80 mais la tendance est au repeuplement. C’est un peu un pavé dans la mare des alarmistes qui revendiquent haut et fort un monde sans produits chimiques et un retour à la nature primordiale telle qu’en rêvait Rousseau, pas le douanier mais l’exécrable pseudo-philosophe dont l’idéologie est encore encensée par les néo-écologistes. Et ce pavé a été lancé par le Washington Post non pas hier matin mais le 23 juillet dernier. Naturellement l’information a été soigneusement occultée, en particulier en Europe, sur ordre des gouvernements et de la Commission Européenne pourris de l’intérieur par les mouvements écologistes.

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Certes le Washington Post n’a pas pour réputation d’abonder dans le sens des mouvements écologistes, mais cet article relate des faits incontestables. Ces mouvements écolos clament que chaque année 30 % des ruchers disparaissent. À ce rythme-là il y a belle lurette qu’il n’y aurait plus une seule abeille tant en Amérique du Nord qu’en Europe ou encore en Chine. Comme on peut le constater ce n’est pas le cas. Aux USA, les producteurs, par exemple d’amandes ou de pommes, payent les apiculteurs pour qu’ils viennent entreposer leurs ruches au moment de la floraison près des vergers. Comme cette sorte de transaction commerciale est répertoriée auprès de l’USDA, on peut suivre presque en temps réel le mouvement des ruches sur tout le territoire américain. D’autre part, compte tenu de l’impact de la pollinisation par les abeilles sur la production agricole, tout a été organisé pour optimiser la production d’essaims et de reines : n’importe quel apiculteur peut trouver sur le marché un essaim avec une reine pour la somme de 100 dollars. Les abeilles sont contrôlées sur le plan sanitaire et l’apiculteur a l’obligation de déclarer aux autorités sanitaires compétentes toute maladie apparaissant dans ses ruches.

Depuis 2006 le prix du miel a doublé comme a également doublé le prix de la pollinisation. C’est un business incontournable quand on le met en face de ce que cette pollinisation rapporte au secteur agricole : 15 milliards de dollars par an !

Qu’en est-il dans les autres pays, en particulier en Europe ? J’espère que mes lecteurs m’apporteront quelques éléments de réponse …

Source et illustrations : The Washington Post du 23 juillet 2015. Les abeilles : de parfaites capitalistes, industrieuses, efficaces, obsédées dans leur recherche du succès …

Les Zom-bees ou abeilles zombies …

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L’un des romans les plus fameux de Philip Roth est titré en français « La Couleur du Mensonge », en anglais « The Human Stain », dont Robert Benton réalisa un film remarquable mettant en scène l’inoubliable Anthony Hopkins aux côtés de Nicole Kidman et de Gary Sinise en 2003. Ce film extraordinairement réaliste n’a pas perdu une once de son intensité avec les années. Le mot de trop fut « zombie » qu’utilisa Coleman Silk (Anthony Hopkins), Professeur et Chairman de l’Université de Nouvelle-Angleterre où il sévissait comme professeur de lettres classiques, pour qualifier les élèves inscrits mais jamais présents à ses cours précipita sa chute et sa disgrâce. On l’accusa de racisme envers les étudiants de couleur car le mot zombie a une toute autre signification dans le Sud des Etats-Unis.

Ce petit rappel cinématographique et littéraire pour introduire les abeilles zombies ou « zom-bees ».

Les ruches, comme chacun sait sont ravagées par toutes sortes de parasites dont le varoa, champignons microscopiques, bactéries et autres virus de par le monde. Comme si cela ne suffisait pas elles subissent les pesticides dévastateurs qu’utilisent les agriculteurs pour se débarrasser des insectes ravageurs qui ne sont nullement spécifiques d’un insecte particulier mais sont dommageables pour les abeilles qui n’ont jamais été classées parmi les ravageurs, bien au contraire. L’histoire des abeilles zombies se passe aux Etats-Unis et a été découverte par un pur effet du hasard par un résident des environs de San Francisco qui découvrit que des abeilles avaient élu domicile dans l’épaisseur du mur de sa maison. Le Docteur John Hafernik, entomologiste de son métier à l’Université de Californie à San Francisco, ne se précipita pas sur son téléphone pour appeler les pompiers comme le lui suggérait son épouse mais imagina une petite expérience consistant à installer à la nuit tombée un petit piège autour de l’orifice d’où entraient et sortaient les abeilles au cours de la journée pour éventuellement les étudier ultérieurement. Comme les abeilles ne peuvent se diriger qu’à la lumière du jour en analysant les diverses longueurs d’onde lumineuses polarisées réfléchies par les objets, dont les fleurs, depuis le proche ultra-violet et dans tout le spectre visible, John fut étonné de constater que des abeilles désorientées sortaient de leur « nid » mural au milieu de la nuit, attirées par la faible lueur de la lanterne de la terrasse de sa maison. Il captura ces abeilles qui ne lui semblaient pas en parfaite santé et de surcroit, ce qui lui fit comprendre qu’il se passait quelque chose de vraiment anormal était que les abeilles sortaient en pleine nuit malgré le froid d’un mois de janvier. Plus encore, le lendemain matin, il retrouva son petit piège rempli de près de 100 abeilles mortes.

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Comme tout scientifique curieux il mit les abeilles dans une boite en plastique pour les examiner ultérieurement. À sa grande surprise, après une semaine (il avait oublié la boite dans son garage) il constata que des cocons rougeâtres étaient disséminés autour des abeilles mortes. Très professionnellement il confia cette découverte fortuite à ses collaborateurs et ces derniers identifièrent une mouche d’à peine deux millimètres de long, l’Apocephalus borealis qui avait imaginé la redoutable stratégie d’infester la totalité d’une ruche en quelques mois ! Après avoir pondu un oeuf dans l’abdomen d’une abeille ouvrière à l’aide d’un genre de dard appelé ovipositeur, la mouche ne se contente pas d’une seule abeille mais continue son travail destructeur jusqu’à épuisement de ses oeufs. Il faut ensuite environ un mois pour que les « asticots » sortent du corps de l’abeille morte tombée au fond de la ruche pour que le cycle recommence, pupe, métamorphose puis une nouvelle génération de mouches … On comprend aisément que ce parasite d’un nouveau genre rende les abeilles complètement désorientées, des zombies ou « zom-bees » quelques instants avant leur mort, s’activant au milieu de la nuit en s’échappant de la ruche pour éventuellement sauver ce qui reste de leur famille, en particulier la reine, dans un réflexe de désespoir.

L’apocephalus est maintenant sous haute surveillance grâce à un site spécialisé à l’intention des apiculteurs amateurs et professionnels mis en place par le Docteur Hafernik ( https://zombeewatch.org ).

Source The Atlantic et PlosOne ( 10.1371/journal.pone.0029639 ). Illustrations PlosOne

Et si on reparlait des insectes pollinisateurs, des pesticides et des produits « bio » ?

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En cherchant bien dans la littérature scientifique on retrouve parfois des travaux sciemment passés sous silence parce qu’ils dérangent certains groupes de pression que je ne nommerai pas alors que la polémique sur l’usage des insecticides de la famille des néonicotinoïdes n’est pas éteinte, loin de là. Un moratoire est toujours en vigueur en Europe pour préserver les insectes pollinisateurs dont les abeilles en particulier. Difficile de prendre position pour ou contre l’usage de cette famille d’insecticides extraordinairement puissants puisqu’ils sont appliqués aux plantes par enrobage des semences à des doses globales correspondants à quelques grammes par hectare. Ils ont une action systémique, en d’autres termes ils pénètrent dans la plante et se retrouvent dans les tiges et les feuilles et les insectes et autres champignons ravageurs suceurs de sève sont exterminés quand ils se nourrissent. Au cours de la croissance de la plante, le produit se dilue, c’est facile à comprendre, et sa présence dans le pollen, le nectar ou les graines de la plante en fin de croissance est pratiquement indécelable. La controverse est donc de ce fait plutôt mal engagée. Certaines études ont, certes, montré que les abeilles étaient fragilisées par les néonicotinoïdes mais les conclusions sont également controversées car les travaux n’ont pas été réalisés dans les conditions normales de la bonne pratique des cultures.

L’autre volet également sujet à caution et alimenté à grands renforts de campagnes terrorisantes et culpabilisatrices de la part de ces mêmes groupes d’activistes anti-pesticides en tous genres est l’émergence des produits dits « bio » qui ont catalysé un gigantesque business dans lequel beaucoup d’acteurs peu scrupuleux ou pas scrupuleux du tout se sont précipité : la peur est le support d’un marché juteux, c’est bien connu ! Pourtant la réalité est tout autre. Dans un article d’anthologie publié dans les PNAS en juillet 1990 le Docteur Bruce Ames et ses collaborateurs de l’Université de Berkeley ont relativisé l’importance des pesticides de synthèse mais pratiquement personne n’a jamais osé citer cet article car il est un tant soit peu anti-conformiste et particulièrement effrayant.

Ames et ses collaborateurs ont calculé que 99,99 % des pesticides que l’on est susceptible d’ingérer en mangeant une tomate ou en buvant un café sont naturels !

En effet, lorsque les plantes sont attaquées par un ravageur elles se défendent en synthétisant des produits dangereux voire très dangereux sinon mortels et ces produits sont présents dans les plantes avant même qu’un insecte ait entrepris de se nourrir de sève, qu’un champignon ait commencé à s’infiltrer dans les tissus végétaux ou qu’une bactérie puisse commencer ses ravages. Quant aux animaux, les plantes ont également mis au point des produits chimiques dissuasifs au goût amer, malodorant ou acide. Bref, l’équipe de Ames a répertorié des centaines de composés chimiques d’origine végétale presque tous toxiques ou cancérigènes qu’on retrouve dans des légumes ou des fruits de consommation courante comme le chou, la pomme de terre, la tomate ou le café ! Par exemple dans deux tasses de café il y a 765 mg d’acide chlorogénique. Ce produit peut endommager la rétine et est un carcinogène reconnu chez les souris et les rats. Même le café « bio » en contient, cela va de soi. Un autre produit puissamment cancérigène est le 5-/8-methoxypsoralene qu’on trouve notamment dans le céleri, le persil et les figues, que ces plantes soient « bio » ou non, naturellement. Vous en voulez encore ? L’estragole ou para-allylanisole est un autre puissant carcinogène et on le trouve dans le basilic, l’aneth ou encore l’estragon. Je ne peux pas résister à citer la sinigrine, un glucoside présent dans toutes les brassicacées dont le chou, de Bruxelles ou de « chez nous », le brocoli, le raifort, le navet mais aussi la moutarde noire. Si on coupe un navet en tranches il se défend immédiatement en modifiant la sinigrine et il apparaît alors de l’isothiocyanate d’allyle qui confère leur goût caractéristique à la moutarde ou au wasabi (illustration ci-dessus) mais il présente aussi un effet lacrymogène presque immédiat si on abuse de ces condiments. En lui-même l’isothiocyanate d’allyle est un insecticide qui agit en coupant les chromosomes, ça fait peur, mais quand il est dégradé dans le tube digestif apparaît alors de l’allylamine qui est irritante pour la peau. Si on relativise la situation, on peut dire que quand on mange des fruits ou des légumes « bio » ou non, de tous les pesticides naturels ou non qu’on s’administre, sans le plus souvent le savoir en mangeant, ceux-ci se répartissent ainsi : 0,09 mg de pesticides synthétiques pour environ 1,5 g de pesticides naturels ! Parmi 52 pesticides naturels bien documentés, il y a 7 toxines qu’on retrouve dans pratiquement tous les champignons et qui sont classées à part, 27 sont des carcinogènes reconnus chez la souris à fortes doses, et les autres ont tendance à faire apparaître des radicaux libres favorisant des processus d’oxydation pouvant mettre la santé en danger. C’est d’ailleurs le plus souvent leur mode d’action dans le processus de défense de la plante. Fort heureusement les légumes et les fruits contiennent bien d’autres composés bénéfiques pour la santé humaine et animale qui estompent la présence de ces produits pourtant potentiellement bien plus dangereux que les pesticides de synthèse car ils sont beaucoup plus abondants naturellement.

Pour en revenir aux insectes pollinisateurs, les quantités tant de pesticides naturels que de pesticides de synthèse dans le pollen sont infinitésimales et la nature semble avoir bien fait les choses puisqu’elle a justement besoin de ces insectes pour sa survie. Les bonnes pratiques agricoles interdisent tout épandage d’insecticides lors de la floraison et sans vouloir prendre la défense des néonicotinoïdes qui soit dit en passant sont des dérivés de la nicotine, elle-même un puissant insecticide, le fait qu’ils soient systémiques rend peu probable leur présence dans le pollen ou le nectar des fleurs et donc leur implication dans l’hécatombe des ruchers. Il faut néanmoins, au risque de déplaire à certains, rappeler qu’entre 1960 et 2011 le nombre de ruches est passé dans le monde de 50 à 80 millions (source FAO). Où est cette disparition qu’on ressasse sans arrêt dans les médias ? Malgré l’introduction des néonicotinoïdes le nombre de colonies d’abeilles est resté stable aux USA ces dix dernières années (source USDA), où est la disparition ? Les statistiques canadiennes font état d’une augmentation de 501000 à 672000 ruches ces vingt dernières années, où est la disparition ? En Australie, pays exempt de varroa, malgré l’usage de néonicotinoïdes la population d’abeilles n’a pas décliné depuis le milieu des années 90 (source Université du Queensland à Brisbane), où est la disparition des abeilles dont les néonicotinoïdes sont supposés être la cause ? Quant à l’Europe permettez-moi de contester les données statistiques sur les ruchers car comme chacun sait ces données sont truquées sciemment par des groupes de pression que je ne nommerai pas non plus.

Source : PNAS Vol.87, pp. 7777-7781, Octobre 1990, disponible dans PubMed, illustration : racines de Wasabi ou raifort japonais

L’abeille au secours de l’humanité ? Doublement …

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On a attribué à Einstein, peut-être à tort, cette déclaration : « Si les abeilles disparaissent de la surface de la Terre, il ne restera à l’homme plus que quatre années à vivre. Plus d’abeilles, plus de pollinisation … plus d’êtres humains ! ». On considère en effet que plus de 65 % des cultures vivrières nécessitent des insectes pollinisateurs représentant un chiffre d’affaire mondial de plus de 200 milliards de dollars. La recherche dans le domaine de la santé des abeilles est donc très active et on a pu montrer ces dernières années que toute une série d’agents pathogènes étroitement associés les uns aux autres contribuaient à la mort des abeilles. Outre le varroa, bien connu des apiculteurs, il y a aussi des virus, des bactéries et des moisissures qui sont transmis par le varroa et entre abeilles. On a également incriminé les insecticides et leur usage intempestif comme les néonicotinoïdes qui affaiblissent les abeilles et les rendent plus vulnérables aux autres agents énumérés ci-dessus. Bref, la prédiction apocalyptique des conséquences de la disparition des abeilles pourrait devenir réalité. Si on ajoute à ce tableau peu réjouissant l’usage également intempestif des antibiotiques par les êtres humains pour leur propre santé, l’apparition de bactéries multirésistantes pourrait également contribuer à la disparition de l’humanité.

Or relativement peu de bactéries sont pathogènes pour les abeilles et il est connu depuis des temps immémoriaux que le miel présente des propriétés antimicrobiennes. Il est bien connu aussi qu’on peut soigner certaines infections bucco-pharyngées avec du miel. La pharmacopée traditionnelle utilise aussi le miel pour soigner les infections des plaies ulcérantes réfractaires à tous les antibiotiques que l’on classe maintenant dans la catégories des infections nosocomiales. Cette observation a conduit une équipe spécialisée dans la biologie des abeilles de l’Université de Lund en Suède dirigée par le Docteur Alejandra Vasquez à tenter de comprendre pourquoi le miel présente des propriétés antibiotiques avérées. La capacité des abeilles à se protéger relativement bien contre les attaques bactériennes pouvait faire penser que le miel en lui-même était un antibactérien. Or il est bien connu que le miel est généralement acide et contient toute une série d’acides organiques dont l’acide gluconique représentant jusqu’à 1 % en poids et ces constituants mineurs étaient attribués au processus de digestion du miel par l’abeille puisqu’en définitive le miel est régurgité par l’insecte. L’équipe de l’Université de Lund s’est donc particulièrement intéressée à la flore bactérienne symbiotique du tube digestif de l’abeille (illustration ci-dessus : lactobacilles dans l’estomac d’une abeille).

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Dans un premier temps un certain nombre de bactéries jamais décrites appartenant aux familles des lactobacilles et des bifido-bactéries ont été identifiées, isolées et caractérisées. En utilisant la technique classique des antibiogrammes (voir l’illustration, Wikipedia), toutes ces bactéries ont présenté de fortes propriétés antibiotiques à large spectre y compris avec des souches pathogène redoutables et résistantes à tous les antibiotiques connus comme des staphylocoques résistants à la méticilline ou des entérobactéries multirésistantes ou encore des Pseudomonas ainsi que la levure Candida albicans responsable de redoutables candidoses.

Restait à déterminer quels composés chimiques étaient excrétés par ces bactéries du système digestif de l’abeille. La surprise a été d’identifier des molécules chimiques relativement simples comme des hydrocarbures à chaine courte possédant une fonction alcool ou cétone ou des acides gras également à chaine courte avec une fonction alcool comme l’acide 3-hydroxy décanoïque. Ces métabolites sont également présents dans le miel en quantités loin d’être négligeables à condition toutefois que le miel soit fraîchement collecté ce qui est d’ailleurs préconisé en médecine traditionnelle pour soigner les plaies ulcérantes. Enfin, ces bactéries produisent des petites protéines dont les propriétés antibiotiques sont en cours d’étude.

Ces résultats indiquent donc que le miel présente bien des propriétés antibiotiques malgré les études controversées ou mises en doute notamment par Cochrane Collaboration. Ces propriétés proviennent donc de la flore bactérienne présente dans l’estomac des abeilles qui participe à la digestion du pollen. Une piste nouvelle pour de nouveaux antibiotiques ? Peut-être, tous les espoirs sont permis.

Sources : DOI: 10.1111/iwj.12345 et DOI:10.1371/journal.pone.0033188 (open access) et d’autres articles aimablement communiqués par le Docteur Alejandra Vasquez à la disposition de mes lecteurs.

Serait-ce un premier signe du refroidissement climatique ?

Je laisse mes lecteurs apprécier le contenu de cette dépêche d’agence qui ne nécessite aucun commentaire autre que la teneur du titre …

 

 

Les abeilles meurent davantage au nord de l’Europe qu’au sud

Le déclin des abeilles est nettement plus important dans les pays du nord de l’Union européenne qu’au sud, souligne une cartographie inédite publiée lundi à Bruxelles. Belgique et Grande-Bretagne sont les pays les plus touchés. L’étude « Epilobee » est la première à comparer l’état de santé des ruchers dans 17 pays de l’Union européenne grâce à l’utilisation de « critères harmonisés » pour mesurer le taux de mortalité des abeilles domestiques, a expliqué Gilles Salvat, directeur de la santé animale à l’Agence française de sécurité sanitaire (Anses). L’étude se base sur les observations de 1350 inspecteurs, qui ont visité à trois reprises (automne 2012, printemps 2013, été 2013) quelque 31’800 colonies d’abeilles dans 3300 ruchers.

Un tiers d’abeilles meurent en Belgique

Pour la mortalité en hiver, période où les abeilles meurent le plus, le nord de l’Europe apparaît le plus touché. La mortalité y dépasse ainsi régulièrement les 20%, avec 33,6% en Belgique, 28,8% au Royaume Uni, 28,7% en Suède et plus de 23% en Estonie et en Finlande. Au sud, le taux reste dans plusieurs pays en-deçà de 10%, considéré comme une mortalité « normale », comme en Italie (5,3%), en Grèce (6,6%) ou en Espagne (9,5%). La France (14,1%), l’Allemagne (13,6%) ou la Pologne (14,8%) se situent à un niveau intermédiaire. Lors de la saison de production de miel, entre le printemps et l’été, la mortalité des abeilles est globalement moins importante qu’en hiver. Avec une exception en France, où le taux atteint 13,6%, ce qui en fait le seul des 27 pays étudiés avec une mortalité supérieure à 10% à cette période-clé. La production de miel a diminué en France de moitié entre 1995 et 2013 malgré un nombre de ruches similaire.

Aggravation moins nette que prévu

Les pesticides ont été écartés du champ de l’étude pour des raisons « techniques », plusieurs laboratoires européens associés aux travaux n’ayant pas forcément les capacités de mener ces analyses, assure-t-on à l’Anses. L’étude, financée par la Commission européenne, doit être reconduite cette année.

(ats / 07.04.2014 21h48)

Pour rappel : https://jacqueshenry.wordpress.com/2014/02/02/un-virus-des-plantes-pathogene-pour-les-abeilles-du-jamais-vu/