Chronique tokyoïte # 11

Malgré le fait que les forces d’autodéfense japonaises aient fini par céder aux Américains en installant deux batteries de missiles patriot à l’intérieur du périmètre de leur commandement, à deux pas d’Akebonobashi et près de Shinjuku, il ne faut pas croire que Tokyo ressente quelque fièvre belliqueuse que ce soit. Le fils de l’empereur s’occupe de ses papillons et pour le reste des citoyens, comme je le disais dans un précédent billet c’est le « business as usual ». Il y a même des touristes à Ginza, le quartier huppé de Tokyo le jour et plutôt chaud la nuit, mais c’est une autre histoire. Je voulais parler aujourd’hui des horaires de travail des Japonais et des Japonaises. Les « salary men » et les « office ladies » travaillent en théorie à peine plus que n’importe quel français, à la seule différence que certaines entreprises considèrent que les heures supplémentaires sont tout simplement pas rémunérées et d’autres tolèrent des heures supplémentaires déclarées jusqu’à une certaine limite, une manière de compenser les bas salaires selon un artifice tout à fait légal. Le samedi est un jour ouvrable comme les autres. Le dimanche semble aussi être un jour comme les autres jours de la semaine puisque les postiers distribuent le courrier et les livreurs ce qu’on a acheté la veille, les tokyoïtes ne s’encombrent pas de gros paquet dans les trains ou les métros. Il y a au Japon une vingtaine de jours fériés et un bon nombre de salariés considèrent que ces vingt jours leur suffisent, ils ne prennent donc pas de vacances. Les grands groupes industriels et manufacturiers exigent tout de même une à deux semaines de vacances de tous leurs employés pour effectuer des opérations de maintenance sur les sites industriels. Les Japonais accumulent des jours de congé virtuels pour pouvoir continuer à percevoir un plein salaire de leur employeur en cas d’arrêt de maladie prolongé et ce crédit de jours de congés payés n’est pas cumulable au delà d’une certaine durée et s’ils ne sont pas utilisés, en d’autres termes si on n’est pas malade durablement, une semaine ou un mois, ces jours de congé accumulés sont tout simplement perdus et dans le fonction publique il en serait de même. Quand on m’a informé de cette sorte de coutume, j’ai tout de suite repensé à la suppression de la journée de carence pour les fonctionnaires. Imaginons que les RTT, une usine à gaz très franco-française issue des 35 heures de Martine, soient utilisées pour les congés de maladie de quelque durée que ce soit, ce serait un bon début pour responsabiliser les employés qu’ils soient du public ou du secteur privé. Mais quel ministre, même plein de bonnes intentions serait capable de proposer un tel changement dans les « avantages acquis » si âprement défendus par des syndicats marxisants déconnectés des réalités du XXIe siècle ? Quand le système de protection sociale se déclarera en faillite, ce qui est déjà le cas, peut-être que de tels changements seront envisagés … 

C’est toujours une question de dates !

 

Quand on est en plein hiver, on sait qu’au mieux la fin du mois de mars verra les frimas reculer au nord de l’Europe et qu’au même moment le blé sortira de terre et le colza et les amandiers fleuriront. C’est lié à la rotation de la terre autour du soleil avec bizarrement son axe de rotation incliné par rapport à son orbite.

En politique, la France a décidé d’une rotation de cinq ans avec un axe de rotation penché à gauche et une demi-saison ponctuée par des élections municipales et européennes, si j’ai bonne mémoire. Tant qu’à faire, puisque le printemps arrivera bien un jour, les politiciens au pouvoir jouent sur les dates pour atteindre leurs objectifs, ces objectifs qu’ils avaient promis à leurs électeurs pour tout de suite. Par exemple, le non-cumul des mandats (contre lequel la gauche alors dans l’opposition avait voté contre) annoncé par le candidat à la Présidence ne se concrétisera finalement qu’en 2017, et pour cause : pour se plier à une telle loi, nos politiciens, de droite comme de gauche, devront accepter en premier lieu une diminution drastique de leurs émoluments et ensuite perdre éventuellement les sièges qu’ils abandonneront à l’occasion d’élections partielles, le mécontentement étant tellement criant qu’ils risqueraient de perdre beaucoup de plumes si le Marquis de l’Elysée décidait in fine de faire passer cette loi (il ne la fera pas passer, il n’en est plus à un désaveu près). Donc le non-cumul est repoussé à 2017 mais encore faudra-t-il que les politiciens renoncent courageusement à tous leurs avantages car après tout ils décident pour eux-mêmes et se moquent dans ce cas de figure de leurs électeurs.

Pour le retour à l’équilibre budgétaire, le jeu des dates est carrément caricatural. Le Ministre du budget persistait et signait encore il y a quelques jours que la croissance serait au rendez-vous en 2013, une croissance du genre 0,8 % qui ne sera jamais atteinte contrairement à ce que prévoit l’INSEE, prévision infirmée par Eurostat. Mais le même Ministre continue son persiflage et a repoussé le retour à l’équilibre pour 2017 et le cap fatidique des 3 %, au fait, mais c’est  pour quand ? Je n’ai pas trop saisi, 2015 ? donc après les municipales, bon, prenons acte !

Et la réduction des dépenses de l’Etat, probablement aussi pour 2017, au point où on en est ça paraît plausible. Et je passe sur les retraites, les 35 heures, cette loi inique décidée par Martine Aubry entre deux soirées copieusement arrosées. Tout le monde s’accorde pour dire que cette histoire des 35 heures est un fiasco total, je me reprends, sauf la CGT qui défend le 4/8, une organisation du travail qui mathématiquement oblige les salariés à ne rien faire 60 % de leur temps pour faire semblant de travailler 35 heures par semaine tout en gagnant autant que s’ils travaillaient 39 heures. Avouez tout de même qu’on est en plein délire. On peut continuer dans ce registre avec l’inflexion de la courbe du chômage promise pour la fin de l’année 2013. Là encore ça tient du rêve, la dure réalité sera toute autre : mécaniquement, les mesures fiscales décidées par l’équipe au pouvoir ne peuvent résulter qu’en une aggravation explosive du chômage. L’emploi pourrait peut-être reprendre, disons vers 2015 mais bien plus surement en 2017.

Donc, pour conclure avec cette série de dates et de chiffres, tout sera repoussé en 2017, à moins qu’il y ait des élections présidentielles anticipées, ce qui remettrait alors tout en cause.

Bon week-end. 

Le printemps sera chaud !

Un chef du parti de Merkel traite la France d’enfant à problèmes de l’euro

BERLIN – Les Français doivent supprimer les 35 heures et repousser l’âge de la retraite, a affirmé vendredi un responsable du parti conservateur de la chancelière allemande, Angela Merkel, dans une interview où il a qualifié la France d’enfant à problèmes de la zone euro.

Les Français doivent faire des économies pour gagner des marges de manoeuvre. Ils doivent aussi naturellement faire des réformes économiques, a déclaré à la radio publique Deutschlandfunk, Michael Fuchs, vice-président du groupe de la CDU (Union chrétienne-démocrate) au Bundestag (chambre basse du Parlement).

Il s’exprimait avant la publication par Bruxelles de ses prévisions pour 2013 officialisant un dérapage du déficit public français au-delà de la limite fixée à 3% du Produit intérieur brut qui irrite notoirement les responsables du gouvernement allemand.

Les Français doivent modifier le temps de travail. Vous savez que les Français ont encore les 35 heures. Cela ne peut pas fonctionner quand on travaille 42 heures en Suisse et 40 heures en Allemagne, a-t-il dit.

En matière de retraites, les Français ont tout faux. On ne peut pas partir à la retraite à 60 ans. Cela ne fonctionne pas. Les Français doivent y réfléchir, a-t-il ajouté.

Malheureusement, la France est un enfant à problèmes dans l’euro, car d’autres pays ont rempli leurs obligations de façon beaucoup plus intensive, comme l’Espagne et aussi l’Italie sous Monti, a lancé M. Fuchs. Les Français ont cru qu’ils pouvaient y échapper. Cela ne marchera pas.

Il est nécessaire que les Français empruntent à nouveau la voie de la vertu. Tout ce que nous avons accompli avec l’agenda 2010 –les réformes du système social et du marché du travail mises en oeuvre entre 2003 et 2005 par le chancelier Gerhard Schröder, ndlr– , les Français doivent le mettre en oeuvre. J’espère que Hollande a compris cela, a-t-il ajouté.

Interrogé vendredi sur les dérapages des déficits publics français au cours d’une conférence de presse ordinaire, un porte-parole de la chancelière a refusé de commenter les chiffres de Bruxelles.

Ce n’est pas au gouvernement allemand de juger, mais à la Commission (européenne) qui discute avec chaque Etat de la voie à emprunter pour réduire la dette, a déclaré le porte-parole, Steffen Seibert.

La confiance en Europe doit se gagner par le fait que les Etats remplissent leurs obligations (…) c’est-à-dire empruntent la voie de la stabilité, de finances durables, a-t-il dit.

La chancelière a toujours dit clairement que, selon elle, la crise n’était pas finie (…) Il y a encore beaucoup d’efforts à faire, a-t-il conclu.

La question du dépassement des 3% de déficit public par la France empoisonne les relations entre Paris et Berlin depuis l’automne dernier. La France plaide en faveur de davantage de souplesse dans la réduction des déficits par crainte de plomber la croissance déjà en berne en Europe.

L’Allemagne souhaite que la France consente à faire des efforts supplémentaires, louant les politiques récentes menées par l’Espagne et l’Italie en matière de compétitivité par la baisse du coût du travail.




(©AFP / 22 février 2013 16h29)

Après le « press release » de Markit hier (voir mon billet à ce sujet), tout va bien. D’autant mieux que Hollande est en froid avec Madame Merkel qui s’est rapprochée de Cameron dans sa manière d’appréhender le budget européen, en un mot Hollande est de plus en plus isolé sur la scène européenne car il a perdu toute crédibilité. Et quand on lit la presse nord-américaine, il est difficile de ne pas rire (presque) aux éclats, et pourtant l’heure n’est pas aux réjouissances. Monsieur le Marquis de l’Elysée, le printemps sera chaud … Il n’est même pas nécessaire de prendre une loupe pour comprendre que la France plonge littéralement dans la récession qui va être bien plus dévastatrice que celle qui a frappé la France après la chute de Lehman-Brothers en 2008.

 

france PMI 2013-02-21

 

Source : Markit