Nouvelles du Japon : Le mix énergétique électrique japonais

Pour la première fois depuis l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima-Daiichi, un sondage organisé par le Asahi Shimbun a indiqué qu’une majorité de Japonais était favorable au redémarrage des réacteurs nucléaires arrêtés pour des raisons de sécurité et toujours à l’arrêt à ce jour. Le principal facteur qui a influencé l’opinion est le renchérissement du prix de l’énergie provoqué par les évènements d’Ukraine. L’Asahi Shimbun a réalisé ce sondage par téléphone auprès de 1181 personnes prises au hasard dans toutes les préfectures japonaises les 18 et 19 février dernier. Les résultats ont montré que 51 % des réponses étaient en faveur du redémarrage des réacteurs à l’arrêt alors que 42 % étaient contre cette décision. Au cours de toutes les consultations précédentes depuis 2013 jamais plus de 30 % des personnes contactées étaient en faveur de la reprise des activités des centrales nucléaires.

Parmi les « sondés » 81 % d’entre eux ont déclaré que l’augmentation du coût de l’énergie représentait une charge difficile à supporter contre 18 %. Au début du mois de février le cabinet du premier ministre a approuvé une politique consistant à maximiser le plus rapidement possible la reprise d’activité des centrales nucléaires à l’arrêt par une modification des procédures locales qui ne seront plus élaborées par les gouvernements des préfectures mais directement par le gouvernement central. De plus les autorités japonaises ont décidé de prolonger la vie opérationnelle des réacteurs au delà de la limite actuelle de 60 ans si toutes les inspections de sécurité sont satisfaisantes. Selon la nouvelle politique gouvernementale le Japon va développer un programme de réacteurs innovants de nouvelle génération pour remplacer la vingtaine de réacteurs existants encore à l’arrêt dont le redémarrage n’est plus planifié ou abandonné définitivement. Sur ce dernier point l’opinion est partagée 45/46 %.

Il y a actuellement 33 réacteurs en opération au Japon, 2 réacteurs en construction, 27 encore à l’arrêt dont 16 devraient être remis en service avant la fin de l’année 2023. Le Japon importe 90 % de son énergie, charbon en provenance d’Australie, gas naturel liquéfié (Australie et Qatar essentiellement et dans le cadre de contrats à long terme, voir note en fin de billet pour le GNL russe). Le mix énergétique électrique du Japon est actuellement le suivant : GNL 37 %, charbon 32 %, hydro 8 %, solaire 7 %, nucléaire 6 %, déchets 4 %, pétrole 3 %, éolien 0,7 %. L’opinion japonaise est très défavorable à l’installation de moulins à vent qui défigurent le paysage et les risques de typhons jouent un rôle prépondérant dans les décisions très timides du gouvernement sur ce point particulier. L’objectif du gouvernement japonais est d’atteindre vers 2030 la même part du nucléaire dans le mix énergétique électrique qu’avant le grand tsunami du 11 mars 2011, c’est-à-dire 30 %, un objectif difficile à atteindre sans construire de nouvelles usines.

Les conditions climatiques japonaises sont défavorables aux énergies intermittentes dites renouvelables car l’enneigement d’une grande partie de l’archipel en hiver et les caprices des vents sont des facteurs dissuasifs. L’abandon du charbon à l’horizon 2070 nécessitera donc la construction de nouvelles centrales nucléaires, les filières petits réacteurs modulaires et installations à haute température étant envisagées dans le futur mix énergétique électrique en particulier pour les installations décentralisées comme dans les petites îles et la production d’hydrogène qui intéresse les grande firmes automobiles japonaises. Dans le cadre d’une rationalisation du réseau de distribution concernant les grandes îles il est enfin envisagé une homogénéisation de la fréquence et de la tension du courant moyenne et basse tension, trop de disparités existant encore aujourd’hui. Le dernier volet du mix énergétique électrique japonais est l’approvisionnement en combustible et le Japon a développé une collaboration étroite, tant technique que financière avec l’Australie, une collaboration du même type avec l’Australie que celle concernant le gaz naturel Pour conclure ce panorama, le japon continue à développer la filière neutrons rapides et le retraitement du combustible dans le cadre d’une collaboration historique avec la France. Et les grandes firmes japonaises comme Mitsubishi Heavy Industry collaborent étroitement avec la Chine dans le domaine du nucléaire, en particulier pour la fourniture de cuves de réacteurs.

Source : World Nuclear Association, illustration : Centrale nucléaire de Kashiwazaki-Kariwa (TEPCO), Préfecture de Niigata au bord de la Mer du Japon dont le redémarrage des réacteurs 6 et 7 sont prévus à très court terme, cliché TEPCO. Cette usine est la plus grande installation électro-nucléaire du monde en terme d’énergie électrique produite avec 7 réacteurs BWR dont deux ABWR construits par Toshiba et Hitachi, partenaires de general electric, le créateur de la technologie BWR ( https://en.wikipedia.org/wiki/Boiling_water_reactor ).

Note. Au grand dam des USA, la puissance occupante du Japon depuis 1945 avec près de 60 installations militaires sur le sol nippon, le Japon est actionnaire via Mitsubishi d’un consortium mis en place par la société russe Gasprom en partenariat avec la société Sakhalin Energy pour acheminer du gaz naturel par gazoduc depuis l’immense gisement pétrolier et gazier de la Mer d’Okhotsk. Ce projet est néanmoins au point mort et l’unité de liquéfaction construite entre autres partenaires par Chiyoda Co et Toyo Engineering Co sur l’île de Sakhalin est maintenant opérationnelle. Le partenariat Russie-Japon a permis de définir des contrats de longue durée d’acheminement du LNG vers le Japon à des prix indépendants du marché international. C’est à peu près le rare volet de souveraineté du Japon vis-à-vis des Etats-Unis. Enfin les partenaires occidentaux de Sakhalin Energy se sont désolidarisés de ce projet dès le début de l’opération spéciale russe en Ukraine.

Les réacteurs nucléaires surrégénérateurs : Russie et Chine

Il a donc été fait mention de la Chine dans le précédent billet et de son ambitieux programme électro-nucléaire. Il s’agit de la “transition énergétique” à la chinoise. Actuellement 55 réacteurs nucléaires sont opérationnels, 21 sont en cours de construction, 80 autres sont déjà planifiés pour être concrétisés dans un futur proche et enfin 76 autres installations sont prévues dans un futur plus lointain c’est-à-dire au delà de 2030. L’objectif premier de ce programme était de réduire la pollution des grandes villes et c’est la raison pour laquelle de nombreuses unités en cours de construction ou planifiées comportent aussi une cogénération lorsqu’elles sont situées près de grandes agglomérations afin de profiter de la chaleur de refroidissement du circuit secondaire pour le chauffage urbain. Toujours dans le registre de cette transition énergétique les technologies intermittentes sont confiées à des entreprises privées dont les projets sont très partiellement financés par l’Etat, à ces entreprises de produire un kWh compétitif pour le marché intérieur. Le réseau de transport comporte de plus en plus de lignes haute tension de 1 million de volts alternatif et 800000 volts continu. Dès le début de ce programme les autorités scientifiques ont insisté sur la nécessité pour la Chine de disposer d’un circuit combustible fermé, en d’autres termes la nécessité de construire des surrégénérateurs à neutrons rapides pour prendre en charge les transuraniens de haute activité. Dans le décompte ci-dessus les premières usines comportant un ensemble de SMRs couplés à une seule turbine sont considérés comme étant une seule unité de production. La technologie SMR (100 MW électrique par unité au minimum) pourrait être généralisée à l’horizon 2030 si le coût de construction d’une unité équivalant à celle d’un réacteur de 400 MW électrique s’avère avantageux. Quant aux réacteurs à très haute température ou à lits fluidisés, il s’agit d’installations expérimentales qui permettront dans le futur d’ouvrir d’autres applications industrielles telles que la production d’hydrogène. Divers billets de ce blog l’ont déjà mentionné. L’objet du présent billet est de décrire l’état d’avancement de la filière à neutrons rapides en Chine.

Depuis l’abandon du projet NERSA en France plus connu sous le nom de Super-Phénix il n’existe aucun projet de surrégénérateur en Europe occidentale ou aux USA. Aujourd’hui il faut aller en Russie, au Japon et en Chine pour trouver un programme nucléaire incluant les réacteurs à neutrons rapides. Le petit surrégénérateur japonais, frère jumeau du réacteur Phénix de Marcoule en France et fruit d’une étroite collaboration avec la France est en cours d’amélioration. La Russie est incontestablement le leader mondial des réacteurs à neutrons rapides avec le réacteur de recherche BOR-60 (60 MW électrique) opérationnel depuis 1968, le BN-600 (500 MW électrique) opérationnel depuis 1980 et le BN-800 (880 MW électrique) opérationnel depuis 2016. Ces unités sont couplées au réseau électrique. Il faut également mentionner les sous-marins russes à propulsion nucléaire équipés de petits surrégénérateurs refroidis avec du sodium qui présentent l’avantage de pas nécessiter de rechargement de combustible pendant plus de deux années.

La Chine, compte tenu de son programme électro-nucléaire ambitieux dans la filière des neutrons thermiques type PWR de conception originelle sous licence Westinghouse pour leur grande majorité nécessite le développement de la filière à neutrons rapides, c’est-à-dire non modérés par l’eau utilisée dans ces PWR. La filière à neutrons rapides permet en effet de se débarrasser des transuraniens dont principalement les divers isotopes du plutonium et le curium. On pourrait dire que dans l’urgence la Chine a importé la technologie russe. Il s’agit des deux CFR-600 du site de Xiapu d’une puissance électrique de 600 MW. La construction du premier réacteur a commencé à la fin de l’année 2017 et est en cours de chargement de combustible (voir ci-après) et la construction de la deuxième unité, sur le même site a commencé à la fin de l’année 2020. Ces deux unités sont identiques et les assemblages de combustible sont produits par TVEL ( https://www.tvel.ru/en/ ), un département de Rosatom. Les deux CFR-600 sont des clones améliorés des BN-600. Comme pour le BN-600 le fluide caloporteur transparent aux neutrons est le sodium liquide.

La fermeture de Super-Phénix installé en France, un projet coopératif international et européen, constitue encore aujourd’hui la plus grande erreur de la France dans le domaine énergétique, la France ne pouvant qu’entretenir son parc nucléaire existant mais fatalement condamnée à accumuler des déchets de haute activité en l’absence de ce maillon essentiel que constituait ce surrégénérateur. En effet l’avantage du réacteur à neutrons rapides, c’est-à-dire non modérés par le fluide caloporteur comme dans le cas de l’eau des PWR, BWR ou Candu est de favoriser la capture de ces neutrons d’énergie supérieure à 1 MeV pour induire la fission des noyaux transuraniens ainsi que l’uranium-238 fertile mais non fissile. Il n’existait aucun argument scientifique pour justifier la fermeture de cette usine.

À ce propos et pour insister sur l’incurie des décideurs politiques français il en est de même pour la fermeture de l’usine de Fessenheim : les seules motivations étaient d’ordre bassement politique. L’unité de temps des réflexions des politiciens est leur échéance électorale, c’est-à-dire 5 ans en France. Les projets énergétiques incluant l’énergie nucléaire, le combustible nucléaire entrant pour moins de 5 % dans le coût global du MW électrique final étant le moins coûteux et paradoxalement “renouvelable” grâce à la filière neutrons rapides, demandent des investissements de recherche et développement sur le long terme. Dans le cas d’un réacteur à eau pressurisée classique, le seul élément de l’usine qui ne peut pas être remplacé est la cuve du réacteur : tous les autres éléments de l’installation peuvent être remplacés par du matériel neuf, en particulier les pompes primaires et les générateurs de vapeur. La durée de vie d’un PWR type Fessenheim correspondant à l’AP-1000 dépend de l’état de cette cuve. À chaque arrêt pour rechargement en combustible cette cuve est minutieusement inspectée à l’aide de robots construits à cet effet. La surface de la cuve est nettoyée à l’aide du même robot. Pour l’anecdote j’ai de mes yeux vu un tel robot en opération dans une cuve de 900 MW sur le site de Tricastin en France. Jusqu’à présent jamais aucune détérioration notoire de cette cuve n’a été notée. C’est la raison pour laquelle les autorités de sureté américaines par exemple ont prolongé la durée de vie opérationnelle de la plupart des réacteurs type Westinghouse comme ceux du parc nucléaire français jusqu’à 80 ans. La fabrication de ces cuves est confiée à des entreprises spécialisées et il n’en existe plus qu’un nombre limité dans le monde, en Chine, au Japon, en Russie.

L’avantage du réacteur à neutrons rapides est exceptionnel en comparaison du PWR. Le réacteur lui-même est de type “piscine” puisqu’il baigne dans sa totalité dans un bain de sodium liquide (température de fusion 98°C et d’ébullition 882°C) transparent aux neutrons et à la pression atmosphérique contrairement aux quelques 100 bars de pression de l’eau des PWR. Technologiquement la situation est beaucoup plus simple à mettre en œuvre. Le seul point plus compliqué dans ce type d’installation est la nécessité d’une boucle sodium secondaire également à la pression atmosphérique pour produire la vapeur de très bonne qualité qui va vers la turbine de l’alternateur. Les opérations de chargement en combustible sont entièrement robotisées sous atmosphère inerte (argon). Le cœur du réacteur est entouré d’une couverture d’assemblages de combustibles pouvant aisément contenir les transuraniens dont on veut se débarrasser afin de réduire pratiquement à zéro les déchets de haute activité tout en produisant de l’énergie. Enfin l’autre avantage, et mes lecteurs auront l’impression que je me répète, le réacteur à neutrons rapides permet de “brûler” l’uranium naturel appauvri ainsi que le thorium.

En conclusion cette filière abandonnée par la France est celle de l’avenir et la Russie et la Chine l’ont très bien compris. Il n’y aura jamais de pénurie d’uranium puisque l’uranium appauvri servira avantageusement de combustible pour produire de l’énergie électrique. Grâce à l’énergie nucléaire on peut lucidement envisager un avenir meilleur …

Illustration : assemblages de combustibles fabriqués par TVEL destinés au réacteur CFR-600 chinois sous licence Rosatom. Autres sources : World Nuclear Association, en particulier cette source : https://www.world-nuclear.org/information-library/country-profiles/countries-a-f/china-nuclear-power.aspx . Lien ci-dessous : https://www.youtube.com/watch?v=MVUYIJRgUwk&ab_channel=LCP-Assembl%C3%A9enationale . L’intervention de Jospin devant la commission d’enquête de l’Assemblée nationale est un sommet de la mauvaise foi des politiciens qui exposent une problématique dont ils ignorent suprêmement les ressorts scientifiques, ici de l’énergie nucléaire. Clamer haut et fort que “la filière à neutrons rapides n’a aucun avenir” relève de l’ignorance sinon de la sénilité. On peut tout de même pardonner à Jospin qui, à 85 ans, a au moins gardé en mémoire son idéologie de gauche sympathisant avec les ultra-gauchistes que constituent les partis écologistes. Il est vrai qu’un politicien de carrière comme Jospin ne peut pas créer la surprise en osant faire amende honorable devant des députés, lui qui fut un sinistre premier ministre …

Nouvelles du Japon : Le japon adopte un plan pour maximiser l’énergie nucléaire

Depuis juillet dernier, un comité consultatif – le Comité exécutif de la transformation verte (GX) – examine la mise en œuvre de changements majeurs dans le secteur de l’énergie, dans toutes les industries, dans l’économie et dans la société afin d’atteindre l’objectif de carbo-neutralité d’ici 2050. La réunion de mise en œuvre du GX du gouvernement s’est tenue le 22 décembre 2022, au cours de laquelle une feuille de route pour les dix prochaines années a été élaborée en tant que « politique de base pour la réalisation du GX ».

En vertu de la nouvelle politique – qui décrit l’énergie nucléaire comme « une source d’énergie qui contribue à la sécurité énergétique et a un effet de décarbonisation élevé » – le Japon maximisera l’utilisation des réacteurs existants en en redémarrant autant que possible et en prolongeant la durée de vie des réacteurs vieillissants au-delà de la limite actuelle de 60 ans. Le gouvernement a également déclaré que le pays développera des réacteurs avancés pour remplacer ceux qui sont déclassés.

Avant l’accident le 11 mars 2011 de la centrale de Fukushima-Daiichi, les 54 réacteurs japonais fournissaient environ 30 % de l’électricité du pays. Cependant, dans les 14 mois qui ont suivi l’accident, la production nucléaire du pays a été arrêtée en attendant une modification réglementaire. À ce jour, dix des 39 réacteurs opérables du Japon ont été inspectés, ce qui confirme qu’ils répondent aux nouvelles normes de sûreté réglementaires et ont repris leurs activités. Dix-sept autres réacteurs ont demandé à redémarrer. En 2021, l’énergie nucléaire ne fournissait que 7,2 % de l’électricité du pays.

En vertu de la réglementation révisée qui est entrée en vigueur en juillet 2013, les réacteurs japonais ont une période d’exploitation nominale de 40 ans. Les prolongations ne peuvent être accordées qu’une seule fois et sont limitées à un maximum de 20 ans, sous réserve d’exigences de sécurité rigoureuses.

Le 21 décembre, l’Autorité japonaise de régulation nucléaire (ARN) a approuvé un projet de nouvelles règles qui permettrait aux réacteurs d’être exploités pendant plus de 60 ans. En vertu de la modification, les exploitants de réacteurs en service depuis 30 ans ou plus doivent formuler un plan de gestion à long terme des réacteurs et obtenir l’approbation de l’organisme de réglementation au moins une fois tous les 10 ans s’ils veulent continuer à fonctionner.

La nouvelle politique prolongera effectivement la période pendant laquelle les réacteurs peuvent demeurer en service au-delà de 60 ans en excluant le temps passé hors ligne, pour les inspections, les opérations de maintenance et les rechargements en combustible, de la durée de vie totale. Dans le cadre de la nouvelle politique, le Japon développera et construira également des « réacteurs innovants de prochaine génération » pour remplacer une vingtaine de réacteurs qui devraient être déclassés.

En septembre, Mitsubishi Heavy Industries a lancé le réacteur à eau sous pression SRZ-1200. Développé en collaboration avec quatre services publics japonais, le réacteur de 1200 MWe est conçu pour répondre aux normes de sécurité réglementaires renforcées du pays.

Le Premier ministre Fumio Kishida a déclaré que le gouvernement soumettra les projets de loi pertinents pour mettre en œuvre la nouvelle politique à une session parlementaire ordinaire au début de l’année. Il sera officialisé par une décision du Cabinet attendue au plus tôt en février 2023.

Commentant la nouvelle politique, Kazuhiro Ikebe, président de la Fédération japonaise des compagnies d’électricité, a déclaré : « Sur la base de la politique présentée cette fois-ci, nous, en tant que compagnies d’électricité, travaillerons à assurer un approvisionnement stable en électricité en maximisant l’utilisation des énergies renouvelables et de la production d’énergie nucléaire sur la base de la sûreté, de la décarbonisation de la production d’énergie thermique, et promouvoir l’électrification. Nous sommes déterminés à prendre toutes les mesures possibles pour atteindre la neutralité carbone. Source : World Nuclear News.

Énergie nucléaire : la Chine définitivement en avance

Sur ce blog, le 12 septembre 2021 je relatais la mise en route de la première unité du réacteur à haute température refroidi à l’hélium situé à Shidaowan dans la province de Shandong en Chine. Un deuxième réacteur modulaire était en construction. L’ensemble de l’usine est maintenant opérationnel avec deux réacteurs d’une puissance de 259 MW thermique chacun qui alimentent une seule turbine de 210 MW électrique. Le combustible est constitué de 245000 billes de 60 mm de diamètres de graphique recouvertes d’une protection de céramique, chaque bille étant un matériau composite graphite-céramique capable de résister à des températures de 1620 °C. Le système de sécurité est passif car il suffit d’ouvrir un sas situé à la partie inférieure du réacteur pour « diluer » le combustible et le chargement est également réalisé en continu. Le flux d’hélium permet de classer ce type de réacteur comme étant constitué d’un lit fluidisé malgré le diamètre de chaque bille supérieur à celui d’une balle de golf. Le combustible lui-même est constitué d’uranium enrichi à 8,5 % d’isotope-235.

L’étape suivant sera de connecter six modules de ce type vers une turbine de 650 MW électriques. Toutes les études ont été réalisées à l’Université de Tsinghua. Il est maintenant évident que la Chine est en avance sur tous les autres pays du monde car ce type de réacteur rassemble plusieurs avantages. La production du combustible est beaucoup simple que l’assemblage de combustibles d’un réacteur à eau pressurisée classique. Le système de sécurité est passif car il suffit de purger partiellement le réacteur de son combustible pour mettre fin à la fission en chaine. Enfin la haute température atteinte par le fluide de refroidissement, actuellement fixée à près de 300 °C, pourra être adaptée à d’autres applications comme source de chaleur, jusqu’à 950 °C, pour produire de l’hydrogène à partir d’eau via le cycle sulfure-iode (https://en.wikipedia.org/wiki/Sulfur–iodine_cycle ), un but faisant l’objet de développements au Japon avec de petits réacteurs à neutrons rapides refroidis avec du sodium.

On ne peut que constater tristement que la Chine est définitivement en avance dans ce domaine, une température atteignant celle indiquée supra étant la seule solution économiquement rentable pour produire de l’hydrogène sans faire appel au méthane. Un des autres points résolus par les ingénieurs de l’Université de Tsinghua est la déshydratation parfaite de l’hélium caloporteur. Le succès assuré de la technique modulaire mise en œuvre sur le site de Shidaowan va permettre son extension sur trois autres sites chacun d’entre eux comprenant six réacteurs modulaires à lit fluidisé connectés à une seule turbine de 650 MW électriques. Source : world-nuclear-news.org

Le G7 a décidé de l’extension de vie des centrales nucléaires existantes

Les dirigeants des grands pays industrialisés du Groupe des Sept (G7) encouragent la prolongation de la durée de vie utile des réacteurs nucléaires existants et soutiennent la relance d’autres pays afin de contribuer à atteindre l’objectif d’un approvisionnement énergétique sûr et à faible émission de carbone, ont déclaré les représentants de l’industrie nucléaire.

Dans un message conjoint dans le cadre du sommet des dirigeants en Allemagne les 26 et 27 juin, l’Association nucléaire canadienne, le Japan Atomic Industries Forum, Nucleareurope, le Nuclear Energy Institute des États-Unis, la Nuclear Industry Association du Royaume-Uni et la World Nuclear Association ont demandé aux dirigeants du G7 d’encourager autant que possible la prolongation de la durée de vie utile des réacteurs nucléaires et soutenir le redémarrage d’autres réacteurs exploitables. Les organisations affirment que, selon l’Agence internationale de l’énergie, prolonger la durée de vie des réacteurs existants est la méthode la moins coûteuse pour assurer une production supplémentaire d’électricité à faible teneur en carbone.

Il est urgent d’inclure l’énergie nucléaire dans les cadres de politique de financement écologique nationaux et internationaux, signalant que l’industrie nucléaire est prête à jouer un rôle clé dans la lutte mondiale contre les changements climatiques non seulement dans les pays du G7, mais aussi dans les économies en développement. Il sera aussi nécessaire de fixer des objectifs ambitieux pour de nouveaux projets de capacité nationale, appuyés par des instruments politiques pragmatiques et des cadres réglementaires efficaces.

Il sera également nécessaire de soutenir le développement de technologies nucléaires de petite taille et de pointe qui élargiront la gamme d’applications auxquelles l’énergie nucléaire peut être appliquée, afin d’offrir une décarbonisation plus profonde et plus large au-delà des secteurs de production d’électricité.

« L’engagement du G7 à s’éloigner des combustibles fossiles nécessitera des investissements dans les technologies à faibles émissions de carbone, combinés à des politiques solides qui accéléreront davantage la transition vers un système énergétique propre et sûr. Il est prouvé que la combinaison de l’énergie nucléaire et des énergies renouvelables fait de la décarbonisation rapide et durable de la production d’électricité un objectif réalisable ». En outre « L’énergie nucléaire est une solution accessible, abordable, propre et fiable pour les pays qui cherchent à abandonner les combustibles fossiles et à réaliser une transition énergétique juste et équitable. La construction et l’exploitation de chaque centrale nucléaire génèrent des milliers d’emplois hautement qualifiés, soutiennent la chaîne d’approvisionnement et stimulent les économies locales ».

« Au-delà de la production d’électricité, les technologies nucléaires ont un énorme potentiel pour décarboniser d’autres secteurs de l’économie – les transports, les produits chimiques et la sidérurgie, entre autres – grâce à l’approvisionnement thermique et à la production d’hydrogène ».

L’appel à envisager de prolonger la durée de vie des réacteurs nucléaires existants, et d’envisager la réouverture des réacteurs qui ont récemment fermé, se situe dans le contexte de la flambée des prix de l’énergie et des questions relatives à la sécurité et à l’approvisionnement énergétiques à la suite de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Le Financial Times a rapporté qu’un haut fonctionnaire de l’administration du président américain Joe Biden a déclaré mercredi aux journalistes qu’ils s’attendent à ce que les dirigeants du G7 débattent des mesures visant à « stabiliser les marchés mondiaux de l’énergie » alors que Washington recherche encore plus de coopération des pays occidentaux pour endiguer les prix des hydrocarbures devenus un fardeau pour les économies. Le Conseil européen de Lisbonne a déjà adopté, en décembre, un rapport sur la mise en œuvre d’une stratégie en vue de contenir les prix élevés des produits de base qui pèsent sur l’économie mondiale.

L’Allemagne cherche à assurer un approvisionnement énergétique stable et à réduire sa dépendance au gaz russe, mais elle n’a pas encore modifié son plan de retrait à la fin de 2022 de ses trois derniers réacteurs exploitables. Le Royaume-Uni compte six centrales nucléaires, qui fournissent environ 16 % de l’électricité du pays, mais la plupart devraient être retirées d’ici la fin de la décennie. Enfin la France modernise les systèmes de sécurité passif de l’îlot nucléaire de près de la moitié de ses réacteurs et la Belgique n’a pas encore statué sur une sortie éventuelle du nucléaire.

Source : World Nuclear News. Remarques : Le Président français va-t-il décider de la remise en exploitation des deux réacteurs de l’usine de Fessenheim ? Son idée de développer des petits réacteurs modulaires révèle sa totale méconnaissance de la structure du réseau de transport électrique français et par conséquent des questions énergétiques dans leur ensemble. Ces « petits réacteurs » d’une puissance très inférieure à une quelconque centrale électrique brûlant du charbon, à peine 250 MW électriques, seraient éventuellement envisageables dans les départements et territoires d’outre-mer mais certainement pas en métropole. Enfin la disparition de l’expertise technique française dans le domaine de l’énergie nucléaire rend caduque ce genre de projet. Que les autorités reconnaissent enfin que la fermeture de l’usine de Fessenheim fut une très grave erreur et sa remise en exploitation correspondrait au bas mot à environ une dizaine de petits réacteurs modulaires auxquels rêve le Président françaisJe rappelle que le seul pays ayant développé des petits réacteurs nucléaires à usage civil est la Russie. Ces installations sont dérivées de la technologie utilisée pour les brise-glace. Il n’y a donc pas d’innovation particulière. Cependant de telles unités requièrent de l’uranium enrichi à 20 % d’isotope 235 afin d’atteindre une taille compacte du réacteur lui-même et ce simple fait devra conduire l’IAEA à redéfinir les règles appliquées à ce type de réacteur. En effet, les brise-glace, les sous-marins et les porte-avion à propulsion nucléaire relèvent des armées et de leur juridiction propre et non du nucléaire civil.

L’avenir de l’énergie électrique en France : bien sombre !

Après l’annonce purement démagogique de Macron de lancer une filière française de petits réacteurs nucléaires modulaires, à la suite des retards à rebondissements de la finalisation du réacteur EPR de Flamanville et enfin après la fermeture précipitée et stupide des deux réacteurs de Fessenheim, un gâchis technologique et financier monstrueux, force est de constater que le secteur énergétique français se porte très mal. Pour satisfaire aux délires des écologistes la situation va encore s’aggraver. Construire à prix d’or encore plus de moulins à vent n’améliorera pas la situation, mettre en demeure les automobilistes d’acheter des voitures électriques pour préserver le climat non plus. Mais il y pire encore et tous les Français vont en souffrir. Ce sont les arrêtés de la Commission européenne au sujet du prix du kW électrique qui grèvent les comptes d’EDF, le prix du marché spot de l’énergie électrique étant fixé sur celui produit par la dernière turbine à gaz mise en service en temps réel. Or le gouvernement français, dans sa grande mansuétude, a obligé EDF à ne vendre sa production qu’à un prix régulé invariable et à chaque pointe de consommation cette société d’Etat perd des sommes colossales puisqu’elle doit trouver des kW sur ce marché spot. Comme un fait exprès, EDF, déjà lourdement endetté, peine à entretenir ses centres de production.

Un autre facteur dont personne ne parle ouvertement, certainement pas le gouvernement qui n’y comprend rien, est la rareté d’une main-d’oeuvre qualifiée pour procéder aux opérations de maintenance des réacteurs et Areva se trouve dans la même situation : on ne trouve plus de soudeurs qualifiés ! À ce jour sur les 56 réacteurs (hors Fessenheim) que compte la France 28 d’entre eux sont à l’arrêt. Des arrêts pour maintenance programmée, pour rechargement en combustible ou plus inquiétant pour remise en état des système de sécurité d’urgence dans l’îlot nucléaire, comprenez le bâtiment réacteur. La seule consolation pour la France se situerait dans une comparaison avec certaines installations nucléaires commerciales américaines qui sont dans un état de délabrement dangereux. Bref, on ne va pas ternir l’image du voisin pour redorer celle d’EDF. Voilà donc la situation en France à ce jour :

Les conséquences immédiates vont se faire sentir auprès des consommateurs puisque EDF doit acheter sur le marché spot les kW manquants. Premier effet le prix du kW était 4 fois plus élevé en ce dernier mois de décembre 2021 qu’à la même période une année auparavant. Or comme le gouvernement français impose un prix à EDF indépendant du marché spot, l’entreprise perd des fortunes. Paradoxalement le prix du kW français est maintenant plus élevé à la production que celui de l’Allemagne qui, malgré l’augmentation du prix des combustibles fossiles, a su produire une énergie plus rentable, financièrement parlant, que le kW nucléaire. Cette situation française va perdurer au moins jusqu’au milieu de 2023. Dans le contexte géopolitique actuel la situation ne saurait que s’aggraver. L’Agence Bloomberg a calculé que la perte d’EDF pourrait atteindre 26 milliards d’euros en raison des arrêts pour maintenance de ses réacteurs. De plus EDF ne va plus exporter d’électricité au cours des six prochains mois. La situation est donc tout simplement catastrophique pour l’entreprise qui peine à effectuer les opérations de maintenance exigées par l’Agence de Sécurité Nucléaire.

Manque de main-d’oeuvre qualifiée, perte des compétences, gouffre financier, politique des prix imposée par le gouvernement aberrante, pression de la Commission européenne sur les prix spot, et bien d’autres facteurs rendent l’avenir du secteur énergétique français très incertain voire calamiteux. Source partielle et illustration : ZeroHedge

Fessenheim et Koeberg : toute la différence !

En 1976, alors que la construction des deux réacteurs à eau pressurisée de la centrale nucléaire de Fessenheim n’est pas terminée, la France exporte pour la première fois son savoir-faire dans le nucléaire à l’Afrique du Sud sur le site de Koeberg à une trentaine de kilomètres de Capetown. Les deux réacteurs seront connectés au réseau en 1984 et 1985. Il s’agit d’une copie stricte de l’usine de Fessenheim connectée au réseau en 1977. Cette centrale nucléaire de Fessenheim a été définitivement ( ? ) arrêtée en 2020 pour des raisons d’ordre politique.

L’usine de Koeberg est donc la sœur cadette de celle de Fessenheim avec sept ans d’écart. La fourniture de combustible et l’entretien de cette centrale sont toujours confiés à la France et la centrale nucléaire, la seule en Afrique du Sud, est opérée par la société Eskom. Après une inspection par l’IAEA le remplacement des générateurs de vapeurs a été décidé. Ces générateurs de vapeur, trois par réacteur, seront fournis par Framatome. Les travaux devraient débuter au cours du prochain printemps austral afin de ne pas perturber le réseau électrique durant l’hiver à venir. Ainsi la centrale nucléaire de Koeberg pourra être encore exploitée pendant au moins vingt années supplémentaires.

Il est opportun de relever ici le pragmatisme de la société Eskom. Quand un outil industriel est rentable et exploitable il doit l’être. La durée de vie de la Centrale de Koeberg atteindra donc 60 ans et une autre prolongation de 20 ans accordée par l’IAEA n’est pas exclue. Visiblement les autorités françaises n’ont pas la même conception de l’exploitation d’un site industriel. La fermeture de la centrale de Fessenheim contribue ainsi à l’appauvrissement de la France alors que la prolongation de l’exploitation de celle de Koeberg est un facteur d’enrichissement de l’Afrique du Sud, certes minime puisque cette usine produit 5 % de l’électricité du pays, mais néanmoins non négligeable. Quant à l’Allemagne ce sont des centrales nucléaires presque neuves qui ont été mises à l’arrêt pour être démantelées en raison d’une politique de transition énergétique désastreuse.

Illustration Eskom, au loin la célèbre Montagne de la Table surplombant la ville du Cap

EPR d’Olkiluoto : 17 ans plus tard !

Le premier EPR mis en chantier dans le monde a enfin été connecté au réseau électrique de la Finlande et le 15 mars 2022 ce sera officiel. Cette grande nouvelle a été annoncée par TVO (Teollisuuden Voima Oyj) ce vendredi 13 mars. Il aura fallu dix-sept années pour que cette usine soit enfin opérationnelle mais pas à pleine puissance avant le 31 juillet …

Les premiers travaux ont débuté le 12 août 2005. Depuis 1990 jamais aucun réacteur nucléaire n’avait été construit en Europe. Cette usine faisait l’objet d’un partenariat entre Areva NP et Siemens. La cuve du réacteur a été fabriquée par Mitsubishi Heavy Industries, la turbine a été fournie par Siemens. Le coût initial du projet avait été arrêté à 3 milliards d’euros et au final le coût est de 11 Md d’euros. Ce projet a été émaillé de nombreux débats d’ordre financier jusqu’au rachat d’Areva NP par Électricité de France lorsque Siemens revendit sa participation dans Areva NP. Outre le fait qu’Areva n’était pas préparé pour diriger un tel chantier, il ressortit que le savoir-faire de la France dans l’énergie nucléaire avait pratiquement disparu autant dans les bureaux d’étude d’Areva que chez les sous-traitants. Les délais à répétition dans la construction de l’EPR de Flamanville en France s’expliquent par les mêmes raisons.

Alors qu’en Chine il aura fallu moins de 9 ans pour que les deux EPR de Taishan soient connectés au réseau, l’explication est simple : le consortium impliqué dans la construction de ce très important projet comprend à hauteur de 30 % EDF et à hauteur de 70 % China Guandong Nuclear Power Group qui construit quasiment à la chaine des CPR-1000 d’une puissance nominale de 1085 MWe comprenant trois générateurs de vapeur. Il s’agit d’une version un peu plus puissante que la dernière série de PWR de 900 MWe construits à Gravelines en France au cours des années 1980 mais comprenant trois générateurs de vapeur et un système de sécurité passif. Il ne fait aucun doute que le gigantisme des EPR et la complexité des circuits de sécurité seront abandonnés en raison des déboires rencontrés tant en Finlande qu’en France et la voie sera ouverte pour les nouvelles générations standardisées dite « Hualong One » ou HPR1000 dont dix unités sont en cours de construction en Chine. Ce modèle a été approuvé par divers pays dont la Grande-Bretagne, l’Argentine et paradoxalement l’Union européenne. Fin de partie pour le savoir-faire français ? 

Nouvelles du Japon. Histoire d’eau tritiée

La centrale nucléaire de Fukushima-Daichi a été endommagée par un tsunami géant le 11 mars 2011 et les assemblages de combustibles ont fondu dans les réacteurs. Ce « corium » dégage de la chaleur et les eaux de refroidissement contiennent divers produits de fission et aussi du tritium, l’isotope radioactif de l’hydrogène. L’élimination des produits radioactifs est effectuée à l’aide d’échanges d’ions mais il reste le tritium qu’il est impossible de séparer. Les autorités de TEPCO (Tokyo electric power Co) ont tenté des techniques innovantes sans succès et devant l’hostilité des pêcheurs des préfectures voisines et de divers pays riverains de l’Océan Pacifique ils ont construit des réservoirs qui stockent actuellement 1,4 millions de mètres-cube d’eau tritiée. Au cours de ce prochain été la capacité de stockage sera atteinte et il faudra alors décider de rejeter cette eau peu radioactive dans l’océan. Une équipe de 11 experts internationaux de l’IAEA vient de rendre son verdict. La compagnie TEPCO a été autorisée à rejeter en mer cette eau que n’importe qui pourrait boire sans danger à la seule condition de creuser un tunnel sous-terrain de 1000 mètres de long depuis le site de la centrale pour déverser cette eau en profondeur dans l’océan.

Pourquoi pas un tuyau ? Mystère. Mais ce n’est pas le plus surprenant dans cette histoire. Les autorités de l’IAEA ont autorisé le déversement de cette eau seulement à partir de la première moitié de l’année 2023, la direction de TEPCO ayant fait valoir que ce tunnel ne serait achevé qu’au courant de l’année 2023. Cette histoire n’est pas sans rappeler la gestion de l’épidémie de coronavirus qui provoqua une sidération généralisée des populations. Mais contrairement au virus le tritium est sans danger. Le tritium se trouvant dans ces eaux de refroidissement provient des traces de lithium utilisé pour former le combustible nucléaire sous forme de petits cylindres de céramique. Le noyau de bore dans l’eau de refroidissement, le bore-10 étant un excellent ralentisseur de neutrons, capture un neutron pour former deux noyaux d’hélium-4, stable, et un noyau de tritium avec éjection d’un neutron peu énergétique. Dans son fonctionnement normal l’eau de refroidissement d’un réacteur nucléaire ne contient pas de bore et la production de tritium est négligeable mais dans le cas de la centrale endommagée de Fukushima-Daichi il est probable que du bore soit ajouté à l’eau de refroidissement. Ce bore sera récupéré sur des résines échangeuses d’ions et recyclé.

Les autorités japonaises ont été tellement traumatisées par le grand tsunami du 11 mars 2011 qu’elles veulent que tout soit parfait et que rien ne leur soit reproché.

Il y a des limites. Donnez-moi un verre d’eau tritiée, je le boirai devant vous sans crainte. Le tritium de désintègre en hélium-3 avec éjection d’un électron (rayonnement beta-moins) très peu énergétique et d’un anti-neutrino dont on se moque complètement. Cette très faible énergie conduit à des problèmes de détection au laboratoire car il faut utiliser un liquide scintillant pour mesurer quelque chose et ce liquide scintillant est infiniment plus dangereux pour la santé. Outre le toluène, solvant des agents scintillants, les principales molécules utilisées pour les mesures de radioactivité faible sont le 2,5 diphényloxazole et le 1,4-bis(5-phényloxazole-2yl)benzène et il est écrit sur les flacons de ces poudres « toxique ». Donc la perfection n’existe pas et un jour ou l’autre toute cette eau contenant du tritium sera rejetée à la mer sans aucune espèce d’effet sur la faune et la flore marines. Enfin je voudrais ici rafraichir les mémoires. Les ogives thermonucléaires contiennent du tritium sous pression, or après 12 ans la moitié de ce tritium s’est désintégré en hélium-3, un isotope dont j’ai dit un mot sur ce blog il y a quelques semaines. Or, pour qu’une bombe thermonucléaire fonctionne correctement il faut replacer ce tritium environ tous les six ans. Même la France est en retard dans cette « maintenance » de son arsenal. Image TEPCO.

Brève. Le Président Macron est-il encore sain d’esprit ?

Pour un partisan de l’énergie nucléaire comme votre serviteur la précipitation des décisions contradictoires du candidat Macron laisse rêveur. Il était entendu que l’arrêt des deux réacteurs de l’usine de Fessenheim serait entériné quand l’EPR de Flamanville serait opérationnel. Non ! L’usine a été fermée à la grande satisfaction de Corinne Lepage qui a tout fait pour atteindre ce but dès l’administration Sarkozy, décision reprise par Hollande et enfin mise en application par Macron. L’EPR de Flamanville est toujours soumis à la décision de l’agence de sureté nucléaire car des soudures au niveau du circuit primaires sont considérées comme défectueuses. Le Président de tous les Français vient d’annoncer que des travaux de remise à niveau, on ne sait pas de quoi il parle, seraient réalisés pour prolonger de 30 ans le fonctionnement de certains éléments du parc nucléaire français, les tranches 900 MW ? les autres ? Personne n’en sait quoi que ce soit.

Macron s’est excité en mentionnant que la France allait se lancer dans la construction de réacteurs modulaires de faible puissance. Où sont les ingénieurs et les techniciens capables de mettre un tel programme en forme alors que la Russie a près de 20 ans d’avance et la Chine 15 ans d’avance dans ce domaine particulier. Les SMRs (small modular reactor) comprennent des éléments fabriqués en usine et assemblés sur site. Leur puissance électrique est égale au tiers de celle d’un réacteur de Fessenheim. La Chine maîtrise parfaitement cette technologie. Il est possible que des ingénieurs français aillent se former en Chine.

Après avoir vendu la division Alstom-Energie à General Electric en 2015, alors qu’il était ministre des finances de Hollande, Macron a fini par réaliser dans son cerveau embrouillé qu’il avait fait une erreur. La France rachète donc pour le double de sa valeur ce département, dont la turbine Arabelle ou peut-être seulement la turbine Arabelle, à GE pour le double du montant de la vente, soit 1,5 milliards d’euros. Quid des brevets, quid des autres activités d’Alstom qui restent la propriété de GE ? C’est l’inconnu, le flou, le « en même temps ». Toujours est-il que cette affaire revêt une couleur électoraliste évidente. La nouvelle taxonomie incluant l’énergie nucléaire dans les énergies renouvelables va peut-être permettre d’attirer des capitaux pour la mise en place du plan délirant de 8 nouveaux EPRs supposés remplacer les réacteurs vieillissants, selon les décideurs politiques, de la gamme 900 MW alors qu’ils pourraient être encore exploités pendant au moins 30 ans. Et pendant ce temps-là, tels sœur Anne du haut de la falaise de Flamanville, on ne voit toujours rien venir du côté de l’unique EPR français. Encore une fois la France devra faire appel à la Chine pour son vaste programme de construction de nouveaux EPRs. L’autocrate Macron ne sait pas de quoi il parle, il ne sait également pas s’entourer de conseillers respectables, on l’a vu avec cette poignée de pseudo-médecins tous corrompus qu’il a réuni pour emmerder les Français au sujet du coronavirus.