Les fécondations in vitro avec trois parents

Pour comprendre l’objet de ce billet il est nécessaire de faire un court rappel du déroulement de la fécondation. L’ovule est le gamète femelle, excusez-moi mais il faut appeler les choses par leur nom car dire le gamète féminin restreindrait cet exposé à l’être humain, par conséquent le spermatozoïde est le gamète mâle. Les gamètes ont subi une étape au cours de leur maturation appelée méiose qui divise le patrimoine génétique par 2 chez les espèces dites diploïdes comme l’être humain. La combinaison de ces deux gamètes au cours de la fécondation va rétablir le caractère diploïde de l’être à venir et il se forme au cours de ce processus un « brassage » des gènes qui confère au nouvel être son caractère unique. L’ovule est une grosse cellule sphérique, il m’est arrivé d’en observer avec une loupe binoculaire, qui contient tout l’appareil sub-cellulaire que l’on rencontre dans n’importe quelle autre cellule diploïde tel qu’on peut le révéler par microscopie électronique. L’ovule contient notamment des mitochondries avec leur matériel génétique propre. Le spermatozoïde est complètement différent et est constitué de trois parties, un cône contenant le matériel génétique mâle un flagelle et une mitochondrie géante qui va oxyder tout ce qui se trouve autour d’elle pour fournir l’énergie nécessaire au flagelle, le moyen de locomotion du spermatozoïde pour trouver un ovule à féconder. Seul le cône de ce gamète mâle pénètre dans l’ovule, la mitochondrie et le reste étant inutiles pour la fécondation. L’oeuf fécondé diploïde hérite donc du matériel génétique de la femelle.

C’est ainsi l’explication des travaux de paléogénétique qui font souvent appel à l’ADN mitochondrial car dans une cellule il n’y a qu’un seul noyau et une multitude de mitochondries et séquencer l’ADN mitochondrial, plus petit, est beaucoup moins malaisé que séquencer l’ADN nucléaire. Bref, cet ADN mitochondrial peut transmettre des défauts si par définition il est défectueux. Il s’agit alors de maladies génétiques transmises par la mère. Il existe un grand nombre de maladies de ce type, beaucoup d’entre elles étant heureusement létales, mais certaines de ces maladies constituent un lourd fardeau durant toute une vie car elles sont incurables pour la très grande majorité d’entre elles (https://en.wikipedia.org/wiki/Mitochondrial_disease ). Dans l’ovule le matériel génétique (haploïde) est contenu dans le noyau, chez les plantes comme chez l’homme. Les progrès de la fécondation in vitro (également pratiquée avec les animaux d’élevage) ont permis une ouverture pour traiter les maladies génétiques d’origine mitochondriale. Pour comprendre l’objet de ce billet il faut brièvement décrire quelle est cette manipulation et quel est le concept de l’enfant à « trois parents » dont il est question ici. Une femme porteuse d’une maladie génétique d’origine mitochondriale et désirant avoir un enfant normal peut faire appel à la technique de « l’enfant à trois parents. Par micromanipulation le noyau de l’ovule de la mère est prélevé et implanté dans un ovule sain qui a été dénucléé préalablement par le même type de micromanipulation. La fécondation in vitro est alors effectuée et l’enfant à naître après implantation dans l’utérus sera indemne de toute maladie d’origine mitochondriale. On parle donc d’un enfant ayant trois parents : la mère biologique puisqu’il sera porteur du patrimoine haploïde de sa mère, le père biologique puisqu’il hérite du patrimoine haploïde du père et la mère « donneuse » puisqu’il portera le patrimoine génétique mitochondrial d’une autre mère donneuse d’ovule. Cette approche à des fins thérapeutiques est pratiquée dans certaines cliniques spécialisées.

Après de nombreuses discussions d’ordre éthique ce type d’approche a été légalisé par la loi au Royaume-Uni, à Singapour et en Australie. Cette approche est illégale aux Etats-Unis mais des pays comme la Grèce ou l’Ukraine proposent ce type de manipulation mais il y a certainement d’autres pays où des cliniques proposent ce type de service, pays proposant des mères porteuses, « business is business », comme en Grèce où des jeunes femmes dans la misère ont trouvé là une source de revenus inespérée. Personnellement je ne suis pas opposé aux grossesses pour autrui puisque tout être humain est libre de disposer de son corps y compris à des fins mercantiles, de même que je ne suis pas opposé à l’enfant à trois parents avec l’un d’entre eux étant une « donneuse de mitochondries » comme il y a des hommes « donneurs de sperme ». Rien ne me paraît choquant éthiquement parlant puisque le don de sperme est admis par la loi pourquoi le « don de mitochondries » devrait-il être interdit ?

Il existe cependant dans cette approche décrite plus haut des cas d’erreur de manipulation lors du transfert du noyau de l’ovule de la mère biologique sur le plan du patrimoine génétique nucléaire dans l’ovule de la « donneuse de mitochondries ». Au cours de ce transfert il arrive que des mitochondries, donc défectueuses, soient transférées dans l’ovule dénucléé de la mère donneuse de mitochondries. Deux cas d’un tel transfert ont été décrits dans la littérature médicale ( https://www.technologyreview.com/2023/03/02/1069296/three-parent-baby-technique-risk-of-disease/ ) et les personnalités en charge d’examiner l’aspect éthique ont immédiatement sonné l’alarme. Selon le Docteur Joanna Poulton de l’Université d’Oxford, une spécialiste de l’ADN mitochondrial, pas moins de 20 % des enfants à trois parents pourraient être exposé à ce type de risque. Le Docteur Heidi de l’Université de Ghent, spécialiste des questions de bioéthique, considère que l’approche enfant à trois parents est contraire aux règles de l’éthique et qu’il s’agit d’un pur développement mercantile des techniques de fécondation in vitro. Ces braves spécialistes feraient mieux de s’occuper de l’interdiction stricte des thérapies de changement de sexe par hormono-thérapie et chirurgie. À ma connaissance seules la Caroline du Nord et la Floride ont interdit tout récemment cette pratique criminelle encouragée par les parents qui ont succombé à l’idéologie dévastatrice LGBTQ.WC+. Le Texas est sur le point d’adopter la même interdiction alors que le débat n’est pas à l’ordre du jour en Europe car certains membres du corps médical et les laboratoires pharmaceutiques se frottent les mains …

Inspiré d’un article paru sur le site bioedge.org. Illustration qui n’a rien à voir avec la réalité !

Actualité. Les dérives de la procréation assistée

Alors que le Parlement français est saisi d’un projet de loi relatif à la bioéthique, d’ailleurs une vraie tarte à la crème, ce projet d’ordre législatif va-t-il se pencher sur le problème de la lente désagrégation de la cellule familiale favorisée par l’ensemble des nouvelles technologies relatives à la procréation médicalement assistée dont les conséquences sociétales sont imprévisibles.

Il m’a paru opportun de relater un « fait divers » illustrant l’ensemble de cette problématique de révolution de la reproduction dont devraient se préoccuper les représentants élus du peuple car il s’agit de l’avenir de la société. L’histoire se passe dans l’Etat de l’Oregon. Un multimillionnaire par ailleurs philanthrope vient de gagner une bataille juridique qui a conclu que la mère biologique de son enfant n’avait strictement rien à voir avec son fils. C’est difficile à imaginer mais vous allez comprendre. Jordan Schnitzer âgé de 70 ans aujourd’hui avait obtenu un accord de son ex-épouse Cory Sause maintenant âgée de 42 ans au sujet de la production d’embryons susceptibles plus tard d’être utilisés pour des fécondations in vitro et par conséquent le père serait alors le seul parent d’un enfant à naître plus tard. Il faut avoir l’esprit un peu tordu pour imaginer un tel scénario mais ce n’est pas ici le sujet. Jordan a eu deux filles avec Cory puis ils ont rompu toute relation. Schnitzer a lors décidé d’avoir un autre enfant et a fait appel à une mère porteuse. Samuel, l’enfant issu de l’implantation de l’embryon soigneusement préservé, âgé maintenant de cinq ans, a incité la mère biologique à réclamer un droit de visite pour son enfant avançant qu’elle était justement la mère biologique de l’enfant. Le tribunal lui accorda ce droit mais Schnitzer fit appel et présentant l’accord privé mentionné plus haut obtint satisfaction.

L’avocat de Schnitzer a été comblé par la décision du tribunal qui a déclaré que l’enfant n’avait qu’un seul parent et que cette clarification d’une situation concernant des dizaines de milliers de couples ou de personnes célibataires rêvant d’avoir un enfant était finalement bénéfique. Il faut préciser que selon la loi en vigueur dans l’Etat de l’Oregon (décision SB512) les donneurs de sperme et les donneuses d’ovules ne peuvent en aucun cas être considérés comme mère ou père : seule la femme gestante peut être considérée comme mère biologique. Donc, selon cette loi, ni Schnitzer ni son ex-compagne Cory sont les parents biologiques de l’enfant. Ce sont au contraire la mère porteuse et son époux qui sont les parents légaux. Ces derniers ont abandonné tout droit sur l’enfant, probablement pour une épaisse liasse de dollars mais l’histoire ne le dit pas. Dans peu d’années Samuel sera donc orphelin …

Source : BioEdge

Eugénisme : une sordide saga dans l’Amérique des années 1930

Se replonger dans le bon vieux temps, un âge d’or des certitudes sociales et morales, est au mieux une erreur, au pire une folie. Pour preuve, au moins sur les thèmes de la moralité sexuelle, de l’autonomie et des droits des femmes, il est difficile de surpasser le procès qui eut lieu en 1936 au sujet de la succession d’un célèbre inventeur californien. La saga triste et sordide est exposée dans un livre récent, The Unfit Heiress : « The Tragic Life and Scandalous Sterilization of Ann Cooper Hewitt », par Audrey Clare Farley.

Ann était la fille de Peter Cooper Hewitt, un ingénieur riche et très respecté qui développa la lampe à vapeur de mercure. Elle était un enfant naturel issu d’une liaison extraconjugale de Peter Cooper Hewitt avec Marion Jeanne Andrews, qu’il épousa après la mort de sa première femme. Son testament précisait que les deux tiers de sa succession devaient être attribués à Ann, qu’il reconnut comme sa fille et un tiers à Marion – mais la part d’Ann reviendrait à sa mère si Ann mourait sans enfant. Hewitt mourut en 1921.

Marion, se faisant maintenant appeler Mme Maryon Brugière-Denning-Hewitt-d’Erlanger-McCarter, avec un nom de famille pour chacun de ses nombreux maris, a eu une inspiration incroyable. Peu avant le 21e anniversaire de sa fille Ann en 1935, alors qu’elle allait atteindre légalement sa majorité, Ann a été hospitalisée pour une appendicectomie. Maryon a dit aux médecins que sa fille était «  à moitié débile » et leur a ordonné de la stériliser en même temps moyennant un paquet de dollars conséquent. Les médecins se sont conformés aux ordres et Mme B-D-H-d’E-McC devint certaine d’hériter de toute la fortune de Hewitt à la mort de sa fille.

Ann, cependant, n’était pas faible d’esprit, elle pouvait parler plusieurs langues étrangères et était largement connue dans la haute société de Los Angeles. Elle a donc poursuivi sa mère et les médecins devant la justice. L’affaire a pris une dimension sensationnelle et malsaine, une de ces histoires qui captiverait aujourd’hui des dizaines de millions de personnes. Au cours du procès Maryon a déclaré que sa fille était sexuellement déviante et vagabonde et de son côté Ann déclara que sa mère était dépensière, souvent ivre et qu’elle se négligeait.

Le tribunal a cru la mère.

Dans son livre Farley examine pourquoi. Elle fait valoir que la décision du tribunal reflétait une croyance largement répandue aux Etats-Unis dans les années trente en l’eugénisme – ainsi qu’au racisme et à l’autorité patriarcale, dans le cas du procès plutôt matriarcale.

Afin de protéger la race blanche des « indésirables », les eugénistes étaient déterminés, entre autres mesures, à éliminer la « sous-humanité » de leurs propres rangs. Confrontés à des défauts mentaux, moraux et physiques, ils ciblaient les blancs pauvres, handicapés, dépendants de substances illicites et sexuellement transgressifs perçus comme menaçant la vitalité du pool génétique, soit en raison de leurs traits héréditaires, soit en raison de leur apparente probabilité de franchir la ligne rouge que définissaient les bonnes moeurs.

Cela semble juste. L’eugénisme faisait partie du « papier peint » national dans les années 1920 et 1930. Voici ce que Margaret Sanger, la fondatrice de Planned Parenthood, a écrit dans son projet de « baby code » en 1934 :

« Les personnes débiles d’esprit, les criminels congénitaux habituels, les personnes atteintes d’une maladie héréditaire et d’autres personnes jugées biologiquement inaptes par les autorités doivent être stérilisées ou, en cas de doute, doivent être isolées de manière à empêcher la perpétuation de leurs afflictions par la reproduction ».

Même les partisans d’Ann ont accepté la nécessité de l’eugénisme. Ils ont simplement affirmé qu’une riche fille blanche comme elle ne méritait pas d’être stérilisée. La stérilisation eugénique imposée à des « personnes pauvres, handicapées et « rebelles » » était un moyen de « réduire le nombre de personnes malsaines dans la population », écrit Farley dans son ouvrage.

Maryon n’a pas eu beaucoup de temps pour profiter de son héritage, elle décéda en 1939. Ann s’est également mariée cinq fois et décéda en 1956 à l’âge de 40 ans.

Article de Michael Cook paru sur son site BioEdge. Lien: https://en.wikipedia.org/wiki/Peter_Cooper_Hewitt