Phosphate et uranium au Brésil : une combinaison rentable

L’une des premières sources d’uranium aux Etats-Unis lors du projet Manhattan était le traitement du minerai de phosphate issu des mines à ciel ouvert du centre de la Floride. Ce minerai contient environ 100 ppm d’uranium et après un procédé d’extraction et de production de phosphate trisodique et de phosphates d’ammonium, le résidu, du gypse, est impropre pour la fabrication de plâtre car il est trop radioactif. À la suite de diverses restrictions d’exportations vers la Chine la Floride a vu son activité de production de phosphates décliner. D’autre part la production d’uranium à partir de ce minerai a été abandonnée après la deuxième guerre mondiale. Le gypse phosphaté, résidu de la production de phosphates qui ne peut pas être utilisé pour la production de plâtre est stocké sous forme de collines artificielles sur lesquelles rien ne peut pousser. On estime que 280 millions de tonnes de ce résidu sont stockés dans le monde chaque année car il n’existe pas de solution économique pour débarrasser ce gypse de l’uranium, du thorium, du radium et également du cadmium qu’il contient malgré le fait que la radioactivité est pourtant faible en comparaison de certaines autres roches ignées telles que certains granits.

Au Brésil, l’Etat de Ceara dans la région du Nordest (capitale Fortaleza) a décidé d’exploiter les importants dépôts de phosphates situés dans la région de Santa Quitéria au centre de l’Etat pour produire non seulement des engrais phosphatés mais également de l’uranium. Le gisement représente la plus importante réserve d’uranium du Brésil. Les quelques 80 millions de tonnes de minerai dont les teneurs respectives finales en P2O5 et U308 sont de 11 % et 0,01 %. Le complexe industriel pourra produire chaque année 1600 tonnes d’oxyde d’uranium appelé aussi « yellow cake » comme sous-produit de la production de 240000 tonnes de P2O5 annuellement. À terme le Brésil envisage de développer son programme électronucléaire mais ne sera jamais un exportateur de phosphate car cette nouvelle production de P2O5 sera totalement absorbée par les besoins domestiques de l’agriculture par ailleurs en plein essor.

J’ignore quelle est la composition des minerais de phosphate du Maroc qui a annexé sans que la communauté internationale s’en émeuve le Sahara Occidental mais je subodore qu’elle est intéressante pour justifier l’implantation d’une importante installation militaire américaine dans cette région. Il faut toujours lire entre les lignes les filets d’information et dans le cas du Maroc, premier producteur du monde de phosphate qui détient dans son sous-sol maintenant étendu au Sahara occidental 72 % des réserves mondiales de phosphate, c’est encore plus important. Il est certain que le phosphate marocain contient de l’uranium et du thorium puisque le minerai provient de sédiments marins comme en Floride et au Brésil. Or les océans sont la première réserve mondiale de ces deux métaux, d’où l’intérêt renouvelé pour extraire au moins l’uranium des gypses, résidus fatals de la production de P2O5. Enfin l’OCP (Office Chérifien des Phosphates) construit actuellement une gigantesque extension de l’usine de production de phosphate d’ammonium datant de 1986 sur le sol marocain afin de réaliser de confortables plus-values sous la protection bienveillante de l’armée américaine. Gageons que dans un proche avenir le Maroc, comme le Brésil, s’intéressera de très près à l’extraction des gypses résiduels pour produire de l’uranium, le seul combustible actuellement capable de produire de l’électricité totalement décarbonée de manière fiable.

Sources : World Nuclear News et Office Chérifien des Phosphates

6 réflexions au sujet de « Phosphate et uranium au Brésil : une combinaison rentable »

  1. J’ai une totale confiance envers les scientifiques pour trouver des solutions novatrices dans les domaines de l’énergie, la génétique, le numérique, l’agriculture, l’environnement ….
    Encore faudrait-il que le monde politique ne vienne pas perturber ces évolutions, et là c’est pas gagné.

      • Il est tout à fait surprenant que la majorité des pays occidentaux abandonnent l’énergie nucléaire pour des raisons relevant de basses manoeuvres politiciennes comme par exemple l’Allemagne ou la France pour Fessenheim et Super-Phoenix alors que seuls deux pays dans le monde poursuivent une politique de R&D très active dans ce domaine et construisent des usines électro-nucléaires sans relâche : la Chine et la Russie. Dans 15 ans, je l’ai déjà dit sur ce blog, la France devra acheter des centrales nucléaires à la Chine après le coûteux fiasco du programme « renouvelable » de l’énergie éolienne et la fermeture d’autres réacteurs pourtant promis à encore 30 ou 40 ans de fonctionnement. Tous les pays occidentaux seront à la merci de la Chine et de la Russie, deux pays aux économies planifiées (au sens gaullien du terme) qui gouvernent en se tournant vers l’avenir et non pas au jour le jour comme c’est à l’évidence le cas actuellement. Guy40800 mentionnait aussi le numérique, la génétique le numérique et l’agriculture : la Chine est maintenant leader mondial dans ces 4 domaines. Ce n’est pas inquiétant si on se comporte avec un peu moins de paranoïa que Donald Trump …

      • Jacques Henry, il n’y a pas d’avenir dans le nucléaire, car d’une part, en développant le nucléaire, vous allez un jour au l’autre arriver au pic d’extraction de l’Uranium, et d’autre part, en donnant l’accès a l’energie a des personnes qui n’en n’auraient pas eu sans cela, vous allez augmenter leurs besoins dans d’autres formes d’énergie, dont le pétrole, et vous allez accélérer le pic dans les autres énergies, et accélérer la vitesse de la catastrophe. Nous entrons en phase de décroissance et il faut plutôt penser comment vivre avec moins d’énergie, plutôt que de penser comment substituer une énergie a une autre pour continuer de croitre, et donc décaler et amplifier le phénomène dans le temps.

      • Désolé d’apporter dans le débat une note de pessimisme hélas réaliste.
        Après le prochain effondrement de l’Occident, les survivants leucodermes, s’il y en a, vivront au mieux comme les Amish.
        Les survivants mélanodermes vivront comme dans le bled ou la forêt, à l’âge de pierre.
        Le problême de l’énergie sera très secondaire pour eux, bien moins important celui de la nourriture.
        L’Orient va vouloir continuer à croître économiquement et socialement, et va avoir besoin pour cela de beaucoup d’énergie électrique sans dépendre de pays tiers ou de ressources en cours d’épuisement.
        Ils vont donc tout naturellement construire des triplets de réacteurs (deux à neutrons lents et un à neutrons rapides) qui leur donneront un bon siècle de tranquillité pour voir venir, et ils ont d’ailleurs déjà commencé.
        Peut-être exporteront-ils cette technologie en Afrique ou en Amérique Latine, mais je n’en suis pas du tout sur.
        La décroissance nous sera imposée de façon drastique et violente, mais une partie de l’humanité pourrait bien s’y refuser.

  2. Une raison « simple » est la peur du nucléaire.
    Qu’elle soit fantasmée, gonflée, exagéré, irrationnelle ou tout ce que vous voulez, cela est bien ancré (a bien été ancré) dans la tête d’une bonne partie de la population;
    comme par exemple « les néonicotioïdes-tueurs-d’abeille » (tirets de rigueur) ou « le -CO2-d’origine-humaine-responsable-du réchauffement/dérèglement-climatique » (idem).
    Partiellement vrai ou pas, ces mantras sont devenus des « vérités (scientifiques !) » à force d’être répétés, repris, serinés, « brain washés » etc…

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