Je me suis permis ici de faire figurer un article de Yann Rousseau paru le 28 janvier sur le site Les Echos pour illustrer l’incommensurable imbécillité des politiciens (japonais en l’occurence mais il en est de même en Europe) qui sont obnubilés par le principe de précaution et la peur irraisonnée du nucléaire civil. Certes il y a eu un grave accident nucléaire au Japon mais il faut relativiser la gravité de la situation. Durant ma carrière de recherche en biologie j’ai utilisé des doses importantes de tritium. Je me suis certainement contaminé sans le savoir comme j’ai aussi eu la surprise de m’être contaminé à deux reprises par de l’iode radioactif, ce qui est beaucoup dangereux. Et pourtant je suis toujours vivant et bien vivant …
« Comment 16 grammes de tritium dans un million de litres d’eau paralysent Fukushima »
Neuf ans après la catastrophe, le gouvernement japonais doit se prononcer sur le sort de l’eau « contaminée » qui s’accumule sur le site de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi. Tokyo préférerait un rejet en mer, conforme à ce que font les autres centrales [nucléaires] de la planète [situées en bord de mer], mais le projet tétanise la région.
Les cerisiers ont presque tous disparu de Fukushima Daiichi. Plantés à partir des années 1970 pour égayer la gigantesque centrale nucléaire du nord-est du Japon, la plupart des « sakuras » ont été abattus après la catastrophe de mars 2011 qui a ravagé le site et sa région. Plus de 800 des 1.200 arbres à fleurs recensés auraient été abattus sur les neuf dernières années, laissant place à un décor de science-fiction.
Pour figer les poussières radioactives, les collines sont désormais recouvertes d’un ciment gris clair et de longues dalles de béton renforcé sur lesquelles ont poussé partout de gigantesques citernes bleues et grises. La centrale est noyée sous ces 965 réservoirs contenant chacun près de 1.200 tonnes d’eau « contaminée ».
L’heure des choix
Tepco, l’opérateur, estime qu’il peut encore trouver un peu d’espace pour en construire quelques dizaines de plus. « Mais très vite, à l’été 2022, on va atteindre notre capacité de stockage maximale », explique Junichi Matsumoto, le porte-parole de la division en charge du démantèlement chez l’électricien. « Le gouvernement va devoir prendre une décision sur la gestion de cette eau », prévient-il, sans s’engager sur le sujet, conscient de son extrême sensibilité.
Depuis la catastrophe, Tepco pompe en permanence les eaux chargées en éléments radioactifs qui s’accumulent sur le site. Le groupe doit capter les eaux qu’il utilise pour refroidir les réacteurs 1, 2 et 3, mais également récupérer les eaux naturelles souterraines qui s’infiltrent toujours dans les sous-sols ravagés des tranches construites au pied d’une colline.
Reste le tritium
Au total, Tepco a déjà « récupéré » 1,18 million de mètres cubes d’eau qu’il a filtré dans ses trois usines de décontamination construites sur place. « Nous parvenons à retirer 62 des 63 radionuclides contenus dans ces eaux », détaille Kenji Abe, l’un des cadres de l’électricien. « Mais il en reste un, le tritium », ajoute-t-il avant de présenter au visiteur du jour un petit bocal pharmaceutique contenant 30 centilitres de cette eau de la discorde. « Elle n’a pas d’odeur, pas de couleur, elle est peu radioactive », insiste-t-il.
Selon les calculs du ministère japonais de l’Industrie, l’ensemble de l’eau stockée sur le site contient 860 TBq (terabecquerels) de tritium soit l’équivalent de… 16 grammes de cet isotope radioactif de l’hydrogène. En décembre dernier, les autorités nippones ont expliqué que ces eaux pourraient soit être évaporées dans l’air, soit être progressivement diluées en mer sur une vingtaine d’années.
En France aussi…
Tokyo rappelle que de l’eau tritiée a été rejetée dans l’océan pendant des décennies, avant la catastrophe, sans qu’aucun dégât sur l’environnement ne soit jamais constaté. Les autres centrales nucléaires de la Terre rejettent aussi de l’eau tritiée », note encore Masato Kino du ministère de l’Industrie.
En France, le site de retraitement de la Hague en a rejeté, lui, en 2018… 11400 TBq selon Orano, qui précise dans son rapport environnemental que la limite autorisée sur le site français est de 18500 TBq. Le complexe français écoule ainsi en vingt jours ce que la centrale de Fukushima Daiichi voudrait rejeter en… vingt ans. Depuis l’accident, ce n’est pas si simple. Nous avons un important problème de perception et nous devons obtenir l’accord de chacun », souffle le haut fonctionnaire.
Pêcheurs en souffrance
En dehors du site, le projet d’un rejet en mer fait l’unanimité contre lui. Dans le port d’Onahama, aussi situé dans la préfecture de Fukushima mais à une cinquantaine de kilomètres plus au sud, les associations de pêcheurs sont catégoriques. « Nous souffrons déjà des rumeurs blessantes sur nos poissons », s’inquiète, un matin de criée, Hisashi Maeda, de la coopérative de la pêche au chalut.
Malgré des milliers de tests et l’absence de concentration de radio-césium supérieures aux standards internationaux les plus rigoureux, les consommateurs continuent de bouder les produits locaux. En 2019, les ventes de la préfecture n’ont représenté que 15 % des volumes enregistrés avant la catastrophe. Les marins pensent qu’un rejet, forcément mal compris, porterait un coup terrible à la filière.
Défiance générale
Les ONG sont tout aussi méfiantes. « Il y a d’autres solutions que le rejet dans l’air ou l’eau comme le fait croire le gouvernement, explique Kazue Suzuki, de Greenpeace. Mais les technologies d’extraction du tritium sont coûteuses et donc ils ne veulent pas les envisager », avance l’experte qui préférerait voir appliquer une stratégie de stockage de long terme et dénonce les erreurs passées de Tepco.
En septembre 2018, l’électricien avait dû admettre qu’une grande partie des eaux stockées sur le site contenait, contrairement à ses premières estimations, encore des radionucléides bien plus dangereux que le tritium. « Nous sommes aujourd’hui certains que 25 % peut être relâché sans problème. Et nous allons retraiter les 75 % qui auraient encore des concentrations d’autres radionucléides supérieurs aux standards », promet Kenji Abe, son bocal d’eau à la main.
Auteur : Yann Rousseau, à Fukushima Daiichi. Illustrations provenant de l’article des Echos
Bref commentaire. La deuxième illustration a probablement été mise en scène pour la cause journalistique. En effet le tritium se désintègre pour former de l’hélium-3 avec émission d’un anti-neutrino et d’un électron de faible énergie (rayonnement beta) qui ne traverse ni le verre ni le plastique. L’opérateur vérifiant la radioactivité du flacon d’eau avec un compteur de type Geiger recherchait des éléments radioactifs émettant des rayons gamma émis par les produits de fission de l’uranium ou par l’uranium combustible lui-même. Il faut enfin se souvenir que du tritium est naturellement présent dans l’eau car il apparaît massivement au cours de la collision d’un atome d’azote avec un neutron de haute énergie provenant du rayonnement cosmique. Ma conclusion, personnelle et que je ne partage qu’avec moi-même, est qu’il faut rejeter toutes ces « eaux tritiées » dans l’océan et il ne se passera strictement rien, les poissons contiennent déjà du tritium mais aussi, et surtout, du potassium-40 beaucoup plus radioactif que le tritium. Mais le principe de précaution étant respecté au Japon il suffirait qu’un tremblement de terre d’intensité moyenne détruise quelques-uns de ces immenses réservoirs construits à la hâte pour qu’on n’entende plus parler de ce tritium …