Le principe de précaution appliqué par la Commission européenne à l’agriculture

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En annonçant une augmentation des tarifs douaniers concernant des produits en provenance du Brésil et de l’Argentine et en menaçant de faire de même avec la France, Donald Trump entraine plus profondément le monde dans une guerre commerciale dommageable. Bien que cela ait été passé sous silence par les médias l’Union européenne est également en difficulté avec l’Organisation Mondiale du Commerce en raison du renforcement de son protectionnisme. Au mois de novembre 2019, lors de la réunion de l’OMC à Genève, l’Inde a rejoint le Canada, l’Australie, l’Argentine, le Brésil et la Malaisie en déposant une plainte officielle contre l’Union Européenne concernant les obstacles aux importations agricoles. Non seulement l’UE a augmenté les tarifs douaniers pour les cultures telles que le riz et les oranges pour protéger les agriculteurs de l’Union subventionnés par celle-ci mais elle utilise également des règles de santé et de sécurité pour bloquer les importations. L’ironie est que ces tarifs douaniers sont déguisés en mesures de précaution contre les menaces pour la santé et l’environnement alors qu’en fait ces tarifs empêchent parfois les Européens de profiter de bienfaits pour leur santé et pour l’environnement.

Les plaintes de l’OMC accusent l’Europe de restreindre « inutilement et de manière inappropriée » le commerce en imposant des barrières réglementaires sur les résidus de pesticides qui violent les normes scientifiques internationales et le « principe de l’évidence ». Pire encore : « il semble que l’Union Européenne tente unilatéralement d’imposer sa propre approche réglementaire à ses partenaires commerciaux » ce qui nuit de manière disproportionnée aux agriculteurs des pays en développement dont les moyens de subsistance dépendent des exportations.

Le problème est que l’UE, contrairement au reste du monde, fonde sa réglementation sur le « danger présumé », la possibilité qu’un produit chimique puisse provoquer, par exemple, un cancer, même si cela est vrai à des doses incroyablement élevées. En revanche les règles de l’OMC exigent une analyse complète des « risques » qui tient compte de l’exposition probable. Le café, les pommes, les poires, la laitue, le pain et de nombreux autres aliments courants qui font partie d’une alimentation saine contiennent des molécules entièrement naturelles qui, à des doses suffisamment élevées, seraient cancérigènes. L’alcool, par exemple, est un cancérigène connu à des doses très élevées, bien que parfaitement sûr à des doses modérées. L’absurdité de l’approche de l’UE s’explique par le fait que si le vin était pulvérisé sur les vignobles en tant que pesticide, il devrait être interdit selon une approche se fondant sur les « risques ».

Tout ceci provient de l’insistance obsessionnelle de l’UE à appliquer une version particulièrement stricte du principe de précaution, comme l’exige le traité de Lisbonne. En plus de s’écarter des normes scientifiques internationales, cela crée un biais insurmontable contre les innovations car toute innovation présente des risques hypothétiques, tandis que les dangers des technologies existantes ne sont pas évalués de la même manière. Ironiquement, le principe de précaution rendra impossible le développement des technologies innovantes qui peuvent promouvoir la santé humaine, améliorer l’environnement et protéger la biodiversité. Tout est alors potentiellement risqué alors que ce qui devrait être considéré est l’équilibre entre les risques et les avantages.

L’Allemagne prévoit d’éliminer progressivement l’utilisation de l’herbicide glyphosate et la Commission européenne s’oriente vers un interdiction de ce produit mais pas d’autres produits de remplacement beaucoup plus toxiques. C’est l’un des problèmes qui ont amené des dizaines de milliers d’agriculteurs allemands dans la rue pour protester. Il a été démontré à maintes reprises que le glyphosate est beaucoup moins toxique pour les animaux que le café, même à des doses élevées, sans parler des doses que les consommateurs ou les agriculteurs rencontrent dans la pratique. Cela a été confirmé par l’Autorité européenne de sécurité des aliments et ses équivalents en Amérique, en Australie et ailleurs.

Ce problème est important parce que le glyphosate, plus connu sous le nom de RoundUp, est un outil précieux pour la conservation des biotopes en les protégeant contre les espèces exotiques invasives. De plus partout dans les Amériques le glyphosate utilisé dans le cadre du « labour minimal » remplace aujourd’hui le labour de désherbage. Il en résulte une meilleure structure du sol, moins d’érosion, moins de dommages de la faune du sol, moins d’émissions de gaz à effet de serre, un meilleur stockage du carbone et une meilleure rétention de l’eau.

En protégeant les pratiques agricoles à l’ancienne, telles que la labour réservé au semis, ou l’utilisation d’herbicides beaucoup plus toxiques (2,4-D, Atrazine, Paraquat, etc) par les agriculteurs ou le sulfate de cuivre par les agriculteurs bio, l’UE impose alors des normes environnementales plus faibles à ses citoyens que dans certaines autres parties du monde. Tout ceci contribue à considérer comme une bouffonnerie que quitter l’UE résulterait pour un pays à réduire les normes environnementales en ne se pliant plus aux règlementations de la Commission européenne alors que c’est exactement tout le contraire.

Dans le même esprit l’Union Européenne interdit de fait les cultures génétiquement modifiées en exigeant des procédures incroyablement complexes, incertaines et longues, pour leur approbation et a désormais décidé que même les cultures modifiées sur leur propre génome (avec l’outil Crispr-cas9) où aucune information génétique étrangère n’est ajoutée doivent être soumises aux mêmes réglementations draconiennes. Par contre les cultures produites par bombardement aléatoire avec des rayons gamma, un processus beaucoup moins prévisible, sont exemptées, simplement parce que c’est une technologie plus ancienne (voir note en fin de billet).

La grande majorité des sojas, maïs, et cotons des Amériques sont cultivés avec un gène inséré provenant d’une bactérie qui tue certains insectes ravageurs à l’état de larves mais est inoffensif pour l’homme et les papillons adultes. Des études ont montré que autour de ces cultures génétiquement modifiées il y a eu une amélioration notable de la biodiversité partout dans le monde où elles sont autorisées. La plus grande ironie est que le gène en question, connu sous le nom de Bt, est dérivé d’une bactérie (Bacillus thuringiensis) utilisée depuis près d’un siècle comme pesticide biologique par les agriculteurs « bio ».

En définitive le protectionnisme européen ne fait pas que discriminer et pénaliser les pays pauvres mais il augmente les coûts pour les consommateurs nationaux et nuit à la compétitivité des agriculteurs européens. De plus cela se traduit par des normes environnementales inférieures sinon dégradées.

Article de Matt Ridley paru sur The Times au début du mois de décembre 2019. Illustration maïs Bt. Note. L’utilisation des rayons gamma pour la modification génétique des plantes est supervisée et en grande partie financée par l’IAEA. Des parcelles concentriques sont réparties en entourant une tour d’une dizaine de mètres de haut au centre de celles-ci supportant une source gamma de Cobalt-60 qui peut être dissimulée par un blindage de plomb actionné à distance pour permettre l’approche des expérimentateurs. Les doses reçues diminuent en fonction du carré de la distance des plantules réparties dans des parcelles disposées en secteurs circulaires. J’ai assisté à un congrès organisé par l’IAEA à Kuala-Lumpur concernant les modifications génétiques de bananiers et je peux affirmer ici que les résultats sont très décevants pour cette culture. Le seul avantage de cette approche est qu’elle est très économique : il suffit d’attendre et d’observer ce qui s’est passé d’autant plus que la source de cobalt est mise à la disposition des expérimentateurs gratuitement. Il serait intéressant que des agronomes aillent étudier ce qui s’est passé aux alentours de la centrale nucléaire de Tchernobyl alors que les animaux sauvages se portent à merveille … L’attitude de la Commission européenne au sujet de cette technique, autorisée puisqu’elle est ancienne, démontre bien que les « experts » de cette commission ne connaissent strictement rien aux techniques modernes de transgenèse ou de modification du patrimoine génétique des végétaux.

3 réflexions au sujet de « Le principe de précaution appliqué par la Commission européenne à l’agriculture »

  1. En vertu de principe de précaution, il faudrait interdire aux gens de faire des enfants puisque ceux-ci mourront au bout au de quelques décennies !

  2. Avec ces lapins-crétins au pouvoir, les agriculteurs laisseront une bande de 150 m vierge entre le champ et la prochaine habitation. Inutile, ils la vendront. L’acheteur ne respectera pas la clause de non-constructibilité, aidé par l’état de non-droit.
    Dix plus tard, rebelotte.
    À chaque cycle, la zone productive se rétrécira, jusqu’à devenir nulle.
    À un certain point, l’histoire des gilets-jaunes sera une aimable plaisanterie, le peuple affamé détruisant tout. Ce jour là, les lapins-crétins auront bien mérité leur surnom.
    Pas à pas, en direction de la Corée du Nord.
    J’exagère ? On parie ❗

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