L’une de mes petites-filles a décidé de visiter les îles Canaries avec une amie, en réalité une collègue qui, avec elle, partage la passion du cirque. Ma petite-fille est une virtuose du mono-cycle, jongleuse, et capable de bien d’autres prouesses dont j’ignore la nature et son amie pratique l’art des rubans et des drapeaux. J’avoue que je n’ai aucune idée de ce dont il s’agit. Bref, ces deux jeunes femmes, de moins de 25 ans l’une et l’autre, ont écouté avec une attention certaine mes propos relatifs à la destinée de l’homme sur le plancher des vaches. Avec une touche de provocation inspirée de mon passé de biologiste ayant côtoyé tant les hôpitaux que les abattoirs pour recueillir mon matériel de travail – je ne plaisante pas – la conversation a progressivement dérivé vers cette destinée fondamentale de l’être humain dontnous sommes prisonniers.
De quoi s’agit-il ? En réalité la réponse est très simple. Il y a une douzaine de milliers d’années nos ancêtres étaient encore des chasseurs-cueilleurs, ce qui signifie que les hommes partaient alentour avec des sagaies rudimentaires pour trouver du gibier et le ramener au campement alors que les femmes s’occupaient de leur progéniture et éventuellement collectaient quelques graines ou noix comestibles. Elles devaient également entretenir le feu situé au centre de l’abri, coudre les peaux de bêtes pour maintenir en état cet abri constitué de ces peaux de bêtes que les hommes rapportaient de leurs expéditions qu’elles préparaient à cette fin et éventuellement pour vêtir la communauté en hiver.
C’est vrai, j’ai débuté cette conversation sur ce thème avec une arrière pensée, la dichotomie entre la condition masculine et la condition féminine. Dans les communautés ancestrales, bien avant l’apparition de l’agriculture, l’homme, le mâle, était chasseur et sa ou ses compagnes étaient dans la « maison » pour prendre soin de la progéniture qui devait assurer la pérennité du groupe. Il y avait donc de fait un partage des responsabilités, on pourrait dire des fonctions, que chacun devait remplir pour la satisfaction et la survie du groupe. Les jeunes femmes, compte tenu de l’espérance de vie incertaine, plutôt limitée en réalité, se retrouvaient enceintes après leurs premières règles car il fallait absolument – il s’agit d’un instinct profondément ancré dans notre nature encore de nos jours – perpétuer l’espèce. Faire l’amour, on pourrait plutôt dire s’accoupler, était déjà l’un des passe-temps favoris de l’homme et je ne suis pas aussi affirmatif quant à l’intérêt que portaient les femmes à ce sujet.
C’est alors que, en ces temps de remise en cause systématique de l’identité des sexes et d’introduction de l’idéologie malthusienne consistant tout simplement à ne plus procréer pour « sauver » le climat et la planète, la conversation prit une tournure franchement plus réaliste. J’exposai alors mes thèses relatives à la destinée inscrite dans la profondeur de nos gènes qui n’a pas évolué depuis nos lointains ancêtres chasseurs-cueilleurs il y a des dizaines de milliers d’années. Nous sommes nés pour travailler afin de trouver de la nourriture, non plus dans la savane avec une arme rudimentaire mais chez le boucher, le marchand de légumes et le boulanger. Nous échangeons la monnaie que nous gagnons par notre travail contre de la nourriture. Il n’y a pas vraiment de différence entre le XXIe siècle et douze ou treize mille années avant l’ère commune.
Nos instincts nous poussent également à trouver l’ « âme soeur » afin de procréer et ces instincts sont d’autant plus exacerbés que l’acte de procréation, c’est-à-dire l’acte sexuel, est source de plaisir autant pour la femme que pour l’homme, il y a 12000 ans plutôt pour l’homme, j’imagine, comme je l’ai écrit plus haut. Sans vouloir choquer ces jeunes femmes je leur exposais que la reconnaissance, disons officielle, du plaisir sexuel féminin était un fait récent de même que la mention du clitoris dans les cours de sciences de la vie au collège. Je ne les ai pas choquées quand je leur ai appris que la grande majorité des petites filles se masturbaient et que les adolescents mâles en faisaient autant de leur côté.
Fort de l’attention qu’elles prêtaient à mes propos un peu décoiffants je déclarais alors que l’homosexualité tant féminine que masculine avait toujours été tolérée par le passé et que l’inceste et les mariages entre frères et soeurs avaient été et étaient toujours considérés comme des interdits. Seuls les pharaons d’Egypte du temps des Ptolémées contournèrent cet interdit du mariage consanguin en épousant leur soeur pour je ne sais plus quelle raison. Cette pratique contre nature fut d’ailleurs introduite en Egypte par les Grecs. L’endogamie au sens plus large est encore bien présente dans certaines parties du monde, en particulier au Moyen-Orient où il existe toujours des mariages arrangés entre oncle et nièce ou entre cousins. J’en suis alors arrivé au délicat sujet des trans-sexuels et j’ai abrégé la conversation en affirmant qu’il s’agissait d’une déviation également contre nature favorisée par les progrès récents de la biologie, de la chirurgie et de l’endocrinologie car il y a seulement trente ans cette attitude était tout simplement impossible parce qu’il n’existait pas d’hormones sexuelles de synthèse pour « changer de sexe », du moins en apparence. Une femme qui s’est transformée en homme est toujours une XX et un homme transformé en femme est toujours un XY. Elles m’approuvèrent quand j’affirmais que ces pratiques devraient être interdites par la loi mais par contre elles furent assez surprises d’apprendre que j’étais en faveur de la grossesse pour autrui (GPA), surtout en résidant dans un pays où la prostitution est légale et la GPA pratiquée sous le manteau par des officines secrètes alors qu’elle reste illégale. Je glissais dans la conversation quelques propos sur le débat houleux qui va traverser la France avec les lois stupides relatives à la grossesse médicalement assistée pour les femmes célibataires ou homosexuelles, un débat qui sera une excellente diversion politique afin de détourner l’attention sur d’autres sujets beaucoup plus préoccupants comme la dette de l’Etat, la destruction de l’industrie française ou encore l’immigration. Bref, je découvris que tant les parents que les enseignants des écoles ne font pas vraiment leur travail d’éducateurs. Ils n’abordent pas les sujets qui sont la source pour eux-mêmes de questions auxquelles ils n’osent pas répondre.