Qui n’a jamais vu la célèbre peinture sur bois de Katsushika Hokusai intitulée « La Grande Vague au large de Kanagawa« . Il est vraisemblable que l’artiste devait se trouver à la pointe de Zushi dans la préfecture de Kanawaga dont la principale ville est Yokohama et qu’il a observé cette vague scélérate lui ayant ensuite inspiré cette peinture célèbre puisque depuis Zushi, petite ville proche de Kamakura, il est possible d’apercevoir le Mont Fuji et également la baie de Tokyo. Les vagues scélérates (rogue wave en anglais), terreur des navigateurs, peuvent atteindre plus de 10 mètres de haut. Elles se forment non pas à la suite d’un tremblement de terre comme les tsunamis mais par une conjonction de divers facteurs, vents et courants mais aussi réflexions de la houle sur les rivages, qui ont pour résultat imprévisible ce type de vague. Celle qui a inspiré Hokusai devait se situer à près de 3 kilomètres du rivage dans la baie de Sagami ou dans l’entrée de l’immense baie de Tokyo et avoir une hauteur de près de 10 mètres.
Lors d’un voyage entre Hobart et la base française Dumont d’Urville dans l’Antarctique en février 1991, les marins de l’Astrolabe ont pu photographier une vague monstrueuses similaire dont ils ont estimé la hauteur à plus de 8 mètres en se basant sur la hauteur de la plate-forme pour hélicoptère du navire. Le même genre de vague fut observé dans l’estuaire de la Forth en Ecosse en 1834 par John Scott Russell, un ingénieur naval et mathématicien qui l’appella « vague solitaire » ou soliton, phénomène commun dans les estuaires à marée montante qui peut être amplifié selon les vents, le coefficient de la marée et la configuration côtière. Pour la vague de Hokusai le phénomène n’est pas directement apparenté bien que les modélisations mathématiques fassent mention de soliton.
Hokusai, parmi ses peintures et gravures – il y en a plus de 500 – dont nombre d’entre elles ont pour thème la mer, se trouve l’autre fameuse représentation du « Rêve de la femme de pêcheur » presque aussi fameuse que la Grande vague au large de la péninsule de Zushi. Pour les curieux il existe des trains directs vers Zushi depuis le quai numéro 1 de la gare de Shinjuku à Tokyo.
Source, doi : 10.1098/rsnr.2012.0066 , Notes and Records of the Royal Society
Tout récemment un article de journal (Figaro ?) rapportait que des scientifiques avaient reproduit de façon quasi parfaite, photo à l’appui, cette célèbre vague dans un bassin de carène… La photo de la vague solitaire dans les mers du sud est peu connue, peut-être pas d’ailleurs des marins qui la redoutent à juste titre.
C’est beaucoup plus que 10m, près de 30m! (IFREMER).
Non contents de surprendre par leur nature souvent imprévisible mais également capables de se montrer cruels par taquinerie, ou… taquins par cruauté ( un certain grand capitaine d’industrie automobile peut actuellement en témoigner !), les japonais excellent par ailleurs, c’est vrai, dans l’art subtil de l’évocation. Cette allégorie ruisselante et capiteuse vient nous le rappeler fort à propos.
Mail il est vrai que les abords marins de l’Empire du soleil levant regorgent de fantaisies naturelles en tout genre, comme par exemple le spectaculaire tourbillon créé par l’interaction des marées dans le détroit de Naruto entre la préfecture de Tokushima (sur l’île de Shikoku) et l’île d’Awaji. On peut l’observer tout à loisir depuis l’élégant pont suspendu d’Ōnaruto.