Maladie d’Alzheimer : coup de théâtre terrifiant !

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En 2010 un papier paru dans la revue PlosOne (voir le lien) décrivait les propriétés antimicrobiennes de la protéine amyloïde-beta, l’agent de la maladie d’Alzheimer. Cette constatation fut considérée à l’époque comme un effet du hasard alors que la recherche se focalisait surtout sur le rôle destructeur de cette protéine sur le cerveau en se fixant sur un nombre important de protéines neuronales diverses tout en étant un résidu catabolique amplifiant par lui-même ce processus destructeur conduisant à la maladie et à la démence finale puis la mort. La publication n’était pas vraiment concluante et elle passa pratiquement inaperçue d’autant plus que les travaux avaient été publiés dans une revue à accès libre ce qui la rendait moins prestigieuse que le New England Journal of Medicine ou encore The Lancet (sans commentaire) alors que PlosOne est aussi une revue à comité de lecture. Bref, des biologistes curieux mirent de côté cette information et il fallut quelques années pour reconsidérer le pourquoi de la présence de cette protéine amyloïde-beta dans le cerveau outre le fait qu’elle provoque une dégénérescence neuronale aggravant le tableau diagnostic de la maladie.

S’il s’agissait d’un mécanisme de défense gliale contre une attaque microbienne alors l’agresseur pouvait être éventuellement présent dans le cerveau …

Une observation fortuite des personnels sévissant dans les centres de gériatrie spécialisés dans les soins aux patients atteints de la maladie d’Alzheimer fut de constater que la plupart de ces patients souffraient de périodontite gingivale plus communément appelée plaque dentaire et comme ces patients n’arrivaient pas (ou plus) à se brosser les dents correctement personne ne se préoccupa de ce fait sauf quelques curieux … La périodontite ou inflammation peu visible des gencives avec persistance de plaque dentaire est provoquée par une bactérie appelée Porphyromonas gingivalis qui a le triste privilège de sécréter une protéine appelée gingipaïne qui est un enzyme, en fait une famille d’enzymes, capable de détruire les cytokines et de réduire la réponse immunitaire de l’organisme à cette attaque bactérienne. De plus cette bactérie est résistante à pratiquement tous les antibiotiques.

Ces biologistes curieux ont utilisé des souris qu’ils ont soumis à une infection buccale avec la bactérie P. gingivalis et ils ont recherché la présence de gingipaïne dans leur cerveau. Curieux rapprochement mais explosif quant aux résultats obtenus. La gingipaïne traverse la barrière cérébrale composée de cellules gliales qui entourent les vaisseaux sanguins, elle attaque ces dernière cellules appelées aussi astrocytes puis provoque, du moins chez les souris génétiquement modifiées pour développer la maladie d’Alzheimer, l’accumulation de protéine amyloïde dans leur cerveau (lien). Les souris « sauvages » utilisées dans les laboratoires de recherche ne développent pas la maladie d’Alzheimer et ce d’autant plus que leur espérance de vie ne dépasse pas trois ans.

Ces travaux ont été repris cette fois sur les cerveaux de sujets humains post-mortem et effectivement la présence de gingipaïne dans le cerveau, à l’intérieur des cellules gliales, à l’intérieur et à l’extérieur des neurones a été clairement identifiée. De plus l’ARN-16S spécifique de la bactérie a aussi été détecté dans le liquide céphalo-rachidien d’un grand nombre de patients souffrant de la maladie d’Alzheimer. L’ARN-16S est en quelque sorte la carte d’identité spécifique de chacun des micro-organismes présents sur Terre. Cet élément fait partie de la machinerie cellulaire de synthèse des protéines appelée ribosomes et chaque organisme vivant, quel qu’il soit, possède un ARN-16S qui lui est spécifique.

Le cheminement de ces travaux est exemplaire car il débuta lorsqu’un chercheur émit l’hypothèse que la maladie d’Alzheimer pouvait avoir une origine infectieuse dans les années 1990 quand il se pencha sur le cas de patients développant cette maladie alors qu’ils étaient atteint par le virus du SIDA. Il put établir une corrélation (post mortem toujours) entre la charge virale du patient et la densité de présence de la protéine amyloïde dans le cerveau et son hypothèse d’un rôle protecteur de la protéine amyloïde contre les attaques bactériennes ou virales devait conduire au développement de la maladie en raison de sa sur-abondance dans le cerveau.

Quand on sait que près de 50 % de la population souffre d’infections buccales bénignes et de plaques dentaires ces 50 % vont-ils développer plus tard la maladie d’Alzheimer ? La question se pose car il s’agit d’un résultat étayé par une recherche incontestable. Le souci est qu’il est très difficile de se débarrasser définitivement de la bactérie P. gingivalis … Tout simplement terrifiant !

Source et illustration, doi : 10.1126/sciadv.aau3333

https://doi.org/10.1371/journal.pone.0009505

https://doi.org/10.1371/journal.pone.0204941

Note. Pour l’anecdote il ne me reste plus que 8 dents « d’origine » complétées par deux prothèses amovibles. Depuis des années je brosse l’ensemble après chaque repas, les prothèses sont nettoyées régulièrement avec de l’eau de Javel et je brosse également les dents restantes avec de l’eau de Javel concentrée au moins deux fois par semaine : c’est le seul produit abordable (1 litre = 1 euro) capable de tuer 99,98 % des microorganismes en quelques secondes et je ne doute pas une seconde que P. gingivalis est détruit par ce traitement pas très agréable, il faut le reconnaître !

17 réflexions au sujet de « Maladie d’Alzheimer : coup de théâtre terrifiant ! »

    • PS : l’avantage de cette hypothèse explicative est qu’elle confirme que la maladie d’Alzheimer n’est pas héréditaire (ce qui est à priori le cas dans 99 % des cas).

      • Une petite précision terrifiante : sur 54 prélèvements de cerveaux de sujets morts de la maladie d’Alzheimer 51 étaient positifs pour l’arginine-gingipaïne et 49 positifs pour la lysine-gingipaïne. Ce sont deux formes de gingipaïne. Il s’agit de la première mise en évidence incontestable d’une origine bactérienne de la maladie d’Alzheimer par la société Cortexyme qui a mis au point des inhibiteurs de cette famille d’enzymes mais lors d’essais cliniques toujours en cours la charge cérébrale en protéine beta-amyloïde ne diminue pas. Les essais cliniques sont complexes puisqu’il est interdit de procéder à des biopsies cérébrales sur des sujets vivants … Pour reprendre un mot de votre commentaire c’est « incroyablement » terrifiant !

      • En tous cas, espérons que l’utilisation d’inhibiteurs enzymatiques appropriés permettront rapidement la guérison des malades d’Alzheimer 🙂 …les essais cliniques de phases 2 et 3 seraient prévus pour démarrer cette année.

      • Berkeley Earth : des gars qui ne sont pas climatologues et qui réinventent la courbe en crosse de hockey de Mann …LOL…excellent 🙂

      • la courbe en crosse de hockey de Mann II.
        Et bientôt la III, puis la IV puis la V.
        Un peut comme Terminator.
        Plus besoin de TV ni d’aller au cinéma…

      • « berkeley… »
        Chouette ! Ils mettent une prédiction pour 2019 : la TMG serait supérieure à 2018 (normale: le réchauffement, plus qu’hier mais moins que demain) et inférieure à 2016 (normal, faible proba d’El Nino)

      • @calendos
        « Berkeley Earth : des gars qui ne sont pas climatologues »

        Bin oui, pas plus climatologues que Steve McIntyre et Ross McKitrick, mais je vous sens chaud pour démontrer que leurs calculs sont foireux. C’est open bar, allez-y, tout est en open acces.

      • Non merci…je ne plaide plus les causes perdues d’avance depuis la fin de mon adolescence 🙂

  1. et la plaque dentaire est aussi un foyer parfait pour abriter toutes les formes d’infections, qui peuvent , à la moindre blessure( en se brossant les dents par exemple) passer dans le sang.
    Et vous brosser les dents, lorsque vos gencives sont envahies, ne vous sera pas d’un grand secours, car la plaque se propage sous la gencive,insidieusement, parfois très profondément, provoquant le retrait de celle-ci, et exposant encore plus les racines de la dent aux agents extérieurs.
    Une fois présente, la plaque est quasiment impossible à éliminer.Il semblerait que la présence de la plaque est conditionnée par la composition de la salive, car certains sujets ne la développent jamais?
    J’ai eu la chance d’avoir, un peu tard, mais pas trop tard, le bon conseil, me faire traiter par un spécialiste parodontologue, le dentiste qui vous fait un détartrage ne vous sera d’aucun secours.
    Le traitement est pénible et douloureux, car il procède d’un curetage jusqu’aux racines,(on saigne pas mal),parfois jusque dans les intervalles de racines fourchues, mais le résultat a été spectaculaire, et j’ai pu récupérer des dents « sur le départ »
    Evidemment ce traitement (coûteux) doit être répété, périodiquement.
    Un palliatif:masser les gencives avec le doigt imprégné d’une goutte ou 2 d’huile essentielle de girofle et de géranium, efficacité restant dans le domaine de la croyance, jusqu’à plus ample information
    Pas trouvé dans ma région en France, de parodontologue patenté.
    En Belgique, Debeule à Waterloo

  2. Ma doué ! À la javel, comme vous y allez! Je pensais que la flore buccale avait une utilité… Au risque de vous crisper, pourquoi ne remplacez vous pas la javel dans votre bouche par une simple goutte d’HE d’arbre à thé sur votre dentifrice une fois par jour ? C’est très efficace et ça n’endommagera pas votre bouche…

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