C’est l’institut international de management et de développement (IMD, Lausanne, Suisse et Singapour) qui l’affirme : il est opportun d’investir au Japon. Le Professeur Dominique Turpin fait l’analyse suivante parue dans le bulletin mensuel de l’IMD et dont voici une traduction par mes soins. Illustration Tokyo, Shinjuku et le Mont Fuji en arrière plan. Source IMD ( https://www.imd.org/publications/articles/time-to-invest-in-japan )
Plusieurs facteurs convergent pour créer un environnement économique au pays du Soleil Levant
La confiance en l’économie s’est récemment accrue parmi les compagnies japonaises ainsi que chez les consommateurs. Le plus récent ‘Tankan », en d’autres termes la dernière enquête auprès des entreprises réalisée par la Banque du Japon en décembre 2017, a révélé un niveau de confiance des corporations japonaises le plus élevé depuis août 1991. Selon l’enquête annuelle, réalisée pour les services du Premier Ministre au cours de l’années 2017, 73,8 % des Japonais étaient globalement satisfaits de leurs standard de vie quotidienne, le plus fort pourcentage depuis que cette enquête a été mise en place il y a plus de 50 ans. Merrill Lynch indique en outre que le produit intérieur brut réel du Japon a augmenté de 1,8 % en 2017 et qu’il est prévu d’augmenter de 1,7 % en 2018. C’est une hausse modeste si on la compare à celle d’autres pays de la région, cependant ce sera avec 2018 inclus la plus longue période d’amélioration économique depuis la fin de la seconde guerre mondiale.
Cinq raisons clé pour l’optimisme et la confiance.
1. Durant les 18 derniers mois le Japon a vécu sa plus longue période de croissance depuis 1945. Même si on ne peut pas prédire l’avenir en examinant le passé la bonne humeur générale favorise une spirale d’optimisme mesuré auprès des entrepreneurs confirmée par les récentes enquêtes mentionnées ci-dessus.
2. Les compagnies japonaises disposent toutes d’importantes réserves de trésorerie et ont été encouragées par le gouvernement à relever les salaires et à investir afin d’assurer l’augmentation de leurs capacités de production et d’améliorer leur productivité. Etant donné la faiblesse criante de main-d’oeuvre domestique une augmentation des salaires est prévisible durant le printemps prochain, ce qui encouragera les consommateurs japonais à augmenter leurs dépenses et ce qui permettra d’atteindre une inflation de 2 % par an, l’objectif du gouvernement. L’administration Abe a annoncé que si les grandes corporations augmentent les salaires de 3 % et investissent jusqu’à 90 % de leurs coûts de dépréciation ils pourront bénéficier d’une déduction de 20 % des taxes générées par l’augmentation des salaires.
3. L’année dernière l’environnement économique global a été très favorable aux compagnies japonaises. Les autres économies asiatiques sont attendues pour faire aussi bien en 2018 et l’environnement économique chinois s’améliore. la probabilité d’une récession chinoise majeure s’évanouit dans la mesure où les analystes économiques japonais prévoient un ralentissement progressif de leur puissant voisin plutôt qu’un atterrissage brutal..
4. Le Premier Ministre Abe ne sera pas confronté à de nouvelles élections générales avant 2021 et il est pressenti pour être le Premier Ministre le plus longtemps en exercice depuis l’année 1945 favorisant ainsi une stabilité politique favorable pour le pays. Confronté à une opposition affaiblie, Abe dispose de toute la liberté pour continuer ses réformes politiques et économiques. Depuis qu’il a accédé au pouvoir en décembre 2012, le yen s’est replié de 20 % par rapport aux autres principales devises. Dans le même temps l’indice Nikkei a doublé, deux facteurs qui ont grandement amélioré la compétitivité des entreprises japonaises.
5. Finalement, le secteur de la construction, en particulier dans l’hôtellerie et les infrastructures va continuer en 2018 en prévision des Jeux Olympiques de Tokyo en 2020.
Les grands défis futurs pour le Japon en trois points.
1. La grande majorité des problèmes internes au Japon réside dans le vieillissement de la population, un taux de natalité faible et des ressources humaines qui s’effondrent. Ces trois paramètres constituent un casse-tête pour la compétitivité du Japon sur le long terme. Dans le même temps certains économistes avec des chefs d’entreprise considèrent qu’il s’agit de vastes opportunités tant pour les entreprises nippones qu’étrangères dans les domaines de la santé et de la robotique, pour ne donner que deux exemples.
2. La définition d’un nouveau modèle industriel et le développement d’une approche globale autant par l’exécutif que les grands groupes industriels seront déterminants pour que l’économie japonaise devienne effectivement compétitive à l’échelle globale. Avec une croissance limitée du marché domestique les firmes japonaises n’ont pas d’autre choix que d’accroitre leur compétitivité sur les marchés étrangers. Jusqu’à récemment les entreprises nippones étaient globalement très compétitives dans des secteurs manufacturiers clé comme l’automobile, l’électronique ou encore les machines-outil. Cependant ces secteurs industriels sont en cours d’évolution, par de nouveaux acteurs comme par exemple Tesla, ou diminuent en croissance comme l’électronique grand-public. Et si l’on s’intéresse à des secteurs comme l’hôtellerie, l’assurance ou les logiciels peu d’entreprises industrielles japonaises sont réellement globalisées.
3. Dans le domaine de la politique étrangère la menace nord-coréenne reste une préoccupation majeure. Kim Jong-Un a récemment déclaré qu’il était prêt à « faire plonger le Japon au fond de la mer », ce qui reste un sujet de préoccupation majeure pour le public japonais. Dans le même temps cette menace nord-coréenne encourage l’agenda de Abe consistant à revisiter la constitution japonaise et à renforcer le secteur militaire du pays.
Un temps pour investir
Etant donné cet environnement japonais, le temps est venu pour les étrangers d’investir au Japon. À court terme le marché boursier devrait continuer à performer. le Nikkei vient d’atteindre son plus-haut depuis 26 ans et les analystes prévoient encore une progression. À l’ouverture après le Nouvel an le Nikkei affichait 23952 points (21720 le vendredi 16 février 2018). Après une longue période d’hésitations de nombreuses corporations approchent des réformes structurelles. Par exemple Sony entreprend une restructuration majeure en s’orientant résolument vers la détection et l’analyse d’images et les plateformes de jeux. Les prévisions de profit opérationnel de la société atteignent une augmentation de 25 % sur un an ce qui sera supérieur au record de 1998.
Sur les moyen et long termes, le Japon offre de formidables opportunités pour les entreprises étrangères. Le vieillissement de la population peut ouvrir des marchés considérables pour les sociétés spécialisées dans la santé et l’assistance à la personne et c’est le cas aussi pour la robotique. Le domaine offrant les plus belles opportunités est incontestablement le développement de logiciels. Si on prend le cas de l’industrie automobile le modèle de fabrication « à l’ancienne » d’une voiture repose sur l’acier et l’ingénierie et fit la fortune de compagnies comme Toyota. Cependant avec l’avènement de la voiture autonome le véhicule automobile deviendra de plus en plus dépendant d’une multitude de logiciels et cette industrie n’est pas la spécialité du Japon. Malgré une tentative de répliquer les modèles de Google, Amazon et Apple, peu d’entreprises japonaises ont réussi à prendre des parts de marché au niveau local comme au niveau international à ces trois géants américains.
Pour conclure l’évolution digitale redistribue les cartes parmi les acteurs internationaux et peut donner un nouvel élan à la troisième économie mondiale. Dans le même temps les firmes nippones se réinventent pour combler les fossés de compétitivité dont elles souffrent. Et tous ces éléments se conjuguent pour offrir les plus importantes opportunités d’investissement étranger en Japon depuis la fin de la deuxième guerre mondiale.
Les deux problèmes cruciaux du Japon est le même que pour la majorité des pays de l’union ainsi que pour la Chine, soit la faiblesse de leur nativité et l’immensité de monnaies surproduites.
Une monnaie n’a de valeur qu’au regard de la richesse du pays émetteur et si, pour une richesse donnée, la masse monétaire s’accroit, celle-ci perd de sa valeur égale à la quantité produite.
C’est çà qui génère de l’hyper-inflation.
En revanche, cette nation a de nombreux atouts pour rebondir, ne serait-ce sa désaméricanisation avancée et la qualité de discipline de sa population doublée d’une bonne inventivité adjoint de celle de sa formation.
Vu que sa monnaie hyper-produite ne sort que très peu de ses frontières, l’effondrement économique en cours et, bientôt, de celui monétaire, aura sur ce pays un impact moins violent qu’en Union-Européenne, aux U.S.A. et en Chine.
Quand au regain économique mondial actuel, là aussi relatif, il ne tient qu’en raison même de cette hyper-productivité monétaire qui, déversé dans les structures spéculatives, a percolé jusque dans l’économie réelle.
C’est l’atonie économique progressive de l’Union-Européenne, provenant de sa triple contrainte idéologique, politique et économique, qui empêche l’économie internationale d’amorcer un dynamisme qui pourrait réduire les effets d’un effondrement du système monétariste.
C’est l’une des raisons qui me font dire que nombre de pays qui comptent veulent la destruction pure et simple de l’U.E..
Et cela ne peut se faire que grâce à la déstabilisation politique de la France et de l’Allemagne, surtout de la France.
Le yen s’est dévalué de près de 30 % en 5 ans, j’en sais quelque chose puisque je séjourne à Tokyo deux fois par an, et c’est pourtant une devise refuge comme l’a conseillé Charles Gave récemment avec dans une moindre mesure le franc suisse. Le problème du Japon tient aussi, malgré ses gigantesques réserves de devises, aux titres de dette étrangère qu’il détient : USA, France, Italie, Allemagne (mais oui), Pays-Bas …, et l’énumération est longue. Si les taux venaient à augmenter de 200 points de base, hors Grande-Bretagne, quatre pays ne pourraient plus faire face à leur dette, Italie, Espagne, France et Pays-Bas et là on entrera en terra incognita. Dès lors le Japon se retrouverait avec des titres de dette pourris et ça c’est un problème peu abordé par les analystes. Je n’ose même pas imaginer à quoi ressemblerait le bilan de la BoJ.