Le gène de l’homosexualité, une chimère statistique ?

Décriminaliser l’homosexualité comme par exemple en Arabie Saoudite ou en Egypte pourrait être un jour envisagé si on se réfère aveuglément à une étude réalisée à l’Université de Chicago relative aux différences génétiques entre homosexuels (1077 sujets étudiés) et hétérosexuels (1233 sujets étudiés). Tout a été fait avec des machines depuis la préparation des échantillons de sang ou de salive, jusqu’au séquençage de l’ADN puis l’étude statistique des résultats. Pour comprendre que la biologie moléculaire moderne est une histoire de machines automatiques et que la créativité du biologiste ne réside plus que dans des spéculations parfois hasardeuses parmi les 877000 SNPs (single nucleotide polymorphisms, mutations ponctuelles sur une seule base de l’ADN) détectées par le séquençage, 361870 d’entre elles ont été retenues pour une analyse détaillée. Après divers filtrages seulement 361080 ont finalement fait l’objet d’une recherche à l’aide de logiciels d’analyse spécialisés.

Il a résulté au final de ce travail effectué sans éprouvettes ni tubes à essai mais seulement avec des robots que les homosexuels présentaient une plus forte tendance statistique de SNPs que les hétérosexuels sur deux gènes bien précis situés respectivement sur les chromosomes 13 et 14. Il s’agit des gènes rs9547443 sur chromosome 13 et rs1035144 sur le chromosome 14.

Là où les biologistes ont du faire tout de même preuve de quelque créativité réside dans l’interprétation à donner ou plutôt à trouver pour expliquer le pourquoi et le comment de l’homosexualité. Venons-en donc aux faits.

Le premier gène affecté par des SNPs anormalement abondantes chez les homosexuels et situé sur le chromosome 13 s’appelle SLITRK6. La protéine codée est impliquée dans le développement des neurones en particulier au niveau du diencéphale, c’est-à-dire la partie la plus interne du cerveau qui comprend aussi l’hypothalamus et l’hypophyse. Cette protéine est également connue comme étant un candidat pour expliquer certains désordres neuropsychiques et de comportement. De là à dire que l’homosexualité relève de la psychiatrie serait hasardeux bien que certaines études (citées dans l’article, voir le doi en fin de billet) indiquent que le diencéphale serait plus développé chez les homosexuels que chez les hétérosexuels.

L’autre concentration statistiquement significative de SNPs située sur le chromosome 14 concerne un gène codant pour le récepteur de l’hormone de stimulation de la glande thyroïde (TSH ou thyrotropine), nommément le gène TSHR. Si le principal tissu affecté par l’hormone en question sécrétée par l’hypothalamus est la glande thyroïde il existe également d’autres tissus riches en ce récepteur dont certaines zones du cerveau densément peuplées de neurones comme l’hyppocampe. De là à dire après s’être longuement gratté le cuir chevelu qu’il y aurait peut-être une influence sur l’orientation sexuelle me paraît, à mon humble avis, un peu « téléphoné » comme on dit dans les chaumières.

Bref, le mythe d’une origine génétique de l’homosexualité ressurgit périodiquement mais cette fois avec quelques évidences qu’il faut prendre avec des pincettes après avoir lu en détail cet article.

Source et illustration relative au chromosome 13 : 10.1038/s41598-017-15736-4

8 réflexions au sujet de « Le gène de l’homosexualité, une chimère statistique ? »

  1. Tendance (car après tout c’est bien de cela qu’il s’agit) innée ou tendance acquise, la question du pourquoi, conditionnant le comment d’ailleurs, de l’homosexualité n’est pas nouvelle.
    La proposition détaillée ici d’un particularisme génétique n’est pas aberrante en soi, mais dans ce cas il faudrait pouvoir l’étayer au travers d’une recherche familiale menée sur plusieurs générations et donc délicate à mener. On peut en effet supposer et admettre que les codes génétiques relèvent essentiellement du patrimoine transmis. Autrement dit, la prédisposition homosexuelle relèverait-elle du domaine de l’héritage ? À priori, rien ne le prouve, même si l’observation que j’ai pu faire de comportement sexuel ainsi typé dans certaines fratries oblige au minimum à s’interroger.
    Autre point à éclaircir : la multiplication actuellement constatable et revendiquée par les « adeptes » de la pratique, du moins dans le monde occidental, où elle est souvent d’ailleurs fondue dans le moule d’une sexualité polymorphe et débridée, aurait plutôt tendance à infirmer, ou au moins à relativiser, cette approche purement génétique. Et dans cette optique, la part de l’acquis, qu’il le soit consciemment ou non et au travers de multiples processus, redeviendrait prépondérante.
    Dans tous les cas de figure, et mise en perspective avec la tragique infertilité qui touche désormais les populations européennes historiques, la question de ce qu’on définissait il y a encore peu de temps (amendement Mirguet de 1960) comme un authentique « fléau social » mérite d’être considérée avec toute l’objectivité voulue, ce qui n’est pas le plus facile à faire…
    Mais bon à l’échelle du temps, Sparte, Rome, Naples ou plus près de nous San Francisco existent toujours, alors !

  2. La théorie qui voudrait que l’homosexualité soit d’origine génétique me paraît trop simpliste pour être vraie.
    Comment alors expliquer que des vrais jumeaux ne soient homosexuels qu’en moyenne à environ 50 % (l’un des jumeaux est homosexuel et pas l’autre) ?

    • Si il y a 50% chez les vrais jumeaux cela tendrait à prouver qu’une composante génétique n’est pas à exclure ( car ce taux est , je pense, très supérieur au taux d’homosexuels dans la population en général)

      • J’ai du mal m’exprimer alors je reformule.
        Prenons une paire de vrais jumeaux (J1; J2), et ceci indépendamment de leur sexe (donc peu importe qu’ils soient XX ou XY au niveau de leur 23ème paire de chromosomes).
        J1 et J2 peuvent être hétérosexuels, homosexuels, voir de sexualité différente (J1, homo, J2 hétéro ou encore J1 hétéro, J2 homo).
        Ce dernier cas de figure où l’un est homosexuel et pas l’autre indique que l’orientation sexuelle n’est pas à priori d’origine génétique, puisque J1 et J2 ont rigoureusement le même ADN.

  3. @camenbert électrique
    Quel est le % de vrais jumeaux ayant une sexualité différente ( un homo vs un hétéro) et le % des vrais jumeaux étant tous les deux homos?

      • Voici l’abstract d’une des études :
        « Homosexual male probands with monozygotic cotwins, dizygotic cotwins, or adoptive brothers were recruited using homophile publications. Sexual orientation of relatives was assessed either by asking relatives directly, or when this was impossible, asking the probands. Of the relatives whose sexual orientation could be rated, 52% (29/56) of monozygotic cotwins, 22% (12/54) of dizygotic cotwins, and 11% (6/57) of adoptive brothers were homosexual. Heritabilities were substantial under a wide range of assumptions about the population base rate of homosexuality and ascertainment bias. However, the rate of homosexuality among nontwin biological siblings, as reported by probands, 9.2% (13/142), was significantly lower than would be predicted by a simple genetic hypothesis and other published reports. A proband’s self-reported history of childhood gender nonconformity did not predict homosexuality in relatives in any of the three subsamples. Thus, childhood gender nonconformity does not appear to be an indicator of genetic loading for homosexuality. Cotwins from concordant monozygotic pairs were very similar for childhood gender nonconformity.é

        Source : https://jamanetwork.com/journals/jamapsychiatry/article-abstract/495588?redirect=true
        J. Michael Bailey, PhD; Richard C. Pillard, MD – JAMA Psychiatry – 1991
        doi:10.1001/archpsyc.1991.01810360053008

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