Triste tropique … (A propos des îles Mariannes – 1)

Loin de moi l’idée de paraphraser Claude Levy-Strauss qui est à mes yeux l’un des plus grands cerveaux du XXe siècle, j’ai titré ce billet ainsi car il correspond bien à l’impression que j’ai ressenti en arrivant à Saïpan, l’une des îles des Mariannes du Nord. Depuis l’invasion de cet archipel par les Américains en 1944, ces dernier ont bouté les Japonais hors des îles (beaucoup d’entre eux se sont suicidés en se jetant du haut de falaises variées) et paradoxalement, la vie semble être restée immobile malgré le bull-doser yankee. Quand je parle du bull-doser yankee je veux dire, je veux dire tout le bien mais aussi tout le mal qu’apportent les Américains en territoire conquis. Certes, ils ont créé des routes, un hôpital, des écoles, des commissariats de police, des bases militaires, des centrales électriques, mais ils ont aussi apporté leur cortège de « bull-shit » comme disent les Québequois, des produits de consommation dont on se passerait volontiers, genre coca-cola, naturellement, ou toutes sortes de produits alimentaires inutiles, surtout dans un pays tropical où il suffit de gratter un peu la terre pour se nourrir, et aussi les stations d’essence pour alimenter les grosses voitures, c’est fou comme les Américains sont attachés à leur tas de tôle ! et plus il consomme de carburant plus ils semblent comblés, et la télévision, naturellement avec ses programmes totalement débiles, moralisateurs, faussement pudibonds, mais avec une soixantaine de meurtres par heure … enfin du « bull-shit » pour résumer l’impact de l’american way of life sur la vie locale. Dans tous les pays tropicaux il y a des cocotiers et des bananiers, eh bien, comble de l’ironie, on trouve dans les « markets », « mart » pour faire plus couleur yankee, des bananes estampillées Del Monte ou Dole à côté des petites sucrées locales. Bonjour l’empreinte carbone pour les dites bananes, elles viennent du Costa-Rica (le seul pays démilitarisé du monde) où justement Del Monte (ou peut-être Dole ou Chiquita, je ne sais pas trop) règne en maître pour que les peons se grillent au soleil pour enrichir ces grosses multinationales au fonctionnement opaque. D’ailleurs au Costa-Rica, seuls les employés yankee des trois sœurs sont autorisés à porter une arme. Au cas où les travailleurs des bananeraies se rebelleraient, il vaut mieux avoir un bon vieux gros revolver à la ceinture comme John Wayne dans Rio Bravo …

Passons, quand on arrive à l’aéroport de Saïpan, on est d’emblée confronté au bull-shit (encore) américain, les paperasseries et autres misères administratives auxquelles vous font subir des employés de la police des aéroports, des gens bedonnants, obséquieux, fiers d’emmerder au maximum une fournée de Japonais et de Coréens qui ne sont pas, de toute évidence, les bien-venus, et cerise sur le gâteau si je puis dire, avec mon fils, nous étions des ressortissants français et nous avons eu droit à un traitement de faveur. La France n’a pas d’accord de visa touristique avec le Commonwealth des Iles Mariannes du Nord (CNMI) et il nous a fallu au bas mot presque une heure, après une heure de queue (pour un malheureux Boeing 757 en provenance de Tokyo) pour enfin être en possession du sésame, l’ESTA, ne me demandez pas ce que ça signifie, je n’en sais rien, mais maintenant j’ai un visa valable environ 18 mois pour entrer sur le territoire américain mais ce truc est peut-être valable seulement aux Mariannes, je n’en sais rien. De toute manière, comme je n’ai pas du tout envie d’aller aux USA, ma question n’a aucune importance.

Enfin dehors, chaleur vraiment agréable, la vraie chaleur tropicale, genre 30-32 degrés, un peu de vent (les alizés) le ciel bleu avec des petits nuages blancs, des ibiscus et au loin quelques cocotiers naturellement.

Puis trajet de l’aéroport à l’hôtel dans un genre de gros « Espace » Chevrolet, on sent la puissance animale sous le capot ! Comme le chauffeur roule doucement nous avons tout le temps d’observer le surréalisme de cet endroit. Il y a plus de ruines et de bâtiments abandonnés que de vrais constructions propres et accueillantes. On dirait que l’endroit a été sinistré, que les gens on fui abandonnant des restes de béton qui est envahi par les herbes folles et les lianes. Juste à la sortie de l’aéroport, il y a une sorte de construction surréaliste en béton bien gris à cause de l’air marin, on dirait un maquette d’un film de cape et d’épée, un genre de chanteau inachevé en carton pâte. Le chauffeur nous apprendra que ce devait être un hôtel construit par un investisseur coréen mais que tout est abandonné. Nous n’en sauront pas plus. D’ailleurs à quoi bon puisque nous sommes venus pour profiter du soleil et de la mer et pas pour faire de l’ethnologie !

Finalement, toute les hypothèses ont traversé l’esprit curieux de mon fils qui s’est renseigné après coup, à son retour à Tokyo, sur l’état de l’économie du CNMI. Cet endroit a été prospère mais il est presque à l’abandon aujourd’hui. C’est à cause d’un gros « bull-shit » bien organisé, mais on en reparlera dans un autre billet

 

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